L’irrigation du côlon comporte-t-elle des risques?
Vous avez l’intention de subir une irrigation du côlon? Lisez ce qui suit pour connaître ce que pensent les spécialistes de la sécurité du procédé.
Les Canadiens ont de plus en plus recours à l’irrigation du côlon en dépit de son coût qui peut atteindre 100 $ par traitement. Ils y cherchent un soulagement à la constipation chronique ainsi qu’à d’autres problèmes digestifs, comme les gaz et les ballonnements, mais aussi une sensation générale de propreté, croyant que ce procédé devrait assurer la santé de leur côlon. D’ailleurs, une longue liste de stars, dont Madonna et Jennifer Aniston, n’ont eu que des éloges pour cette thérapie.
Pourtant, aucun témoignage médical ne vient étayer un quelconque avantage de l’irrigation du côlon (également appelée hydrothérapie du côlon) pour la santé. «La très grande majorité des professionnels de la santé n’appuie pas, pour quelque raison que ce soit, l’hydrothérapie du côlon», déclare le docteur David Armstrong, gastroentérologue et professeur agrégé à la faculté de médecine de l’Université McMaster. Selon lui, le procédé peut être extrêmement pénible. On risque d’y perdre des électrolytes et par suite de souffrir de convulsions et d’évanouissement; les personnes ayant des antécédents de maladie cardiaque ou de maladie des reins et celles qui prennent des médicaments contre l’hypertension courent même le risque d’en mourir.
La plupart des cliniques d’irrigation du côlon examinent les risques que présentent à cet égard leurs nouveaux clients, en y ajoutant les hémorroïdes et les fissures anales, et leur demandent de signer une décharge de responsabilité légale. Pourtant, plusieurs patients acceptent malgré tout de se soumettre au traitement.
Pourquoi choisit-on l’irrigation du côlon
Lisa Keith, spécialisée en hydrothérapie du côlon, a ouvert à Vancouver il y trois ans une clinique appelée Inside-Out Wellness. «L’irrigation du côlon est beaucoup plus connue depuis quelques années, dit-elle. J’entends des gens déclarer qu’ils se soumettent maintenant à une cure de purification et non plus à un régime alimentaire comme auparavant. Or, l’irrigation du côlon fait partie d’une telle cure.» Au moins la moitié de sa clientèle s’est déjà soumise à ce traitement, alors que la plupart des gens qui consultent cherchent un remède contre la constipation. Bien que Lisa Keith reconnaisse que l’irrigation du côlon ne fait pas perdre de poids de façon permanente, elle note que plusieurs de ses clientes espèrent se libérer des gaz et des ballonnements et se sentir plus «légères». «C’est un rapport complet corps-esprit», croit-elle.
Depuis son ouverture à Toronto en juin 2010, Colon Hydro Care a attiré 300 clients ‘60% de femmes et 40% d’hommes, selon Marleta Roe, copropriétaire et diplômée en hydrothérapie du côlon. «Constipation, fatigue et syndrôme du côlon irritable sont les trois principales raisons pour lesquelles les gens viennent nous voir.»
Les inquiétudes que nourrissent certains professionnels de la santé à l’égard de cet engouement tiennent surtout à un facteur: bien que les hydrothérapeutes puissent se procurer formation et qualification, l’industrie s’autoréglemente ‘ n’importe qui peut afficher sa plaque et pratiquer. Santé Canada approuve l’équipement utilisé ; néanmoins, personne ne s’assure que les thérapeutes suivent fidèlement les recommandations des manufacturiers en ce qui concerne, par exemple, le nettoyage et la stérilisation des équipements réutilisables. «Les risques d’infection [à partir d’irrigations du côlon] sont rares si on se soumet aux opérations adéquates de nettoyage et de stérilisation, mais il n’en reste pas moins que cette intervention peut causer des problèmes», note le Dr David Armstrong.
Comment fonctionne l’irrigation du côlon
Le côlon est la portion la plus importante de l’intestin (à plat, il mesure environ 1,5 mètre ou cinq pieds de longueur) et c’est le dernier endroit par lequel passe le bol alimentaire avant d’être évacué par le rectum. Le côlon a pour fonction d’extraire l’eau, le sel et le potassium des matières fécales avant leur expulsion. (L’intestin grêle, logé au centre de l’abdomen, a pour fonction d’assimiler les nutriments des aliments.)
D’après le docteur Gabor Kandel, gastroentérologue et professeur agrégé de médecine à l’Université de Toronto, l’irrigation ne touche que la partie inférieure du côlon. «Bien qu’il n’existe pas de documentation scientifique irréfutable prouvant que la rétention des selles provoque des problèmes graves ou menace le pronostic vital d’un patient, elle peut lui rendre la vie fort désagréable», explique-t-il. Il ne donne pas pour autant son adhésion aux irrigations du côlon, mais reconnaît néanmoins que plusieurs personnes souffrant de constipation chronique y trouvent un soulagement (dans la mesure où elles corrigent leur régime alimentaire). Il leur recommande d’en parler à leur médecin avant d’en subir une.
On demande aux candidats de ne pas manger d’aliments solides immédiatement avant l’examen: c’est la seule contrainte. L’irrigation s’effectue en système fermé ou ouvert. Dans les deux cas, une canule reliée à des tubes est insérée sur une profondeur d’environ 2,5 cm (un pouce) dans le rectum; de l’eau filtrée remplit le côlon; le péristaltisme normal de l’organe (ou ondes de contraction poussant les matières hors du rectum) agit et la personne évacue les selles et l’eau. La séance dure de 40 à 60 minutes. Selon l’état de la personne, il faut parfois plusieurs séances à quelques jours d’intervalle.
Système fermé: Dans les anciens modèles, moins dispendieux, la personne repose sur le flanc. Le thérapeute insère dans le rectum une canule (d’environ 2,5 cm ou 1 pouce de largeur) reliée à deux tubes. Il contrôle la quantité d’eau, (au plus deux à trois pouces carré), qui, par un des tubes, entre dans le côlon, parfois en massant l’abdomen. Quand l’évacuation s’amorce, le liquide sort par l’autre tube, qui se vide dans un vase d’égoût, à moins que le patient ait à se précipiter à la toilette.
Système ouvert: Dans les modèles plus récents, le patient est assis sur un appareil pourvu d’une toilette. Il introduit la canule (de la taille d’un crayon) dans son rectum et règle la quantité d’eau qui entre dans le côlon (la pression est limitée à un pouce carré par la machine). Il expulse ensuite l’eau en réglant son évacuation sur le péristaltisme du côlon; l’eau et les matières fécales passent dans la canule.
Marlena Roe souligne que l’éducation alimentaire est un facteur important de l’expérience. «Nos clients doivent comprendre que l’alimentation joue un rôle majeur dans leurs problèmes digestifs. Si vous vous soumettez à une opération de nettoyage, vous ne pouvez pas introduire de nouveau beaucoup de bonbons, de sodas, de viandes et de biscuits dans votre système.»
En conclusion’
Le soulagement de la constipation l’emporte-t-il sur les risques que présente l’irrigation du côlon: perte d’électrolytes et infection, si la clinique emploie des instruments réutilisables (des perforations étaient autrefois à craindre, mais les canules sont beaucoup plus petites maintenant)? Sur cette question, les médecins n’arrivent pas à un consensus.
Étudiez avec votre médecin les différentes options qui vous sont offertes. Si vous projetez de subir une irrigation du côlon, assurez-vous que la clinique utilise un équipement jetable, afin d’éviter les risques d’infection. Assurez-vous aussi que le thérapeute a bel et bien reçu son agrégation.