Prise de conscience collective et écoresponsable
Dissimulé parmi tous les gros titres alarmants sur l’environnement de l’année 2019 — et il faut bien admettre qu’il y en a eu en quantité – on distingue un signe encourageant: le monde prend conscience de la réalité des changements climatiques.
Alors, que faire maintenant?
Si bien des solutions à la crise climatique exigent l’intervention des gouvernements, les ménages ont un rôle à jouer, car 42% des émissions de gaz à effet de serre au Canada émanent de nos foyers. Aux États-Unis, où les exportations d’énergies sont comparativement moins importantes, on approche des 80%.
En nous appuyant sur nos compétences scientifiques dans trois domaines différents (l’environnement, l’énergie, et la psychologie), nous lançons un appel à la mobilisation et à la responsabilisation qui nous paraît indispensable afin de faire face au défi que représente les changements climatiques.
En ce début de décennie, voici cinq questions qui pourront alimenter votre réflexion sur les gestes que vous pouvez poser pour le climat au sein même de votre foyer.
Que mangez-vous?
La production de denrées alimentaires compte pour 23% des émissions de gaz à effet de serre. Les experts nous indiquent que nous n’aurons pas le choix que de modifier nos habitudes alimentaires pour faire face aux changements climatiques. Descendre au plus bas dans la chaîne alimentaire — ou éliminer carrément viandes et produits laitiers — est l’une des méthodes les plus efficaces que nous pouvons adopter pour réduire les émissions de CO2 à la maison.
S’il existe bien des raisons irréfutables de consommer localement, ce que l’on mange est plus important que d’où ça vient. Selon une enquête américaine déterminante, le transport ne représente que 11% du total des émissions de gaz à effet de serre de ce que l’on mange, contre 83% qui relève de la production de ce que l’on consomme. L’étude fait une analyse du cycle de vie des aliments, qui tient compte de tout ce qui entoure la production, le transport, la consommation et le rejet des aliments. Donc si vous ne pouvez envisager d’éliminer complètement la viande, essayez au moins d’en acheter qui est produite de façon moins toxique, comme la viande de pâturage.
Il faut discuter en famille des changements que l’on peut apporter à notre alimentation afin de contribuer aux solutions qui permettront de combattre les changements climatiques. Les enfants absorbent mieux l’information lorsque les parents établissent des rapports de cause à effet : si ensemble, nous décidons de manger moins de viande, nous pouvons réduire nos émissions de CO2 qui contribuent aux changements climatiques.
Comment vous déplacez-vous?
À l’échelle mondiale, les transports contribuent pour 23% aux émissions de CO₂ rejeté par les êtres humains. Ce chiffre est encore plus élevé au Canada (28%) et aux États-Unis (29%), là où camions et VUS gourmands en essence dominent le marché.
Commencez à vous déplacer en vélo, à faire du covoiturage, et à utiliser les transports en commun dans la mesure du possible. Vivez sans voiture, si vous le pouvez. Si vous devez vous servir d’une auto, visez l’économie d’essence en choisissant les véhicules les plus économiques et en faisant attention aux distances parcourues.
Le transport aérien contribue de manière massive aux émissions de carbone. Un aller-retour transatlantique — Denver Paris, par exemple — produit l’équivalent de 2,54 tonnes de dioxyde de carbone par voyageur. Il s’agit là d’une quantité équivalente à la moitié des émissions produites par une automobile sur une période d’un an.
Lorsque vous planifierez vos prochaines vacances en famille, envisagez d’éviter l’avion. Partez en vacances près de chez vous ou bien choisissez un vol court.
De quelle façon votre maison contribue-t-elle au réchauffement climatique?
Une maison consomme de l’énergie pour le chauffage, la climatisation, l’éclairage et les appareils électroménagers. La consommation énergétique, ce n’est pas la même chose que les émissions de carbone — car tout dépend de la façon dont est produite l’énergie utilisée pour l’électricité et le chauffage – mais c’est quand même une cible importante.
