Jennifer Abel: l’espoir canadien en plongeon
À peine sortie de l’adolescence, Jennifer Abel est l’espoir canadien au plongeon.
Deux secondes. C’est le temps qu’il faut entre le moment où les orteils de Jennifer Abel quittent le tremplin et celui où le bout de ses doigts touche l’eau. Deux secondes pour s’élancer, s’élever, tourner, se redresser et rentrer dans l’eau. Cela fait beaucoup de choses auxquelles il faut penser. Aussi, elle n’y pense pas du tout. «Moins je réfléchis, mieux c’est», dit la jeune plongeuse de 20 ans, originaire de Laval, au Québec. «Si je commence à réfléchir, le plongeon se passera sans moi.»
Il en va autrement à l’entraînement. Six jours par semaine, l’esprit d’Abel est constamment en action pendant qu’elle se soumet à une éreintante routine à la piscine olympique de Montréal, à l’ombre de tous les espoirs de médaille qui l’y ont devancée. Elle passe et repasse de l’exercice au sol à la piscine puis à la salle de musculation, toujours accompagnée de conseillers qui surveillent et évaluent constamment sa technique, son équilibre et sa forme. Récemment, ses entraîneurs Arturo Miranda et César Henderson l’ont aidée à perfectionner ce qu’on appelle le saut d’appel – l’impulsion sur une seule jambe qui précède le saut. Abel a l’habitude de lever un bras plus haut que l’autre, ce qui peut déséquilibrer son plongeon, la projetant en l’air sur un axe incliné. C’est un défaut qui peut faire la différence entre une médaille et rentrer bredouille.
Abel a commencé à plonger à cinq ans, après avoir vu son frère Andy, alors âgé de neuf ans, sauter d’un plongeoir. Onze ans plus tard, elle se tenait sur le tremplin de trois mètres au centre national de natation de Pékin, membre de l’équipe canadienne aux Olympiques 2008. Elle n’avait que 16 ans et n’était pas du tout prête pour le podium (elle arriva treizième, exclue à un cheveu des finales) mais trouva l’expérience constructive.
«Il était très important pour moi de voir les autres athlètes, pas seulement au plongeon mais dans les autres disciplines aussi, et de me rendre compte à quel point ils s’étaient entraînés pour atteindre leurs objectifs. Je savais que, pour devenir meilleure, j’en avais pour quatre ans à travailler dur.»
À Londres, Abel participera au plongeon individuel aux trois mètres, mais c’est la seconde discipline, c’est le plongeon synchronisé aux trois mètres que tout le monde regardera. Avec sa partenaire Émilie Heymans, trois fois médaillée olympique, elles sont classées au deuxième rang mondial. Depuis 2011 qu’elles font équipe, les deux femmes ont engrangé les médailles – l’argent aux séries mondiales FINA de plongeon 2011 et aux Jeux panaméricains 2011, l’or aux Jeux du Commonwealth en 2010 – et établi entre elles une relation sororale.
«Nous sommes très proches l’une de l’autre, même si Émilie est de dix ans mon aînée, dit Abel. Parfois nous nous regardons et éclatons de rire parce que nous savons ce qui va et ce qui ne va pas.» Cela peut être le rythme de l’approche, la vitesse de la rotation ou quelque choses de plus simple encore – comme lorsque une coéquipière leur avait piqué leur pièce d’équipement préférée.
«Il y a huit tremplins, mais il y en a deux qui nous sont plus familiers. Et si quelqu’un d’autre s’en empare, nous ne serons pas contentes», menace-t-elle comiquement.
Leur lien est sans prix dans une discipline qui exige une synchronicité symétrique absolue. Pour s’assurer de l’aspect technique de leur collaboration, Abel et Heymans comptent sur un appareil vidéo placé à côté de la piscine qui filme au ralenti. Cela permet au duo de voir leur plongeon trente secondes après qu’il a été exécuté.
Toutes ces heures passées à revoir les bandes – analyse, amélioration, retouches – visent à perfectionner le plongeon. Abel est confiante que cette fois elle sera sur le podium, mais elle conserve un sens de la réalité avec une maturité qui traduit son expérience plus que son âge – après tout, ce ne sont pas ses premiers Jeux. «Si je remporte une médaille, je serai vraiment heureuse. Si ce n’est pas le cas, mais que j’ai de bons résultats, je le serai également.»
Quick Fact: Competitive diving grew out of gymnastics in the 18th century, when athletes would practice their tumbling moves-somersaults, twists-into water. « Fancy diving, » as it became known, premiered at the 1904 St. Louis Olympics.
Quand la regarder performer: Dimanche le 29 juillet à 10h00.
Q & R: Jennifer Abel
Prévenir le flétrissement des doigts dans la piscine: on n’y arrive pas! Quand il fait froid dehors c’est encore pis, on ne sait pas pourquoi.
Si ce n’était pas le plongeon, ce serait: la nage synchronisée.
Plaisir coupable: gâteau au fromage.
(Photo: Jean-François Bérubé)