Mon conseiller s’en va…

Devez-vous le suivre s’il change d’institution financière?

Mon conseiller s'en va...

A 80 ans, Jean-Pierre C., de Sherbrooke, aurait aimé se la couler douce. Mais sa conseillère financière a quitté Patrimoine Dundee pour rejoindre Investia Services financiers, et le retraité a décidé de la suivre, ce qui n’a pas été sans lui causer quelques tracas. «Depuis son arrivée chez Investia, elle a vendu beaucoup d’actions pour les remplacer par des fonds de croissance dynamique, constate-t-il. Plus de 60000$ ont été transférés au total.»

Tous les professionnels du milieu le savent: la mobilité est assez élevée chez les conseillers, ce qui préoccupe les investisseurs, souvent pris entre deux chaises. Doit-on suivre la personne à qui on a confié son portefeuille depuis des années… ou rester fidèle à une institution financière dont on est pleinement satisfait? Voici quelques repères pour vous guider:

1. Assurez-vous de comprendre les motivations de votre conseiller.

Bien des raisons peuvent le pousser à changer d’établissement: meilleure rémunération, conflit avec l’employeur, meilleurs services, etc. «Quel que soit le motif, il doit vous le donner, insiste Martin Lecavalier, planificateur financier indépendant chez Planifax. Il ne peut pas chambouler votre vie sans se justifier.»

Et s’il le fait, ne vous contentez pas de son explication. «Il arrive que des conseillers soient tout simplement licenciés, note François Morency, planificateur financier indépendant chez Aviso. Même s’il vous jure que la décision de partir vient de lui, vérifiez auprès de l’Autorité des marchés financiers (www.lautorite.qc.ca) si une plainte a été déposée.»

Comme le dit le sage, la méfiance mène à la prudence, et la prudence est le début de la vertu…

2. Prenez le temps d’évaluer les conséquences de ce changement.

Quelle est la réputation de la nouvelle firme? Quels sont les services offerts? Détenez-vous des produits maison qu’il vous sera impossible de conserver ailleurs?

Un transfert pourrait entraîner des frais de fermeture et d’ouverture de compte d’une centaine de dollars. De plus, si vous devez vendre des actions, vous paierez une commission d’environ 2 pour 100. Et en achetant des fonds, vous pourriez devoir débourser des droits d’entrée pouvant aller jusqu’à 5 pour 100. Au total, c’est 7 pour 100 de votre capital qui s’envolerait. «Votre conseiller devrait veiller à ce que vous ne soyez pas pénalisé, dit François Morency. Pourquoi, en effet, paieriez-vous pour qu’il obtienne de meilleures conditions dans une autre firme?»

Souvent, la nouvelle institution offrira de rembourser tous les frais associés au transfert. Cela fait partie du marchandage. Vous devez négocier une compensation en échange du transfert de vos actifs. «En cas de refus, recommande François Morency, limitez vos transferts à la portion de vos actifs qui n’entraîne aucuns frais ni aucune transaction.»

3. Etudiez bien la stratégie qu’on vous propose.

Le même conseiller qui vous avait vendu avec tant d’enthousiasme un plan d’investissement vous explique maintenant avec la même conviction pourquoi votre portefeuille serait mieux ailleurs.

Prenez le temps d’évaluer la nouvelle stratégie. Respecte-t-elle le profil d’investisseur et les objectifs? Que valent ces placements?

«Demandez des explications, dit Martin Lecavalier. Si elles sont nébuleuses ou ambiguës, faites votre propre enquête.» Consultez d’autres experts ou des amis qui s’y connaissent. Vous pouvez aussi évaluer vous-même ces produits à partir d’informations publiées sur Internet (voir selection.ca/investir).

Dans tous les cas, la première chose à faire avant de prendre une décision, c’est d’estimer ce que votre conseiller a fait pour vous durant toutes ces années.

«Demandez-lui, par exemple, la performance de votre portefeuille sur 5 ou 10 ans, suggère François Morency. Et comparez ce rendement avec ce qu’il vous avait promis. Le paradoxe, dans cette industrie, c’est que la performance à long terme, c’est à la fois ce qu’on vend le plus aux clients… et ce qu’on leur cache le plus.»