2011: À qui faites-vous encore confiance?
Après une année de scandales tous azimuts, votre verdict est sans appel: les journalistes-justiciers sont vos héros, et les hommes au pouvoir, des zéros!
Il se passait rarement une semaine l’an dernier sans qu’une nouvelle bombe n’éclate: corruption, collusion, fraude, magouilles… un scandale n’attendait pas l’autre! Et quand les affaires s’accumulent, à quel saint se vouer? Votre réponse est claire: aux journalistes. Dans notre sondage sur la confiance, vous avez tiré sur tout le monde, sauf sur les messagers.
Céline Galipeau arrive en tête de votre palmarès, talonnée par ses collègues de TVA, Pierre Bruneau et Sophie Thibault. De quoi réconforter les représentants d’une profession qui côtoie habituellement les agents immobiliers et les avocats dans les sondages sur la confiance.
«J’en tombe de ma chaise, s’étonne Céline Galipeau. C’est un grand bonheur, mais en même temps c’est déconcertant. Cette confiance du public fait peser de lourdes responsabilités sur nos épaules.» A la vue de la longue liste de politiciens relégués en queue de peloton, la chef d’antenne ne peut retenir un commentaire: «Vous savez, c’est peut-être un peu de notre faute; c’est nous qui rapportons ce qu’ils font tous les jours à la télévision.» Se sent-elle coupable? «Non! Il ne faut pas oublier que nous venons de traverser une année riche en évènements. Les gens ont l’impression que les journalistes font le travail de cette fameuse commission d’enquête sur l’industrie de la construction.»
Le dénominateur commun des trois présentateurs de nouvelles en tête du sondage: leur souci d’objectivité. Une qualité très prisée lorsque les scandales et les allégations de fraude s’accumulent. «Une personnalité politique finit toujours par commettre un geste qui nous déplaît, ce qui nous force à réévaluer notre lien de confiance, souligne Isabelle Valois, doctorante en sociologie à l’Université de Montréal. Mais un chef d’antenne ne prendra presque jamais position.»
La politique dans les bas-fonds
Les Québécois ont été durs, très durs envers les politiciens, presque tous exilés aux dernières places du sondage. La critique est particulièrement vive envers les chefs au pouvoir. Vingt et unième sur 25, Gérald Tremblay, le maire de Montréal, est le meilleur des derniers. Suivent Stephen Harper (23e) et Jean Charest (25e). «C’est quand même désolant, note Isabelle Valois. Après tout, ce sont des personnages que nous avons choisis. Mais il faut dire que ces deux dernières années, la confiance envers les politiciens a été mise à mal. Harper est très critiqué dans les médias québécois, Tremblay a été éclaboussé par les scandales, et Charest, lui, inutile d’en parler!»
Les partis d’opposition ne font guère mieux. Pauline Marois (19e) et Michael Ignatieff (22e) se glissent de peine et misère devant leurs adversaires politiques. «C’est une mauvaise nouvelle pour eux, car ils devraient incarner l’espoir, le changement», note Bernard Motulsky, titulaire de la Chaire de relations publiques et communication marketing de l’UQAM. Avec son mauvais score, la classe politique dans son ensemble flirte davantage avec le statu quo qu’avec le renouveau.
Comme toujours, il y a des exceptions à la règle. Eternel mouton noir, Régis Labeaume se comporte dans notre sondage comme en politique: à contre-courant. Avec sa 7e place, il est le politicien le plus apprécié des Québécois. «Il est plus honnête que toute la gang de bouffons qui nous dirigent», affirme sans détour le camionneur Serge Martel, 52 ans, qui a «voté» pour le maire de Québec, bien qu’il habite Trois-Rivières.
«Régis Labeaume possède une caractéristique formidable: la franchise, observe Cristiane Bourbonnais, fondatrice du cabinet-conseil en stratégie de marques Cohésion. Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, on sait qu’il dit le fond de sa pensée. C’est pour ça que les gens lui font confiance.»
Trois autres politiciens échappent à l’opprobre populaire. Le chef du NPD, Jack Layton, figure en bonne position au 9e rang, suivi de près par le député de Québec solidaire, Amir Khadir (10e) et l’inoxydable Gilles Duceppe (13e). Rien de surprenant, croit Luc Dupont, professeur de communication à l’Université d’Ottawa. «Ils ont la dent très dure, mais ils ne prennent pas de décisions. Les Québécois sont beaucoup plus sévères à l’égard des décideurs que des observateurs.»
Justiciers sans masque
Comme chaque année, l’astrophysicien écologiste Hubert Reeves (4e) et le pédiatre social Gilles Julien (5e) figurent au top 10 de votre palmarès. «Gilles Julien est quelqu’un de remarquable, dit dans notre sondage Nancy Bergeron, 43 ans, aide-soignante à Montréal. Il en faudrait plus des gens comme lui.» Difficile en effet de ne pas faire confiance à ces deux personnalités publiques «qui défendent des valeurs extrêmement nobles, rappelle Bernard Motulsky. Ce sont des redresseurs de torts, tout comme Sheila Fraser (6e), la vérificatrice générale du Canada.»
Certains pourraient s’étonner de trouver les frères Molson en 8e position. Pas Cristiane Bourbonnais. «Ils ont racheté nos Canadiens. Ce sont des héros des temps modernes!»
Votre palmarès :
- Céline Galipeau
- Pierre Bruneau
- Sophie Thibault
- Hubert Reeves
- Gilles Julien
- Sheila Fraser
- Régis Labeaume
- Les frères Molson
- Jack Layton
- Amir Khadir
- Steven Guilbeault
- Marcel Aubut
- Gilles Duceppe
- Pierre Karl Péladeau
- Gaétan Barrette
- Line Beauchamp
- Paul Desmarais
- Yves Bolduc
- Pauline Marois
- Maxime et Julien Rémillard
- Gérald Tremblay
- Michael Ignatieff
- Stephen Harper
- Michael Sabia
- Jean Charest
Méthodologie. Le sondage a été mené par Harris/Decima, auprès de 293 Québécois durant l’automne 2010. Une nouvelle méthodologie a été employée cette année, ce qui nous empêche de comparer les résultats avec ceux de l’an dernier.