Manger du poisson pour mieux apprendre
Il y a des millénaires, les hommes se débrouillaient déjà assez bien, mais c’est quand ils se sont installés dans les bassins de grandes rivières que les civilisations ont vraiment commencé à prospérer. Il en a été ainsi en Égypte, en Mésopotamie, dans la vallée de l’Indus. « Les êtres humains deviennent plus intelligents et raffinés quand ils vivent près des cours d’eau », confirme le Dr Cyrus Raji, radiologue résident de l’Université de Californie à Los Angeles.
Rien d’étonnant donc à ce qu’une étude publiée en 2014 dans l’American Journal of Preventive Medicine établisse que consommer du poisson peut accroître la taille du cerveau. En examinant 260 sujets septuagénaires sans déficiences cognitives, le Dr Raji et ses collègues ont en effet découvert que l’hippocampe – le centre de l’apprentissage dans le cerveau – est 14 % plus grand chez ceux qui mangent du poisson cuit ou grillé au moins une fois par semaine que chez ceux qui s’en privent. Les omégas 3 qu’on trouve dans le poisson et les fruits de mer améliorent également les performances des neurones du lobe frontal, qui joue un rôle essentiel dans les fonctions cognitives telles que la mémoire à court terme et la planification de tâches. « Si vos neurones sont plus gros et forts, et s’ils peuvent établir de meilleures connexions avec les autres neurones, ils peuvent accomplir leur travail de manière plus efficace », dit le Dr Raji. Bien entendu, on peut compléter le saumon et le flétan avec des huîtres, du hareng, de la truite et même des sardines. Si le poisson est peut-être le secret d’un cerveau plus costaud, la variété donnera en somme du piquant à la vie.
Jamais trop tard pour apprendre la musique
Vous rêvez de Carnegie Hall, mais vous pensez que vos ambitions musicales sont irréalisables faute d’avoir suivi de leçons de contrebasse dans votre enfance ? Détrompez-vous : les chercheurs de l’Université de Chicago ont démontré que l’oreille absolue – la capacité d’identifier et de reproduire une note après l’avoir entendue – peut très bien s’acquérir à l’âge adulte.
On présume souvent qu’il faut commencer très tôt une formation musicale pour que le cerveau assimile bien notes et gammes. Mais selon le chercheur principal Howard Nusbaum, professeur en psychologie, « nous ne sommes pas forcément limités par ces étroites fenêtres biologiques ». En fait, dans son laboratoire, des adultes disposant d’une meilleure mémoire auditive (une facilité instinctive à retenir les sons) ont pu améliorer de manière significative leur aptitude à reproduire presque parfaitement les notes. Cette découverte remet en question les théories selon lesquelles l’oreille absolue serait innée. « Pour devenir un meilleur musicien, à tout âge, l’essentiel est de jouer de la musique, dit le professeur Nusbaum. Bien sûr, disposer de l’oreille absolue ne peut pas faire de tort. »
Prenez votre dose de caféine pour mieux apprendre
Une petite dose d’espresso vous rend très alerte, mais des recherches récentes montrent que cela peut aussi favoriser votre mémoire à long terme. Dans une étude menée à l’Université Johns Hopkins, on a donné aux participants soit un placebo, soit 200 ml de caféine après qu’ils avaient étudié une série d’images. Le lendemain, on leur a montré une deuxième série d’images et on leur a demandé de reconnaître des détails similaires, mais non identiques, à la série précédente. Les sujets qui avaient consommé de la caféine ont obtenu de bien meilleurs résultats que ceux qui n’avaient reçu que le placebo. Ce que les scientifiques appellent pattern separation met en jeu un niveau plus profond de rétention de la mémoire. Par conséquent, quand vous avez à apprendre quelque chose de nouveau, servez-vous un petit café.
Vaut mieux écrire à la main qu’au clavier
Le progrès technologique nous amène à mettre au rancart les vieilles techniques analogiques, mais quand il s’agit d’assimiler de nouvelles données, prendre des notes à la main est sensiblement plus efficace que tapoter sur un clavier. Selon une étude publiée dans la revue Advances in Haptics et menée par un chercheur de l’Université de Stavanger, en Norvège, et un neurophysiologiste de l’Université d’Aix-Marseille, l’acte physique d’écrire – et non de dactylographier – stimule à la fois les centres sensorimoteurs et langagiers de notre cerveau. Cet élément de mémoire motrice joue un rôle dans la reconnaissance visuelle des mots – ce qui pourrait impliquer qu’écrire une note à la main laisse une impression plus durable dans le cerveau.
