La face cachée des produits cosmétiques
En moyenne, une Nord-Américaine applique chaque jour sur sa peau une douzaine de produits cosmétiques, s’exposant à plus de 100 agents chimiques. Or on soupçonne certains de ces composés, dont les parabènes et les phtalates, de perturber le système hormonal et d’avoir une incidence sur des maladies telles que le cancer du sein.
Par ailleurs, l’usage de plus en plus répandu des nanoparticules inquiète de nombreux scientifiques, qui estiment qu’elles devraient faire l’objet d’études plus poussées avant d’être utilisées à grande échelle. our éviter de nous maquiller aux métaux lourds ou de nous nettoyer aux dérivés de pétrole, la solution semble toute trouvée: le bio! Mais est-ce aussi sûr? Voici 10 vérités pour faire des choix éclairés.
1. Les soins bio font-ils forcément du bien?
«Non, pas forcément! répond sans hésiter la spécialiste des cosmétiques Laurence Wittner*. Certains ne sont pas simplement inefficaces, ils peuvent aussi être inadaptés: si on remplace des conservateurs de synthèse par de l’alcool, même bio, on risque de provoquer des effets indésirables: rougeurs, sécheresse cutanée…»
*Laurence Wittner est coauteure du Guide des meilleurs cosmétiques 2011-2012, publié aux Editions Médicis. Elle a aussi créé le site www.observatoiredescosmetiques.com.
2. Les cosmétiques bio: testés sur les animaux?
Cela dépend! Certains produits cosmétiques, dont seuls quelques ingrédients ont été certifiés biologiques, peuvent avoir été testés sur des animaux. Interdite en Europe, cette pratique ne l’est pas au Canada. Pour vous assurer qu’aucune bête n’ait souffert, choisissez plutôt les produits certifiés intégralement par Ecocert, Cosmos, ICEA, BDIH, etc.
3. Le bio, est-il 100 % naturel ?
En fait, non… À part certains produits simples comme les huiles bio, vous ne trouverez pas de produit 100 pour 100 bio, parce que l’eau comme les ingrédients d’origine minérale ne peuvent être certifiés biologiques. Or un shampoing contient jusqu’à 80 pour 100 d’eau! Le label principal Ecocert suit la réglementation officielle européenne qui impose qu’au minimum 10 pour 100 des ingrédients soient issus de l’agriculture biologique (et que 95 pour 100 des ingrédients soient d’origine naturelle). Mais il autorise aussi, à hauteur de 5 pour 100 du produit, quelques substances de synthèse, essentiellement des conservateurs.
4. Est-ce que l’industrie biologique est moins contrôlée ?
Pas si sûr. Bien entendu, seuls les gros laboratoires peuvent s’offrir de longs tests cliniques in vivo sur des volontaires rémunérés. Cependant, les petits laboratoires sont soumis aux mêmes exigences réglementaires. Tous doivent fournir une liste d’ingrédients à Santé Canada 10 jours après la mise sur les tablettes du produit.
«Mais, en plus, nous recevons deux visites par an d’Ecocert, dit Alain Renaud, président fondateur des cosmétiques québécois Druide. Ils vérifient nos livres, nos entrepôts, notre procédé de fabrication, si notre étiquette est conforme au produit, etc. C’est un processus vraiment rigoureux.»
5. Les produits bio sont-ils plus chers et difficiles à trouver?
Non. Ils sont souvent bien moins chers que les cosmétiques de luxe, et pas nécessairement plus chers que les autres. On les trouve bien sûr dans les boutiques spécialisées, mais aussi sur des sites internet de vente par correspondance et dans les rayons de la grande distribution où certaines enseignes ont développé leurs propres gammes.
6. Les produits de luxe sont-ils plus efficaces ?
«Non, explique Laurence Wittner, le luxe ne garantit ni l’efficacité ni la qualité. En revanche, acheter du rêve, c’est important en cosmétique. Un produit qui sent bon, dont on trouve la texture sublime et qui de plus est beau sur le lavabo peut vraiment faire du bien!»
7. Le bio, se conserve-t-il moins longtemps?
Oui, mais bio ne veut pas dire sans conservateur. Si votre crème n’en contenait pas, elle deviendrait rapidement une culture de bactéries. Autrefois, les produits bio avaient une durée de vie moyenne de trois mois après ouverture. Aujourd’hui, ils vont couramment jusqu’à six mois. Et grâce à des emballages qui évitent le contact avec l’air, ils ont une date de péremption souvent supérieure à 36 mois tant qu’ils restent hermétiquement fermés.
8. Pour mon bébé, le bio s’impose?
Oui, mais… pour votre bébé la règle est simple: le moins est le mieux. Limitez les produits cosmétiques sur les jeunes enfants. Les produits pour bébé contiennent parfois des substances suspectées de perturber le système hormonal.
9. Y a-t-il des écrans solaires bio?
Avec le soleil, pas de négociation: on se protège! Mais le choix est limité: les filtres synthétiques sont efficaces, mais potentiellement allergisants et dangereux pour le développement hormonal des jeunes enfants, des femmes enceintes… ou des poissons qui s’en abreuvent tout l’été. Quant aux filtres physiques, notamment les écrans minéraux bio, ils laissaient un film blanc ou recouraient aux nanoparticules pour éviter cet effet! Heureusement, depuis janvier 2008, ces nanoparticules sont proscrites dans les produits bio certifiés en entier et dont les logos Ecocert ou Cosmos figurent sur l’étiquette.
Cela dit, on ne trouve pas encore facilement d’écran total (indice 50+) bio, esthétique et efficace… Le mieux est de prendre une crème solaire bio avec un indice plus faible – et, comme toujours, ne pas oublier d’en renouveler l’application. Bien sûr, l’ombre et les chapeaux sont aussi des solutions…
10. Si c’est bio, est-ce hypoallergénique?
Non. La professeure de dermatologie Brigitte Dréno est formelle: «Les extraits de plantes contiennent des antigènes souvent allergisants seuls ou avec les UV (photoallergie). Il faut donc être très prudent, en particulier sur les peaux prédisposées aux allergies.»
Les huiles essentielles sont particulièrement allergisantes. La mention «hypoallergénique» sur un produit ne correspond à aucune exigence réglementaire, et cet élément est laissé à la libre appréciation du fabricant. Cependant, les produits certifiés par Ecocert doivent avoir démontré en quoi ils sont hypoallergéniques.