VPH: ce virus qui cause le cancer touche plus d’hommes que de femmes
Le virus du papillome humain (VPH) est la plus fréquente des infections transmissibles sexuellement (ITS) au Canada et dans le monde. Sans vaccination, il est estimé que 3 Canadiens sur 4 auront une infection au VPH à un moment donné dans leur vie (certains sans même s’en rendre comptent).
Les hommes peuvent contracter le VPH
Il y a une grande méconnaissance du virus du papillome humain (VPH). Un mythe courant consiste à croire, à tort, qu’il s’agit d’une maladie typiquement féminine.
Cette croyance populaire s’explique par le fait que le programme québécois de vaccination contre les infections par les VPH ne vaccinait que les filles de 2008 à 2016.
Depuis, la sensibilisation au VPH chez les hommes reste faible: une étude de 2021 menée au Québec portant sur des individus âgés de 30 à 45 ans a montré que 87% des femmes interrogées savaient ce qu’est le VPH, contre seulement 54% des hommes.
Trop longtemps, le VPH a été associé aux femmes, car il est la principale cause de 99% des cancers du col utérin. Or, des études plus récentes montrent qu’il peut aussi développer de multiples autres formes de cancer, tant chez la femme que chez l’homme.
Ce qui est le plus surprenant, c’est que les conséquences chez les hommes sont nettement plus intrusives que chez la femme, note Yann Gaudreault, docteur en Pharmacie à Alma et administrateur à l’Ordre des pharmaciens du Québec. Un cancer du pénis ou un cancer de l’anus aura des conséquences notables sur la qualité et le mode de vie d’une personne pour le restant de ses jours.
«On ne peut prendre l’infection au VPH à la légère, car on peut attraper tous les types de cancers associés au VPH», insiste Eva McGhee, professeure adjointe à la faculté de médecine et de sciences Charles R. Drew. «Il est important de trouver d’autres types de stratégies préventives ou de traitements chez les hommes plus âgés», ajoute-t-elle.
Des symptômes… ou pas
Si les femmes passent des tests Pap régulièrement lors de visites chez le gynécologue, il n’existe pas l’équivalent pour les hommes chez l’andrologue, rappelle Yann Gaudreault. «Trop souvent, les hommes seront vaccinés contre le VPH lorsqu’ils auront des symptômes visibles, comme des condylomes sur le pénis, qui les motiveront à consulter un médecin».
L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) a publié en janvier 2022 un avis recommandant que l’on cesse de faire passer en première intention le test cytologique Pap aux femmes pour lui préférer le test VPH qui peut se faire en clinique, mais aussi à la maison avec un écouvillon. Si l’INESSS recommande l’administration du test VPH aux femmes âgées de 25 à 65 ans, aucune mention n’est faite sur le dépistage des hommes.
Les condylomes sont des verrues qui se manifestent sous forme de petites bosses sur la peau ou les muqueuses des organes génitaux (pénis, scrotum, vulve, vagin, anus) ou de la gorge. Ils apparaissent parfois des années après l’infection. Sans traitement, ils disparaissent généralement en quelques années, mais ils peuvent réapparaître. Certains traitements à appliquer sur les condylomes peuvent les faire disparaître, mais ces traitements n’éliminent pas toujours le virus. Celui-ci peut donc persister après la disparition des condylomes.
Toutefois, la maladie n’est pas toujours visible. C’est notamment la raison pour laquelle 75% des Canadiens sexuellement actifs ont déjà eu ou auront une infection au VPH à un moment ou à un autre dans leur vie.
La famille des VPH compte une centaine de types de virus, dont plus de 40 sont transmissibles sexuellement. Une personne peut être infectée par plus d’un type de VPH au cours de sa vie et peut aussi être infectée plus d’une fois par le même type de VPH.
Dans la majorité des cas, le système immunitaire élimine ces infections au bout de plusieurs mois. Chez la plupart des femmes, la présence du virus est impossible à détecter après 2 ans, mais chez une minorité d’entre elles, l’infection peut persister et entraîner des lésions au col de l’utérus qui causeront notamment des saignements vaginaux au moment des relations sexuelles. D’ailleurs, les saignements après un rapport sexuel sont-ils normaux?
Risques de cancers
Chez la femme, les lésions au col de l’utérus peuvent se transformer en cancer du col de l’utérus. Des lésions peuvent également apparaître dans le vagin ou sur la vulve et entraîner des cancers à ces endroits.
Chez l’homme, ces infections entraîneront plutôt des lésions sur le pénis qui peuvent se transformer en cancer.
Chez la femme comme chez l’homme, des lésions peuvent provoquer des cancers de l’anus, du rectum ou de l’oropharynx, qui touche particulièrement les millénariaux. Les VPH augmentent aussi le risque d’infection par le VIH.
