Les enjeux de la livraison à domicile
Carolyn Kim, planificatrice en transport urbain, explique comment être un consommateur plus responsable dans le cadre d’une livraison à domicile.
Les livraisons à domicile ont explosé durant la pandémie de COVID-19. À quel point?
D’après les données de Statistique Canada, le cybercommerce a augmenté de 350% au pays entre 2016 et 2020. L’achat en ligne est donc bien antérieur à la pandémie, mais la COVID a accéléré la tendance.
Nous n’avons pas les chiffres exacts pour les deux dernières années, mais vu cette augmentation, le secteur du véhicule utilitaire de livraison constituera vraisemblablement en 2030 la plus importante source d’émissions de gaz à effet de serre dues au transport. Plus de deux millions de ces véhicules circulent actuellement sur nos routes, soit environ 57% de plus qu’en 2005.
Cela peut-il expliquer la forte présence de véhicules de livraison garés sur les bandes cyclables et en double file dans les petites rues?
Sans doute. La pandémie a bien montré que le mouvement des biens était absolument essentiel à notre quotidien. La tendance n’ira pas en diminuant, bien au contraire. Cela dit, il ne s’agit pas de chercher un moyen d’arrêter les livraisons urbaines, mais d’améliorer la planification du réseau routier.
On pourrait par exemple créer des places réservées au stationnement commercial pour éviter d’obstruer les rues et les bandes cyclables. Autre solution: encourager les entreprises à recourir au vélo électrique cargo plutôt qu’au camion pour la livraison. Cette tendance s’observe déjà à Vancouver, Toronto et Montréal.
Avec la pandémie, les bandes cyclables se sont multipliées, et c’est formidable. Utilisons ces infrastructures à des fins commerciales.
Les municipalités doivent-elles réglementer l’usage des fourgonnettes de livraison?
Certaines administrations – notamment Santa Monica en Californie et Londres au Royaume-Uni – ont établi des zones à faible taux d’émissions. Il s’agit de définir un certain périmètre en ville où l’usage des véhicules émetteurs de carbone, y compris les véhicules de livraison, est soumis à des restrictions ou à une tarification.
Il y a aussi ces entreprises indépendantes qui tentent de rivaliser avec Amazon et d’autres gros détaillants en ligne. Que faire pour empêcher qu’elles ne disparaissent ?
Plusieurs petites entreprises locales se sont rapidement converties à la vente en ligne et au ramassage en bordure de rue pendant la pandémie. Go Digital Canada, par exemple, apporte un soutien aux petites entreprises souhaitant rejoindre leurs clients en ligne. Mais pour qu’elles adoptent ces nouvelles technologies, il leur faut un soutien financier public.
À Bâton-Rouge, en Louisiane, Gotcha, la compagnie de partage de vélos électriques et de scooters, accorde des remises aux petites entreprises locales. Un scooter se loue 15$ la journée pour la livraison de marchandises, ce qui réduit du tiers les frais de livraison – de 20 à 30% de la commande.
Les achats sont parfois confiés à un comptoir postal situé dans une pharmacie du quartier. Ce n’est pas aussi pratique que la livraison à domicile, mais faut-il l’encourager?
Oui, c’est une bonne façon d’aider les villes à créer des systèmes de livraison urbaine plus efficaces. Au Canada, nous avons des points de ramassage où les clients viennent chercher leur marchandise. Avec ce modèle d’entreprise, ils font partie de la solution en réduisant la livraison à domicile par camion ou fourgonnette.
Que faire de plus pour être un consommateur plus responsable?
Au moment où il passe sa commande, on propose parfois au client d’opter pour une livraison plus lente, plutôt que de la recevoir dans l’heure ou le même jour. Cela permet à l’entreprise d’optimiser les itinéraires de livraison.
La patience est toujours une vertu…
À n’en pas douter.
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