Écrire « blancs de poulet » sur une liste d’épicerie en papier prend plus de temps que, par exemple, aller chercher le symbole de poulet sur le téléphone, et ce temps supplémentaire peut également contribuer à la rétention. Votre maîtresse de 3e année avait peut-être raison quand elle vous faisait recopier des lignes de texte.
Devenez meilleur conducteur en jouant à Tetris
En mai 2013, une étude de l’Université McGill a révélé que jouer à Tetris peut accroître la quantité d’information que les adultes d’un certain âge sont capables de prendre en compte sans bouger leurs yeux ou leur tête. C’est ce qu’on appelle le champ visuel utile. Après six séances de 90 minutes réparties sur trois semaines, le champ visuel utile des participants s’est amélioré, et la rapidité de leur attention sélective (la capacité de se concentrer sur un type d’information dans un plus grand ensemble de perceptions) s’est accrue de près de 72 millisecondes. C’est une excellente amélioration, parce qu’un champ visuel utile amélioré s’accompagne d’une meilleure performance dans l’accomplissement de tâches, particulièrement derrière le volant. Les chercheurs ont noté des résultats similaires après que les participants ont joué à Medal of Honor : Rising Sun, mais placer des blocs qui tombent est moins oppressant que tirer sur de vilains soldats ennemis.
De grands bonds pour réapprendre les petits pas
Après un choc traumatique au cerveau, les activités les plus simples, comme manger et marcher, peuvent devenir des entreprises herculéennes. Mais certaines découvertes récentes laissent entrevoir que quelques pas tout simples – littéralement – peuvent contribuer au rétablissement des aires touchées.
Dans une étude de 2011 du Kennedy Krieger Institute et de l’Université Johns Hopkins, on a demandé à des sujets de troquer leur manière de marcher habituelle contre des manières plus compliquées – en s’exerçant sur un tapis roulant comportant deux courroies séparées. Les participants exposés à des courroies qui allaient tantôt à la même vitesse, tantôt à des vitesses différentes ont été capables de réapprendre leurs mouvements plus facilement que ceux dont les courroies allaient constamment à des vitesses différentes.
Donc, si vous devez réapprendre des mouvements de base, la clé pourrait se trouver dans le fait de varier les exercices au hasard. Cette découverte devrait venir au secours de ceux qui effectuent un processus de réhabilitation post-traumatique.
Apprendre l’empathie
Au cours de votre vie, vous avez sûrement déjà fait la rencontre, pas vraiment agréable, d’une personne narcissique, vaniteuse et égoïste, pauvre en empathie. Tout n’est pas perdu pour ce type de personnalité ! En 2014, des chercheurs des universités de Surrey et de Southampton ont mis au point une méthode prometteuse pour les personnes qui manquent d’empathie.
Erica Hepper et ses collègues ont montré à des sujets une vidéo où une femme raconte son expérience de violence physique. Le seul fait de la regarder n’a certes pas suffi à provoquer une réponse appropriée. Mais quand ils ont demandé aux participants de se mettre dans la peau de la femme, même ceux qui avaient été classés comme « très narcissiques » ont exprimé de l’inquiétude et une sympathie véritables. Donc, la prochaine fois qu’autour de vous on fait preuve d’insensibilité à votre égard, ne désespérez pas : il semble que si on les guide un peu, même les plus endurcis peuvent améliorer leur sens de l’empathie.
Cesser de fumer pour apprendre mieux
À la longue liste de ses effets néfastes, le tabagisme peut encore causer des dégâts à cette partie du cerveau qui est primordiale pour l’apprentissage conscient. Dans une importante étude publiée en février 2015 par l’Université d’Édimbourg et l’Institut neurologique de Montréal, à l’Université McGill, les chercheurs ont analysé des examens du cerveau par IRM récents de plus de 500 sujets, qui avaient tous été examinés quand ils étaient enfants, en 1947. Ils ont découvert que les fumeurs avaient un cortex cérébral plus mince.
« Le cortex joue un rôle dans tout ce qui relève des fonctions cognitives supérieures : l’attention, le raisonnement mathématique, le raisonnement logique, notre capacité à travailler avec de nombreux concepts à la fois, dit Sherif Karama, assistant professeur en psychiatrie à l’Université McGill. En prenant de l’âge, les fumeurs se retrouvent avec un niveau d’habiletés cognitives plus bas que les non-fumeurs, même quand on prend en compte leur QI initial. »
Mais tout n’est pas perdu : quand on abandonne la cigarette, le cortex peut commencer à se réparer lui-même. « Pour toutes les 7 000 cigarettes que vous fumez – soit à peu près un paquet par jour pendant un an – vous devez cesser de fumer pendant presque un an pour que cette région récupère, dit M. Karama. Mais si les gens arrêtent assez longtemps, il semble que leur cortex finit par revenir à l’état qu’il devrait avoir à leur âge. »
Éteignez la radio, allumez votre mémoire et apprenez mieux
Les enfants d’aujourd’hui sont capables simultanément de clavarder, de gérer leur compte Facebook, de publier des photos sur Instagram, de manger et de parler avec des amis, mais les adultes plus âgés paient le prix fort quand ils essaient de faire du multitâche dans un environnement bruyant.