Un virus hautement contagieux
Une personne qui a une infection au VPH peut transmettre le virus même si elle n’a pas de symptômes. La transmission peut se produire lors de relations orales, vaginales ou anales, lors de contacts entre organes génitaux ou lors de partage de jouets sexuels. La transmission sexuelle peut donc avoir lieu même sans pénétration, orgasme ou éjaculation.
Les personnes qui partagent des jouets sexuels peuvent diminuer le risque de transmission en les recouvrant avec un condom (et le changer entre chaque partenaire!).
Une mère infectée peut aussi transmettre l’infection à son bébé au moment de l’accouchement.
Personnes à risque
Une étude publiée en 2017 dans la revue scientifique Annals of Internal Medicine a constaté une disparité frappante dans la prévalence du VPH chez les hommes et les femmes aux États-Unis.
Le taux d’infections orales au VPH y est notablement plus élevé chez les hommes (11,5% ou 11 millions d’individus) que chez les femmes (3,2% ou 3,2 millions d’individus). «On suspecte que le VPH s’élimine moins vite chez les hommes, ce qui pourrait expliquer l’augmentation de la prévalence… Il est aussi possible que les hommes attrapent la forme orale du VPH plus facilement que les femmes. Il faut poursuivre les recherches pour mieux comprendre», explique Ashish Deshmukh, un des auteurs de l’étude.
Au Canada, il y a 4,5 fois plus de cancer oropharyngé chez les hommes que chez les femmes, ajoute Yann Gaudreault. Il semble aussi que le VPH se transmette plus facilement des femmes aux hommes que l’inverse, ajoute le pharmacien.
Les hommes québécois âgés de 20 à 45 ans sont les plus à risque de contracter le VPH puisqu’ils n’ont pas été vacciner via le programme gratuit de vaccination contre les VPH réalisé en milieu scolaire par le réseau des CISSS et CIUSSS.
Si les personnes plus âgées – suspectées d’être moins actives sexuellement – sont considérées moins à risque de contracter le VPH, Yann Gaudreault tient toutefois à prévenir les couples en instance de séparation. «Lorsque l’on a de nouveaux partenaires sexuels, il est important d’avoir une discussion sur le sujet. Heureusement, on remarque que les jeunes en parlent plus ouvertement qu’avant», se réjouit-il.
Vaccin et prévention
Le meilleur moyen de se protéger contre les infections par les VPH et leurs complications est la vaccination. Au Québec, deux vaccins contre les VPH – Gardasil 9 et Cervarix – sont offerts gratuitement dans le cadre du Programme québécois d’immunisation. Les personnes qui ne sont pas admissibles au Programme peuvent aussi se faire vacciner, mais devront toutefois payer leurs doses.
Si Cervarix contient deux souches du virus et protège contre les types de VPH 16 et 18 – les principaux responsables des cancers associés à l’infection –, Gardasil 9, pour sa part, contient neuf souches de VPH et protège aussi contre la majorité des condylomes. C’est notamment la raison pour laquelle il est privilégié par les professionnels de la santé. Reste que pour les personnes de moins de 18 ans, une dose de Gardasil 9 suivie d’une dose de Cervarix amènent une réponse immunitaire suffisante. En effet, depuis septembre 2020, Cervarix est principalement utilisé comme booster en secondaire 3 (la première dose de Gardasil 9 étant habituellement administrée en 4e année du primaire).
Pour les personnes de 18 ans ou plus, deux doses de Gardasil 9 administrées à au moins 6 mois d’intervalle sont aussi efficaces qu’un calendrier vaccinal à 3 doses.
Ces vaccins protègent contre les infections à VPH, les lésions précancéreuses et les condylomes pendant environ 14 ans. (Des études se poursuivent pour évaluer la protection de ces vaccins à long terme, mais il est estimé qu’elle devrait durer plusieurs décennies.) Rien n’indique qu’une dose de rappel soit nécessaire à ce stade-ci.
Chez les hommes qui ne sont pas infectés par un ou des VPH au moment de se faire vacciner, le taux d’efficacité du vaccin est de 90% pour prévenir les condylomes et de près de 80% pour prévenir les lésions précancéreuses aux organes génitaux, à l’anus ou de l’oropharynx. Le taux d’efficacité du vaccin est toutefois moins élevé chez les personnes déjà infectées au moment de la vaccination.
Des études récentes montrent que le vaccin pourrait néanmoins prévenir la réapparition de lésions à l’anus chez les hommes de 26 ans et moins déjà infectés par un des VPH ciblés par le vaccin au moment de la vaccination. (Il n’existe pas de données pour les hommes âgés de plus de 26 ans.)
Une étude du King’s College de Londres, le vaccin contre le VPH réduit de 87% le risque de cancer du col de l’utérus chez les femmes vaccinées vers 12 ou 13 ans.
En terminant, depuis que l’OMS a recommandé des programmes nationaux de vaccination en 2009, le vaccin contre le VPH est largement administré dans plus de 100 pays.
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