Pourquoi s’excuser est difficile?
Pourquoi ces mots si simples sont-ils si difficiles à dire? Le réflexe défensif, estime Karina Schumann, chercheuse en psychologie de l’Université Stanford, qui s’est intéressée à l’acte de présenter des excuses. Selon elle, le désir de se voir sous un jour positif est souvent à l’origine du refus de reconnaître ses torts. « Commettre un affront, c’est compromettre notre identité de personne honnête et respectable », explique-t-elle. Pour présenter des excuses sincères, ce qui implique de reconnaître sa faute et de prendre acte du tort qu’on a causé, on doit reconnaître avoir mal agi.
Des recherches ont en outre démontré que refuser de s’excuser peut même renforcer la perception de soi. Une étude menée en 2013 par l’University of Queensland Business School, en Australie, a révélé que les personnes fautives qui évitaient délibérément de demander pardon se sentaient plus fortes et valorisées parce qu’elles avaient le sentiment de savoir camper sur leurs positions.
Même lorsqu’on envisage de présenter des excuses, on en surestime souvent la nature désagréable. En 2014, une étude publiée dans la revue Social Justice Research a démontré que les participants s’attendaient souvent à ce que demander pardon soit plus humiliant et stressant que cela ne l’était en réalité.
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S’excuser est profitable à long terme
Même si c’est désagréable, assumer ses torts est profitable à long terme. « Nous préservons beaucoup de choses lorsque nous présentons des excuses », affirme Tyler Okimoto, chercheur principal de l’étude australienne. « Refuser de s’excuser risque de miner la confiance de l’autre et de compromettre la relation », déclare-t-il ajoutant que les avantages que l’on croit gagner en ne s’excusant pas ne fait pas le poids face à ce qu’on perd. Retrouvez aussi 4 comportements qui peuvent briser la confiance de l’autre.
Des excuses sincères peuvent même contribuer à sauver une relation tendue. Selon une étude de l’Université Emory à Atlanta, en Géorgie. Les réponses à des entrevues et questionnaires de 337 sujets blessés par leur conjoint révèlent en effet que les actes de conciliation réduisaient la colère des participants et les amenaient à pardonner plus rapidement.
Sur le plan personnel, ajoute Karina Schumann, demander pardon réduit le sentiment de culpabilité, ce qui contribue avec le temps à une meilleure image de soi. Apprenez-en plus sur les effets néfastes de la culpabilité sur la santé. Une étude de 2007 dont les résultats ont été publiés dans le Journal of Social & Clinical Psychology enseigne qu’on est plus susceptible de regretter de ne pas s’être excusé que d’avoir fait amende honorable.
Pour vous excuser, montrez votre empathie
Selon le psychologue new-yorkais Guy Winch, qui a abondamment étudié les relations interpersonnelles et le sentiment de culpabilité, la perspective de présenter ses excuses inspire beaucoup d’anxiété, si bien que peu de gens savent comment s’y prendre de manière efficace.
Pour réussir, la démarche exige plusieurs étapes : déclarer qu’on est « désolé », exprimer ses regrets et demander pardon. La plupart des gens essaient de couvrir ces trois points, dit Guy Winch, mais plusieurs oublient de témoigner de l’empathie, qui permet de reconnaître les sentiments qu’a fait naître l’offense chez la victime. « En démontrant de l’empathie, dit-il, nous exprimons notre préoccupation de l’autre plutôt que de nous-mêmes. »
Dans cet esprit, il ne suffit pas de dire : « Désolé de ne pas être venu à ta fête. » Le message suivant serait plus efficace : « Je suis désolé de ne pas être venu hier, sans même avoir téléphoné. Tu n’as pas dû apprécier mon silence. J’espère que cela n’a pas gâché ta soirée et que tu me pardonneras. »
Selon Guy Winch, l’erreur la plus courante est de tenter de se trouver des excuses. Lorsque vous abordez la manière dont vous avez blessé l’autre, évitez de justifier votre comportement. Si vous avez parlé sèchement à votre conjoint à la fin d’une journée frustrante, il est normal d’expliquer ce qui a provoqué votre impatience, mais gardez vos lamentations pour une autre conversation.
Cependant, attention à ne pas vous montrer trop empathique. Voici 10 signes que vous devez cesser de placer les besoins des autres avant les vôtres.
L’affirmation de soi stratégique pour des excuses plus agréables
Les dernières recherches de Karina Schumann ont révélé une astuce simple pour ceux qui ont du mal à s’excuser. Puisque le besoin de préserver une image bonne de soi est souvent ce qui rend l’acte de contrition difficile, la chercheuse pense qu’en prenant le temps d’affirmer les valeurs personnelles auxquelles nous accordons de l’importance avant de nous excuser peut contribuer à rendre l’expérience moins pénible et, finalement, à permettre une réparation plus sincère.
On peut ainsi penser à des objectifs personnels, des valeurs ou des personnes importantes de notre vie. L’exercice, explique Karina Schumann, rétablit le sentiment d’estime de soi en aidant à prendre du recul et à réduire la menace de cette mauvaise action sur son image de soi. « Lorsque le besoin de se défendre n’est plus aussi puissant, dit la chercheuse, on peut consacrer son énergie à présenter des excuses sincères. »
Sachez différencier les excuses nécessaires et celles superflues. Consultez ces 28 cas où vous devrez vraiment cessez de vous excuser.