Pour les enfants d’Haïti
Pédiatre de l’Hôpital Sainte-Justine, le Dr Dickens St-Vil retourne régulièrement en Haïti travailler dans des hôpitaux de fortune.
La sueur perle sur le front du Dr Dickens St-Vil alors qu’il incise l’abdomen du bébé de neuf mois. La chaleur est suffocante, la salle d’opération inconfortable et rudimentaire. Le médecin a diagnostiqué une occlusion intestinale chez l’enfant et décidé de l’opérer sans tarder. Ses parents ont marché huit heures sous un soleil de plomb pour le conduire à l’Hôpital Bon Samaritain de Limbé, en Haïti, dans l’espoir que le «médecin venu du Québec» lui sauve la vie. Ils ont bien fait: il n’aurait pas survécu plus de quelques jours. Mais il faut faire vite. D’autres patients attendent, venus eux aussi de très loin. La plupart n’ont jamais vu un médecin de leur vie. En guise de remerciement, ils donneront des bananes et des noix de coco.
Depuis 1992, le Dr St-Vil, 45 ans, a mené six missions médicales en Haïti et opéré gratuitement plus de 300 personnes dans des petits villages du sud du pays. L’an dernier, il a déboursé 5000$ pour transporter sur place son équipe médicale.
En 1991, jeune médecin tout frais sorti de l’Université McGill, Dickens St-Vil part en mission dans le pays qu’il a quitté à l’âge de 12 ans: Haïti. Durant son séjour, il opère avec succès un petit garçon d’une occlusion de l’œsophage, mais l’enfant meurt 36 heures plus tard faute d’équipement capable de le maintenir en vie. Cet incident bouleverse le chirurgien qui va tout faire désormais pour sauver le plus grand nombre possible d’enfants haïtiens.
En février 2004, pendant les soulèvements en Haïti, le Dr St-Vil s’est rendu à Tiverny avec deux autres médecins et trois infirmières de l’Hôpital Sainte-Justine, où il exerce désormais. Pendant 4 jours, 12 heures par jour, il a opéré 35 personnes dans un bloc opératoire de fortune installé dans le bureau d’un directeur d’école. «On devait chasser les lézards et autres bestioles avant de procéder aux interventions, se souvient
Lucie Ferland, infirmière en chirurgie qui accompagnait le Dr St-Vil. Des ouvriers avaient fabriqué une table d’opération en bois. Des rideaux, faitsde vieux tissus, séparaient les chambres des patients, et les femmes du village lavaient les draps souillés à la main dans des seaux.
Le Dr St-Vil rêve d’acheter, avec la Croix-Rouge, un autobus converti en salle d’opération et de sillonner la campagne haïtienne pour soigner les plus pauvres. Pour y parvenir, il espère amasser un demi-million de dollars. «C’est beaucoup, dit-il, mais la vie n’a pas de prix.»
« Aux yeux des Haïtiens, c’est un sauveur», dit de lui Normand Lemay, du groupe évangélique La Bible Parle, qui l’a accompagné à Tiverny.