Rencontre à l’aveugle
Moi et mon amie voulions trouver le numéro de téléphone d’un garçon qu’elle trouvait à son goût. Or, nous ne
Moi et mon amie voulions trouver le numéro de téléphone d’un garçon qu’elle trouvait à son goût. Or, nous ne connaissions que son nom de famille – Lefebvre – et nous n’étions pas certaines du prénom: Pierre? Luc? Nous avons donc décidé de nous séparer les 500 Lefebvre du bottin téléphonique de notre ville et de demander Pierre ou Luc.
Après plusieurs dizaines d’essais infructueux, je tombe sur une belle voix mâle, envoûtante. Non, il n’y a pas de Pierre ou de Luc ici, me répond-il. Mais je ne résiste pas à l’envie de lui demander son nom, son âge… Il s’appelle Daniel, et, hasard incroyable, n’a que 2 ans de plus que moi et va à mon école!
J’avais alors un complexe: à cause de mon visage, on me donnait 5 ans de moins. Je ne voulais donc pas qu’il me voie et me trouve trop jeune. Alors je ne lui dis rien de moi, même pas mon nom, seulement que je vais à la même école que lui.
Je le rappelle chaque soir à la même heure, en lui disant: «Bonjour, c’est moi!». Nous avons de longues conversations, et j’invite même mes amies à venir écouter sa belle voix.
À l’école, mes amies et moi cherchons quelqu’un qui corresponde à la description qu’il m’a faite de lui au téléphone: brun, taille moyenne, cheveux mi-longs, yeux clairs… La moitié des 3000 élèves de l’école correspondent à ce signalement! Seul indice vraiment précieux: il est en secondaire 5.
Un jour, nous croisons des garçons de cet âge et j’aperçois enfin l’élu de mon cœur: il porte un gilet de hockey avec D. Lefebvre inscrit dessus. C’est lui! Nous le suivons partout, je sais qui sont ses amis, où est son casier, ses cours…
Quelques jours plus tard, je me trahis et lui dis que je joue dans l’équipe de badminton de l’école. Le lendemain matin, une dizaine de jours après le premier appel, je lui dis comment je serai habillée et me présente à son casier. Je lui dis: « Bonjour, c’est moi ». Il échappe ses feuilles, devient tout rouge, et se met à bégayer. Je suis sous le charme.
Nous sommes sortis ce soir-là à la danse de l’école. C’était comme dans un film… On a joué une valse. Nous nous sommes enlacés sans parler, et nous ne nous sommes pas quittés de la soirée.
Vingt ans, une maison, et trois enfants plus tard, nous avons fêté notre 15e anniversaire de mariage. Et aujourd’hui, à 34 ans, je suis bien contente de paraître plus jeune que mon âge!
Nathalie Mongeon, L’Ange-Gardien