Bienveillance: l’inconnue qui a changé ma vie
Il y a deux décennies, le geste bienveillant d’une inconnue m’a rappelé la force de l’altruisme. Un simple geste de compassion inoubliable.
C’était l’un de ces moments que tous les nouveaux parents redoutent. Mon fils hurlait comme si je l’avais plongé dans un bain d’acide sulfurique (non, ce n’était pas le cas). J’avais le sentiment qu’il hurlait ainsi depuis des années, alors qu’il n’avait que deux mois. Et cela se passait en public – dans l’aire de restauration d’un chic centre commercial de Los Angeles où je tenais mon bébé hurlant, désespérée, sous le regard sévère de ceux qui me jugeaient en silence en dégustant leur pad thaï. Et voilà qu’une femme, une parfaite inconnue, a fait un geste qui m’a préservée de la folie. Elle s’est approchée, a mis une main sur mon épaule et m’a soufflé: «Ça ne durera pas éternellement. Je sais bien que, vu d’ici, on peut en douter, mais les choses vont s’arranger. Il cessera de pleurer. Vous pourrez dormir.» Et puis, ce bon ange envoyé par les dieux du centre commercial a disparu par l’escalier roulant. Mais son témoignage de bonté, je ne l’ai jamais oublié.
Assurez-vous par contre de ne JAMAIS prononcer l’une de ces phrases quand vous parlez à une nouvelle maman!
Ce n’était pas grand-chose, une minuscule gentillesse, mais elle a tout changé. Cela se passait en 2001, dans une ville étrangère où je vivais avec un nouveau-né, sans famille ni amis, et où je me sentais très seule. Cette femme m’avait remarquée, ne serait-ce qu’un instant, et avait pris le temps de me parler. La minute qu’elle m’a consacrée, ce jour-là, je la chéris depuis près de 20 ans.
Nous voulons tous être meilleurs, plus généreux avec nos semblables, mais l’ampleur du défi nous paralyse facilement: où donc trouver le temps de faire régulièrement du bénévolat ou de ramasser de l’argent pour soutenir une cause? Pourtant, faire le bien ne demande pas d’énormes efforts; on peut y arriver pas à pas. Un sourire, un mot, un coup de téléphone, un courriel. C’est le mot que vous écrivez à un ami qui a du chagrin, la poussette que vous portez au bas de l’escalier du métro pour aider un parent seul, même si vous êtes déjà en retard au travail (surtout si vous êtes en retard).
Apprenez-en plus sur les gestes de compassion et empathie à connaître.
Ça me rappelle une phrase du livre de Brian Goldman, The Power of Kindness: «L’antonyme d’empathie est apathie.» Autrement dit, le contraire de faire le bien n’est pas de faire le mal, mais de ne rien faire. Tout acte de générosité, si petit soit-il – chaque porte qu’on ouvre ou café qu’on offre à un inconnu –, érige un pont et dit à l’autre: «Je te vois.» À une époque où l’on passe le plus clair de son temps à regarder un écran de téléphone et non des visages, c’est inestimable.
N’étant pas particulièrement portée à faire du bénévolat régulièrement ni à courir des marathons pour ramasser de l’argent, je tiens quand même à faire de petits gestes. J’essaie d’écrire tous les jours un hommage à quelqu’un dont j’admire le travail. J’entretiens une amitié téléphonique avec une veuve de 87 ans, solitaire (et assez drôle), qui m’avait contactée à propos d’un de mes articles, et qui vit loin de ses enfants et petits-enfants. En avion, je repère les parents aux yeux vitreux et angoissés et je leur propose de tenir leur bébé. Je me souviens de ce que j’ai éprouvé quand c’est le mien qui hurlait. Et je me rappelle la formidable force d’une petite bonté capable de changer le monde.
Ces récits de bonté, de compassion et de bravoure vont vous redonner foi en l’humanité.
Tiré de ELLE Canada (avril 2019)
© Elizabeth Renzetti.