L’autosabotage, c’est quoi?
Vous criez victoire! Après une recherche qui vous a semblé une éternité, vous avez enfin trouvé la perle rare. Il n’oublie jamais votre anniversaire, il plaît à vos parents, il est vif d’esprit et de plus, il a fière allure. Mais lorsqu’il vous donne un coup de fil, vous ne prenez jamais l’appel et laissez la tâche au répondeur. Et quand vous le croisez, plutôt que d’apprécier son apparence, vous vous fixez sur les détails les plus insignifiants, comme la couleur de ses chaussettes. Lorsqu’il tente d’établir un plan, vous vous défilez sans arrêt. Que se passe-t-il? Vous n’êtes peut-être pas sous le charme, mais si cette dynamique semble se répéter, elle pourrait révéler un penchant pour l’autosabotage.
Le sabotage de ses relations s’appuie sur un réflexe qui est profondément ancré, explique Bethany Cook, psychologue clinicienne. «C’est la réaction de l’individu (il ou elle) qui ne croit pas mériter l’affection et l’amour d’autrui, consciemment ou inconsciemment. Les actions et le comportement de l’autre suscitent des réactions négatives chez son partenaire: rendez-vous manqués, retards répétés et réactions exacerbées par la peur, menant aux confrontations et aux disputes. Souvent, un ami ou une personne de l’extérieur pourront lui faire prendre conscience de son comportement autodestructeur afin qu’il ou elle y remédie», ajoute-t-elle.
L’auteure Reena B. Patel explique que l’autosabotage est «la recherche consciente ou inconsciente de problèmes et de confrontations.» L’inconscient prévaut largement. «Beaucoup de gens n’ont pas la moindre idée qu’ils présentent un tel comportement», ajoute-t-elle.
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L’autosabotage n’est pas un trouble reconnu
Ne cherchez pas son diagnostic officiel. «Le comportement autodestructeur n’est pas inscrit dans le DSM-5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) comme trouble psychique.
On l’a cependant décrit comme un comportement prévenant la réalisation de ses objectifs», précise la Dre Abisola Olulade, médecin de famille du Sharp Rees-Stealy Medical Group de San Diego.
«Dans le domaine des relations, il peut décrire une volonté de les saboter pour éviter qu’elles ne deviennent profitables et heureuses.»
Des experts expliquent maintenant ce qui motive l’autosabotage, et les moyens possibles pour établir des relations plus saines.
Apprenez-en plus sur les problèmes de santé mentale qui vous menacent selon votre âge.
D’où provient l’autosabotage?
L’autosabotage, comme bien d’autres problèmes relationnels, possède de nombreuses causes qui reposent souvent sur la peur. «Il provient fréquemment d’un besoin de plus de sécurité et de contrôle», précise Rachel Eva Dew, spécialiste en médecine naturelle, coach de transformation intégrative de la vie et cofondatrice de la plateforme ModiHealth.
Voici des situations où vous devez vraiment cesser de vous excuser!
La peur
«Le comportement autodestructeur dans les relations s’alimente fréquemment sur la peur, les expériences négatives du passé, et même sur les relations malsaines ou traumatisantes de l’enfance. C’est une forme d’autoprotection qui a le malheur de souvent se transformer en prophétie autoréalisatrice qui anéantit les relations», ajoute Rachel Eva Dew.
La faible estime de soi
Une faible estime et conscience de soi sont deux autres causes classiques d’un comportement autodestructeur. Elles empêchent de ressentir la légitimité des bonnes relations.
N’hésitez pas à essayer l’un (ou plusieurs) de ces gestes pour augmenter la confiance en soi.
Les types d’attachement anxieux ou évitant
Les types d’attachement sont les diverses représentations de soi dans une relation. «Votre propre type d’attachement se modèle durant votre enfance autour de vos parents ou de vos tuteurs», explique Reena B. Patel. Un manque de confiance peut affecter une relation avec un partenaire. Près de 60% de la population présente un type d’attachement sécurisé qui leur permet de créer et de poursuivre des relations. Les autres ont des styles évitants ou anxieux (ou combinés), qui complexifient la formation de relations en raison de leur crainte de l’intimité ou du comportement anxieux qu’elle suscite. «Un type d’attachement anxieux ou évitant peut saboter une relation saine. Une pensée irrationnelle peut engendrer de la méfiance et de la jalousie. La peur de l’intimité peut aussi provoquer l’autosabotage des relations», continue Rachel Eva Dew.
