La pandémie m’a rendue plus spontanée. Avant, ma vie sociale était du type A: je me mettais à table à 18h – 18h30 si j’étais d’humeur coquine – en général dans un restaurant que j’avais choisi quatre semaines plus tôt après recherche et réservation avec trois autres mamans. Les bouleversements de la dernière année ont complètement changé ma conception de «Vierge» de la détente. La pandémie a bouleversé nos habitudes: voici ce que nous ne tiendrons plus jamais pour acquis.
À présent que tant d’activités sont exclues, dès que j’ai la chance de faire quelque chose, je saisis l’occasion. Des falafels à deux mètres de distance dans un parc? Splendide. Une promenade avec une connaissance qui vit dans le coin? Mon nouveau meilleur ami pour la vie! Un apéro sur l’herbe avec le voisin? Pourquoi n’y ai-je jamais pensé avant?
Ce «bien sûr, pourquoi pas?» est l’une des bonnes surprises de ce moment. Il m’a valu de nouveaux amis, m’a fait découvrir les coins inconnus de mon quartier, m’a rendue experte à tout laisser tomber à la première occasion.
Je sais à présent qu’on peut être plus heureux quand on a appris à aimer l’inédit et les expériences nouvelles – même si elles se limitent à de minuscules changements dans notre quotidien. Voici quelques façons simples de cultiver la spontanéité.
Ciblez vos efforts
Une personne plus introvertie ou anxieuse n’a pas besoin de changer complètement d’attitude pour faire son miel de la spontanéité, rassure Steve Joordens, professeur de psychologie à l’université de Toronto. Si vous n’êtes ni introverti ni extraverti, il se peut que vous soyez alors ambiverti. Le secret, poursuit-il, consiste à déterminer les aspects de votre vie qui profiteraient d’un peu plus d’improvisation et à y chercher les changements nécessaires.
«Commencez par vous demander ce qui vous manque, dit-il. Quel est votre ambition?» Une fois que vous savez ce que vous voulez – plus d’amis? un nouveau passe-temps? –, repérez les habitudes qui y font obstacle. Votre programme du week-end est peut-être trop chargé ou trop rigide ? Vous trouvez sans cesse de mauvaises excuses pour ne pas suivre ce cours de pâtisserie en ligne?
Il vous restera à remplacer les habitudes qui étouffent la spontanéité par d’autres qui vous aideront à atteindre votre but. Si ça n’a pas l’air spontané, c’est parce que ça ne l’est pas – au début en tout cas. «C’est comme l’exercice, affirme Steve Joordens. On doit parfois faire un effort en commençant, mais ça finit par devenir une habitude.»
Faites de la place
Les vides que la fermeture des restaurants, bars et cinémas ont laissé dans mes journées ont certainement stimulé mon brave nouveau moi «pourquoi pas?». J’étais libre d’accepter les invitations de dernière minute à une promenade à vélo ou les appels imprévus, et j’ai vite appris à apprécier les joies de ces distractions inattendues.
D’après Edward Slingerland, professeur de philosophie à l’université de la Colombie-Britannique, au Canada, la première chose à faire pour cultiver les expériences spontanées, c’est de leur faire une place. Auteur du livre Trying Not to Try sur la Chine ancienne, la science moderne et le pouvoir de la spontanéité, il s’est intéressé à la question en étudiant des philosophes chinois qui cultivaient le Wuwei, ou état de non-intervention, et qui accordaient à la spontanéité une grande importance.
«Nous surchargeons nos vies et planifions beaucoup trop, affirme-t-il. Il n’y a pas de jeu dans la vie de la plupart des gens pour improviser.»
M. Slingerland admet que faire de la place est nettement plus difficile quand on doit conjuguer travail, famille et bénévolat, mais estime qu’il suffit de prendre la résolution de ne pas surcharger son horaire pour changer la donne. Au début, beaucoup de maniaques des listes (c’est mon cas!) se demanderont comment on peut mettre cela en pratique.
«La spontanéité est un étrange mélange d’effort et d’absence d’effort», répond le perofesseur. Il suggère de se fixer un objectif vague – faire une promenade sans destination précise ou simplement mettre au programme «sortir de la maison» – pour créer un cadre qui puisse accueillir des événements intéressants. Il suffit de se faire à l’idée qu’on n’«accomplira» pas toujours quelque chose.
Autre façon de donner à la spontanéité une chance de survie: cesser de naviguer. Internet est un « trou noir à tout âge, déplore Edward Slingerland. La dépendance au numérique est une véritable entrave à la spontanéité.» Le réflexe que nous avons d’activer nos appareils dès que nous avons un moment libre (c’est encore mon cas!) non seulement dévore le temps pendant lequel nous pourrions être plus attentifs à ce qui nous entoure, mais nous prive des illuminations qui surviennent parfois quand on laisse vagabonder son esprit.
Vous n’engagerez pas d’intéressante conversation avec la personne qui attend dans la file avec vous si vos visages sont vissés sur l’écran d’un téléphone. Vous ne remarquerez pas l’adorable boulangerie qui vient d’ouvrir si vous lisez vos courriels en passant devant. Alors, éteignez votre téléphone et admirez les surprises du monde autour de vous.
Vous serez surpris d’apprendre ce que le vernis à ongles dévoile sur votre personnalité!
Acceptez d’échouer
Apprendre à ne pas craindre l’échec est une étape intimidante, mais essentielle sur la voie menant à une plus grande spontanéité.
«C’est ce risque-là qui est le plus dur pour les personnes dépourvues de spontanéité», juge Steve Joordens. Même si on ne parle pas ici de «Risque Majeur» avec des majuscules, n’importe quel petit changement à la routine peut déstabiliser. Votre partenaire n’aimera peut-être pas l’idée d’une nouvelle chambre à coucher; vous aurez peut-être l’air un peu fou si vous essayez la danse à claquettes (d’accord, pas peut-être, sûrement); le film que vous avez choisi de regarder sans en savoir quoi que ce soit sera peut-être un navet.
Le secret, insiste M. Joordens, c’est d’imiter les entrepreneurs et d’apprendre à traiter l’échec comme une leçon. «Ils acceptent l’échec et l’idée d’en tirer des leçons. Le bon côté de la spontanéité, c’est que vous avez alors plus de chances de faire des découvertes et de vraiment aimer ce que vous découvrez.»
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