Le chauffage, qu’il s’agisse de la maison ou de l’eau chaude, représente 80% de l’énergie consommée par les ménages au Canada. Tout geste qui économise cette énergie contribue à abaisser les émissions.
Ce peuvent être de simples petits gestes, comme de faire la lessive à l’eau froide, ou à l’autre extrême, déménager dans un logement plus petit et moins énergivore. Il vaut aussi la peine d’envisager des rénovations écoénergétiques, surtout si l’on peut bénéficier de programmes incitatifs au niveau local. Une évaluation énergétique de votre domicile vous aidera à atteindre les meilleures cibles.
Que jetez-vous?
Les Nord-Américains sont ceux qui produisent le plus de déchets par habitant. On peut faire énormément de choses afin de réduire notre gestion des déchets.
Tout le monde connaît ce mantra: réduire, réutiliser, recycler. Mais l’industrie du recyclage est complexe, et bien des choses que nous mettons dans notre bac de recyclage finissent dans les sites d’enfouissement.
Il faut donc mettre l’accent sur les parties réduction et réutilisation du mantra si l’on veut avoir un effet durable en faveur de l’environnement. Pour réduire nos déchets, planifions et n’achetons que ce dont nous avons vraiment besoin. Non seulement nous réaliserons ainsi des économies, mais nous réduirons les émissions dues à l’emballage, au transport, et à la fabrication.
Les familles doivent également encourager la réutilisation. Il faut prendre des mesures pour reconvertir ou échanger les biens, à la fois chez nous et au cœur de nos communautés. Il y a plein de bonnes idées sur le sujet!
On vous propose 50 bonnes raisons de dire non au plastique!
Sur qui pouvons-nous exercer une influence?
Les parents savent bien que trouver du temps pour changer les choses est une tâche difficile. Mais les changements peuvent s’opérer à petits pas, par exemple en se renseignant sur les preuves, les causes et les effets du changement climatique. De par leur nature, les enfants sont curieux et veulent apprendre. Assurez-vous qu’ils cherchent des réponses à partir de sources crédibles.
Les enfants sont constamment en train d’observer les choix opérés par les adultes. Ils seront nombreux à constater les efforts des adultes pour réduire leurs déchets et émissions de CO2. Afin de renforcer ces changements, expliquez-leur ce que vous faites et l’impact de vos choix sur l’environnement.
Vous pouvez également leur montrer le rôle joué par la mobilisation afin de favoriser le changement. Le monde entier vient d’assister à une mobilisation planétaire initiée par une adolescente de 16 ans, qui inspire des millions de gens.
Le changement est la somme de gestes individuels
Certains soutiennent que les gestes individuels ne font aucune différence, ou que les changements d’habitudes à la maison sont sans importance si tout le monde n’embarque pas. C’est une position extrêmement décourageante qui semble ignorer le fait que la crise climatique contemporaine résulte de milliards de décisions individuelles. Les changements de comportements individuels aboutissent à des évolutions collectives et sont essentiels à l’aboutissement des mouvements sociaux.
Argument plus solide: il serait préférable de s’attaquer au système (économique et politique) qui fait obstacle aux changements de comportements individuels. Nous sommes bien d’accord! Mais ces deux propositions ne sont pas mutuellement exclusives, et la transformation doit s’opérer sur les deux fronts.
Il y a des raisons d’espérer. Les changements faits au sein de notre foyer peuvent façonner le paysage environnemental que nous léguerons aux générations futures. Nous disposons déjà de la technologie et des connaissances nécessaires à une transition vers une société plus viable.
Il nous faut commencer quelque part. Et cela peut être à la maison.
Greg McDermid, Professeur, Département de géographie; Joule A Bergerson, Professeure agrégée en génie chimique et pétrolier et Chaire de recherche du Canada en évaluation des technologies énergétiques et Sheri Madigan, Professeure adjointe, Chaire de recherche du Canada sur les déterminants du développement de l’enfant, Centre Owerko à l’Institut de recherche hospitalière pour enfants de l’Alberta, Université de Calgary
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.