La peur du rapprochement
La peur de vous rapprocher de votre partenaire peut vous empêcher de confronter vos défis, d’obtenir un soutien constructif et de composer avec tout sentiment négatif. Alors, plutôt que de profiter du réconfort d’un rapprochement, vous fuyez par peur ou par angoisse.
Pour le bien-être de votre couple, assurez-vous de ne jamais faire ces remarques à votre partenaire.
Les déclencheurs de l’autosabotage
Étonnamment, il n’existe que très peu d’études sur le comportement autodestructeur et ses déclencheurs, souligne la Dre Olulade. Cela rend sa compréhension plus difficile. On relie cependant fréquemment l’autosabotage à un traumatisme du passé non résolu.
Les traumatismes non résolus
«Il est impossible de passer sa vie sans se sentir un jour blessé par des mots ou des actions d’autrui, souligne Bethany Cook. Mais si vous arrivez à combler cette faille de façon positive, votre confiance dans les autres sera préservée et vous permettra de créer des liens significatifs avec vos relations proches.»
Les expériences traumatiques de l’enfance ne résultent pas toujours d’un abus verbal ou physique, précise-t-elle. Elles pourraient être liées à une mère narcissique, ou à un tuteur qui est lui-même victime d’un comportement autodestructeur.
«Un parent qui présente un comportement d’autosabotage dans ses relations le transmet souvent à l’enfant par effet d’apprentissage par l’observation. Les enfants imitent leurs parents, qu’on le veuille ou non», souligne-t-elle.
Reena B. Patel confirme le lien entre les relations traumatiques de l’enfance et l’autosabotage. «Tout traumatisme passé, incluant votre premier amour, peut y mener. C’est le résultat d’une crainte sous-jacente d’être indigne du bonheur.» Elle ajoute que les gens ont souvent peur de perdre leur liberté dans une relation, et adoptent un comportement autodestructeur. Comme toujours, l’analyse de ses blessures profondes peut en amorcer la guérison, mais une intimité accrue peut déclencher un déchaînement basé sur la peur.
Si vous avez besoin d’aide, voici comment trouver un bon psychologue.
Les lendemains qui «déchantent»
«Curieusement, c’est au moment où quelqu’un commence à s’adapter et à se sécuriser auprès d’une personne “parfaite” qu’il est le plus sujet à l’autosabotage», prévient Bethany Cook. Cela se produit lorsque la relation se dirige vers les eaux troubles et inconnues de la vulnérabilité et de l’intimité, qui s’avèrent particulièrement menaçantes.»
Ainsi, au lieu de s’unir pour résoudre leurs problèmes, les gens préfèrent prendre des moyens qui mettent ultimement leur relation en péril. «Les eaux agitées leur sont familières, car elles représentent leur environnement naturel», explique-t-elle.
Les signes de sabotage d’une relation
Nous avons demandé à des experts de nous donner des exemples courants de relations autodestructrices, et les moyens qu’ils conseillent pour faire face à chacune d’elles.
Soyez attentif aux signes qui montrent que vous êtes la personne toxique dans votre couple.
Le détournement cognitif (gaslighting)
Le détournement cognitif, en anglais gaslighting (éclairage au gaz), provient d’un film des années 40, Gaslight (Hantise), dans lequel un mari manipule sa femme en lui faisant remettre en question la réalité, ce qui amène celle-ci à croire qu’elle est devenue folle. Il se peut que vous ayez enduré une telle épreuve, ou que vous l’ayez infligée à votre conjoint.
Ainsi, si vous provoquez un doute chez votre partenaire au sujet de sa perception de son vécu, sabotez-vous votre relation? Bethany Cook en est absolument convaincue. «Le détournement cognitif est un des moyens les plus dévastateurs pour faire croire à quelqu’un qu’il ou elle a perdu le sens de la réalité, ce qui lui fait douter de sa propre santé mentale.»
Plutôt que de créer un environnement malsain qui remet en question l’équilibre psychique de votre partenaire, elle vous enjoint de consulter un thérapeute pour cerner votre traumatisme et votre façon de vous comporter avec les autres. «Partagez votre expérience avec votre conjoint pour qu’il vous apporte son soutien. Sinon séparez-vous. Une nouvelle relation sera plus saine, car vous aurez pris les moyens de mieux vous connaître», dit-elle.
L’infidélité
«L’infidélité est l’une des causes les plus éprouvantes pour un couple engagé. La commettre constitue un acte absolu d’autosabotage, selon la Dre Olulade. Si votre but déclaré est de construire une relation stable et durable, l’infidélité est le moyen assuré pour échouer. Les raisons pour lesquelles les gens sont infidèles restent cependant très complexes.» Cela peut avoir un sens différent pour chacun. Un flirt innocent pour un couple pourrait sembler inacceptable pour un autre.
