Pour les deux jeunes hommes de 21 ans, l’idée d’un voyage d’une telle envergure se trame depuis trois ans: «On était en cours de philosophie au cégep, et Thomas me parlait d’un voyage précédent où il avait traversé le Canada de Vancouver à Montréal… j’avais des étoiles dans les yeux, explique Louis-Martin.» N’étant pas des amis proches à l’époque, ils commencent tout de même à planifier le périple qui changera assurément leur vie: «C’est un peu un voyage initiatique, spirituel… Un voyage de découverte de soi», dit Louis-Martin.
À l’aube du grand voyage
Le départ de Montréal pour l’Alaska s’effectuera en avion. Ensuite, ils iront à vélo jusqu’en Basse-Californie, au Mexique, puis traverseront l’Amérique centrale par la côte ouest pour finalement parcourir l’Amérique du Sud jusqu’en Argentine. Mis à part quelques traversiers, notamment de Colón au Panama à Carthagène en Colombie, les deux aventuriers prévoient de tout faire à vélo.
Ils ne sont pas pressés. Le voyage durera un an, si ce n’est plus, puisque c’est un périple sans date de retour précise: «N’importe qui pourrait faire ce voyage-là puisque le but n’est pas de pédaler vite», dit Thomas. Ils comptent rester ensemble du début jusqu’à la fin, sans s’interdire pour autant quelques sorties individuelles.
La découverte de soi et de l’autre
Le périple est loin d’être un voyage de performance. Les jeunes cyclistes tenteront plutôt de se dépasser émotionnellement et spirituellement, tout en approfondissant la relation platonique, mais forte qu’ils entretiennent. En sortant ainsi de leur zone de confort, ils espèrent se retrouver sans les distractions du quotidien auquel ils sont habitués.
Quoiqu’ils anticipent avec optimisme de passer plus d’un an côte à côte, ils sont conscients que la route sera semée d’embûches imprévisibles. Ils s’avouent fébriles à l’idée de vivre des hauts et des bas en équipe. «On a vraiment des tempéraments complémentaires. Beaucoup de moments où Louis-Martin est angoissé, moi je ne le suis pas du tout, et vice-versa», dit Thomas.
Les deux cyclistes sont réalistes. N’ayant fait qu’un seul voyage en vélo ensemble et d’une durée de 4 jours seulement, ils ont une idée de que ce qui les attend: «Ça va être un gros travail sur nous-même. Il va y avoir mille et une situations qui vont nous donner du fil à retordre. Mais il faut être capable de s’en parler, de se donner de l’espace», explique Louis-Martin.
Pour le meilleur et pour le pire
Équipés du matériel de campement de base qui comprend une tente, des sacs de couchage, une poêle, quelques instruments pour la cuisine et des vêtements, les cyclistes se contenteront d’un attirail minimaliste, mais polyvalent pour rendre leur périple efficace. Pour se divertir, Louis-Martin prévoit trimballer sa guitare (démontable, faites de fibres de carbone) et Thomas, quelques livres. Les aventuriers ont privilégié un équipement léger, durable et fiable plutôt que la toute dernière technologie en matière de cyclotourisme. «Le défi, c’est de faire des choix. Il y a mille et une configurations possibles au niveau de l’équipement et du trajet. Comme notre objectif n’est pas de performer au maximum à vélo, l’équilibre entre le confort est l’efficacité est capital,» explique Louis-Martin.
Munis d’un GPS d’expédition qui leur permettra d’envoyer des messages de secours, en plus de fournir des indications géographiques, Louis-Martin et Thomas semblent prêts à tout: «La clé va être l’organisation et la discipline. Dès notre arrivée dans un endroit, il nous faudra repérer le poste de police, les hôpitaux et l’ambassade du Canada», précise Louis-Martin.
Les inquiétudes des cyclistes concernent davantage la possibilité de petits pépins techniques plutôt que des scénarios plus extrêmes. Par exemple, sur une distance de 800 km en Alaska, ils ne pourront avoir accès à des ravitaillements ou à des points de service. Ils devront donc traîner dans leurs sacs la nourriture et l’eau nécessaire en prévision d’une période de quinzaine de jours en continu sur la route. Idem dans le désert, au Chili, où ils devront se rationner pour plusieurs jours.
Louis-Martin note aussi la peur du changement, de cette transformation de leur entourage à leur retour: « Personnellement, je suis à un point où ma vie n’a pas le choix de changer. Donc ce n’est pas tant le changement de ma propre personne qui me fait peur, mais plutôt que les choses soient complètement différentes à notre retour au bercail», dit-il. Thomas soulève aussi ses inquiétudes quant aux régions plus dangereuses du Sud, là où les barrages et les enlèvements se produisent parfois. Encore une fois, l’organisation sera cruciale pour la bonne exécution du périple.
L’importance de la prudence
Les deux jeunes hommes soulignent aussi l’importance d’adopter l’attitude du voyageur. Ils devront être chaleureux, généreux et sociables, en demeurant toujours sur leurs gardes. Ici, ils devront s’intégrer aux communautés qu’ils visitent sans divulguer les détails quant à leur équipement ou leur trajet futur. Il sera à nouveau question d’équilibre, mais cette fois entre sociabilité et prudence.
Louis-Martin mentionne la dangereuse beauté de la vie sauvage avec emballement; Thomas est exalté quant aux rencontres incroyables qu’ils feront. C’est ainsi qu’ils se lanceront, à la fin du mois de juillet, dans ce périple pas comme les autres. Leurs sourires fébriles et leur complicité indéniable prouvent qu’ils sont bel et bien prêts à affronter plus de 12 mois ensemble, contre vents et marées, au volant de leur bicyclette.
Suivez le périple de Thomas et de Louis-Martin via leur page facebook @vingtcinqmillekm