Toux persistante et kyste bizarre dans le dos… Qu’est-ce que j’ai docteur?
Richard Danzer avait déjà échappé à la mort. Un jour, on lui découvre ce qui ressemble à un kyste, du moins en apparence.
Le patient: Richard Danzer, retraité
Les symptômes: Excroissance suspecte dans le dos, toux sèche persistante
Les médecins: Dre Brittany Smirnov, dermatologue
Richard Danzer a trompé la mort une première fois en 1962. Soldat au Vietnam, le jeune Américain avait reçu l’ordre de renflouer un bateau échoué sur la plage de l’île de Phú Quôc. Ses 10 camarades et lui y étaient arrivés, mais avaient dû braver des vagues de près de quatre mètres de haut dans un petit canot pneumatique pour échapper aux forces nord-vietnamiennes.
L’homme ne pensait pas s’en tirer mais, contre toute attente, le groupe avait rallié le bateau. «Chaque jour depuis, je remercie Dieu, dit-il. Et chaque jour que je vois le soleil est une belle journée.» Cette attitude l’a aidé à affronter les eaux agitées de la vieillesse. Aujourd’hui, ce retraité de 79 ans vit à Delray Beach, en Floride, après 50 années de carrière comme vendeur et cadre dans l’industrie de la peinture. Sa femme souffre de la maladie de Parkinson et de démence; lui-même a eu sa large part de problèmes de santé. En 2017, on lui a diagnostiqué un cancer de la vessie.
Pendant le traitement, ses médecins lui ont découvert un carcinome épidermoïde dans le nez et l’ont excisé – cette forme courante mais agressive du cancer de la peau à l’aspect d’une croûte peut se propager à d’autres parties du corps si elle n’est pas soignée. Quand on l’a déclaré en rémission, il a commencé à prendre des rendez-vous réguliers pour s’assurer de le rester.
À l’été 2018, Richard remarque qu’il a une petite grosseur au milieu du dos. Elle ne fait pas mal, mais en l’espace de quelques semaines, elle gonfle tellement qu’elle le gêne pour dormir sur le dos. Son médecin de famille pense qu’il s’agit probablement d’un kyste, sans doute causé par une accumulation de graisse sous la peau ou par l’inflammation d’un follicule pileux. Il faut certes garder la chose à l’œil, sans pour autant paniquer.
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Le soi-disant kyste continue à grossir pendant six mois. En décembre, il fait huit centimètres de diamètre. Mais ce n’est pas tout. Une assez grande croûte rougeâtre se développe sur l’une des jambes de Richard. On dirait la cicatrice d’une éraflure, mais sans blessure sous-jacente. Il demande à sa fille Cheryl, qui a emménagé chez lui quelques années plus tôt, d’examiner sa jambe et son dos. «Nous avons tous les deux conclu qu’il fallait revoir le médecin», raconte-t-il.
Le généraliste l’adresse à une dermatologue, la Dre Brittany Smirnov, qui lui recommande un spécialiste capable d’effectuer une chirurgie de Mohs, technique exigeante qui permet d’exciser des cellules cancéreuses de la peau. Richard la prie aussi de jeter un coup d’œil à la grosseur dans son dos.
La Dre Smirnov comprend tout de suite qu’il ne s’agit pas d’un kyste. Il n’y a pas de punctum, le petit trou caractérisant un kyste dû à une folliculite. Et l’excroissance est ferme sous le doigt comme une gomme, alors que les kystes sont en général mous. Elle n’a pas mauvaise odeur, ce qui serait un autre indice d’un kyste causé par une accumulation de lubrifiant pileux. De plus, elle a grossi plus vite que ne l’auraient fait la plupart des kystes.
Après avoir écarté ce diagnostic, la Dre Smirnov pense à un lipome, une accumulation commune et bénigne de graisse. Des doigts, elle exerce un peu de pression autour de la masse – un lipome bouge facilement sous la peau –, qui reste bien en place et qui semble attachée à l’arrière de la cage thoracique de Richard.
Toujours perplexe, la dermatologue interroge son patient sur son état de santé. A-t-il perdu du poids? Non. A-t-il des problèmes nouveaux? Nouveaux, non, mais une toux sèche chronique que Richard attribue au fait d’avoir fumé un paquet de cigarettes par jour pendant 40 ans. La lumière se fait alors dans l’esprit de la Dre Smirnov. Les anomalies cutanées sont parfois un symptôme du cancer du poumon, et c’est là un diagnostic plausible chez un grand fumeur. «La cage thoracique est l’un des endroits où les tumeurs pulmonaires adorent métastaser.»
La Dre Smirnov fait faire une tomodensitométrie hélicoïdale des poumons de Richard. Les résultats confirment ses soupçons: son patient souffre d’un cancer au stade quatre, et les cellules cancéreuses se sont répandues sur tout son dos. Selon toute probabilité, conclut l’équipe médicale, il lui reste 18 mois à vivre. «Ça a été un choc, admet Richard. Mais je ne l’ai pas réalisé tout de suite.» Quand il commence à digérer la nouvelle, il met ça «entre les mains de Dieu».
Il y a une mince chance de faire un nouveau pied de nez à la mort avec le traitement approprié. Il subit une chimiothérapie et cinq radiochirurgies par CyberKnife, un bras-robot qui brûle la tumeur avec des faisceaux de rayons très précis. La masse dans son dos commence presque aussitôt à rapetisser. «Si cette tumeur-là se résorbe, celle des poumons diminue aussi, explique la Dre Smirnov. C’était un bon indicateur de l’efficacité du traitement.»
Deux mois après, il ne subsiste de la tumeur qu’une lésion cutanée, qu’une solution topique guérit en quelques jours. Durant la chimiothérapie, qui dure plusieurs mois, Richard ressent souvent des maux d’estomac et de l’épuisement. Sa fille le fait manger, le réconforte et veille sur lui. «Je ne sais pas ce que je serais devenu sans elle», confie-t-il.
Environ un an après sa première visite au cabinet de la Dre Smirnov, Richard Danzer est déclaré en rémission encore une fois. Durant l’été de 2020 – saison qu’il n’était pas censé vivre –, il savoure sa retraite en compagnie de sa fille, soulagé d’être encore en vie et plein de reconnaissance pour la dermatologue qui lui a sauvé la vie. «J’ai dépassé ma date de péremption d’un an et demi, plaisante-t-il. J’estimais déjà être en sursis après le Vietnam. Ce qui m’est arrivé est simplement un autre miracle.»
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