Bethany Cook ajoute: «Il faut avant tout définir avec votre partenaire ce que serait l’infidélité. Il existe des règles de conduite depuis le premier couple du monde.» Certains couples permettent d’avoir une relation extraconjugale non amoureuse, alors que d’autres pourraient trouver cela inconcevable.
«Ceci dit, briser les règles du couple, quelles qu’elles soient, infidélité ou pas, peut être perçu comme de l’autosabotage», précise-t-elle. Et tenter de vous rattraper en effaçant, par exemple, vos numéros de téléphone douteux, n’y changera rien. «La personne concernée doit découvrir ce qui la pousse à vouloir tout gâcher, et le moyen le plus efficace pour y parvenir est la thérapie», affirme-t-elle.
Vous serez surpris d’apprendre ces vérités sur l’infidélité.
La distanciation des amis et de la famille
Si vous vous fréquentez depuis plus d’un an et ne vous sentez toujours pas enclin à faire la connaissance de ses parents, s’agit-il d’une forme d’autosabotage? Les experts y voient des nuances. Mais Bethany Cook n’y croit pas du tout, car il y a, selon elle, une infinité de raisons valides pour ne pas être disposé à rencontrer le reste de la famille.
«Il m’apparaît évident qu’après quelques années de vie commune, cette rencontre s’impose, précise-t-elle. Mais il se peut qu’auparavant, votre conjoint ait eu d’autres priorités, comme le remboursement de ses prêts étudiants, avant d’investir dans des billets d’avion. Et qu’il préfère employer ses vacances à ses choix personnels, plutôt qu’à la rencontre de votre famille.»
Il peut également avoir eu sa propre expérience avec “les parents”, qui le rend mal à l’aise, souligne-t-elle. Elle lui conseille cependant de se pencher sur ce problème, s’il tient à conserver sa relation avec vous.
Là encore, rien ne vaut une thérapie. «Cela vous permet de partager le fond du problème avec votre conjoint, tout en cherchant ensemble la solution», dit-elle.
Mais la Dre Olulade ajoute: «Si vous évitez l’engagement tout en restant dans le couple, cela pourrait annoncer un comportement autodestructeur. Discutez de ceci avec un thérapeute afin de discerner la cause de votre ambivalence.»
Le bon moment pour chercher de l’aide
Un état dépressif permanent et un fonctionnement au ralenti dans vos activités quotidiennes peuvent nuire à vos relations. Il serait donc recommandé d’envisager une thérapie, dit la Dre Olulade.
«Parmi les signes de dépression, on note la tristesse, le désespoir, la perte d’intérêt pour les loisirs, pour les amis et la famille, ainsi que des signes significatifs comme les troubles du sommeil, de l’appétit ou d’anxiété. Si vous présentez ces symptômes pendant plus de deux semaines, il pourrait s’agir d’une dépression qui exige de l’aide», ajoute-t-elle. Reena B. Patel conseille de faire cette démarche si vos actions affectent votre quotidien, ou si elles gênent la confiance, la communication, le respect et l’intimité dans vos relations.
Faites attention à ces signes que vous devez consulter un psychologue.
Les bienfaits de la thérapie
«Dès que vous cernez une habitude ou un modèle qui ne vous correspond plus, ou qui ne s’inscrit pas dans une relation saine et bénéfique, il est temps de faire une introspection pour régler le problème à la source, conseille Rachel Eva Dew. Cela pourrait exiger le soutien d’un thérapeute, ou peut-être d’un coach de vie. N’hésitez pas à y recourir. Les livres de développement personnel manquent souvent d’outils ou de recul pour saisir le fond du problème.»
Et si vous combattez un comportement autodestructeur, n’oubliez pas qu’une thérapie peut également être profitable aux gens qui vous entourent. «Si vous êtes malheureux dans la vie comme en amour, et sentez que vos amitiés battent de l’aile, trouvez de l’aide», conseille Bethany Cook.
«Ceci ne s’applique pas qu’aux partenaires amoureux», précise-t-elle. Vous pourriez aussi vouloir devenir un meilleur ami! Elle ajoute qu’une thérapie ne veut pas dire que vous êtes brisé. «Au contraire, cela prend du courage et une grande force de caractère pour confronter ses peurs enfouies et ses blessures, en sachant qu’il existe un monde plus équilibré et plus heureux à découvrir.»