Découvrez d’autres astuces santé pour vivre sainement.
Une étude récente du Georgia Institute of Technology a démontré que la musique assourdissante réduit les capacités mémorielles – les participants d’un certain âge ont retenu 10 % moins de noms quand les chercheurs leur montraient des visages. Notre mémoire associative tend naturellement à décliner avec l’âge, mais si on ajoute à cela un fond de musique tapageuse, notre cerveau devient sérieusement confus. La musique classique ou un petit jazz paisible peut contribuer à vous détendre quand vous lisez, mais cela ne vous aidera pas si vous essayez de vous rappeler si le beau-frère de votre sœur s’appelle Jean-Jacques ou Jean-Claude.
Mieux apprendre à lire
Selon la sagesse populaire, la meilleure manière d’améliorer la lecture, pour les personnes qui ont de la difficulté, consiste à épeler phonétiquement ce qu’elles lisent. Mais selon une étude publiée par le Journal of Neuroscience plus tôt cette année, il se pourrait que la clé de l’apprentissage de nouveaux mots soit purement visuelle.
Des chercheurs du Georgetown University Medical Center à Washington D. C. ont travaillé avec 25 personnes à qui ils ont demandé de mémoriser une série de 150 assemblages de lettres sans signification. Au début, les efforts des sujets pour retenir le charabia n’ont donné… que du charabia. Mais en utilisant l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), les scientifiques ont découvert qu’après que les sujets avaient passé un certain temps à essayer d’assimiler l’information, l’aire de leur cerveau qui correspond à la reconnaissance visuelle des formes de mots s’activait. Ils avaient commencé à interpréter les groupes de lettres comme des mots. Dans une communication publiée par l’Université de Georgetown, Maximilian Riesenhuber, l’auteur principal de l’étude, laisse entendre que cette information peut signifier que l‘être humain reconnaît moins les phonèmes que la forme des mots. « L’aire de reconnaissance de la forme visuelle des mots ne tient pas compte de leur sonorité mais seulement de l’apparence de l’ensemble des lettres du mot », dit-il. Ce que l’on peut en retenir, c’est que, pour assimiler un nom, un adjectif ou un verbe nouveau dont on vient d’apprendre le sens, il peut être plus avantageux de prendre des photographies mentales que d’essayer de retenir des syllabes.
La Dre Wendy Suzuki explique pourquoi l’exercice peut renforcer notre cerveau
1. L’hippocampe est essentiel à l’apprentissage de nouveaux concepts ; c’est aussi une des deux seules structures du cerveau où de nouveaux neurones sont créés après la naissance. L’exercice aérobique non seulement stimule la création de nouvelles cellules du cerveau, mais permet aussi à plus de neurones de survivre.
2. L’hippocampe joue aussi un rôle dans l’imagination. Quand vous renforcez cette structure en faisant de l’exercice, vous améliorez une des sources principales de l’acte créatif. Vous commencez à sortir davantage des sentiers battus.
3. Plus d’exercice améliore votre attention. Si vous ne portez pas attention, vous pouvez être incapable d’apprendre à faire quelque chose de nouveau.
4. Il n’est pas nécessaire de devenir triathlonien. La pratique d’exercice modéré deux fois par semaine sur une période de huit semaines s’est révélée suffisante pour stimuler le train de vie et activer le cerveau de certains sujets.
5. Vous pouvez élargir votre définition de ce qui constitue un exercice. Marcher dans la rue, danser au son de votre musique favorite sont des exercices d’aérobie. Si vous avez l’esprit vraiment pratique, faire le ménage en vitesse est un excellent exercice, et ce sera terminé plus vite.
Wendy Suzuki enseigne la neurologie et la psychologie à l’Université de New York. Elle a publié Healthy Brain, Happy Life.
Les cinq astuces mémorielles d’Arthur Chu, champion de Jeopardy !
1. Pratiquez les tâches dans un environnement aussi semblable que possible à la situation réelle. (Si vous pratiquez pour jouer à Jeopardy !, levez-vous, tenez le bouton de la sonnette dans votre main et attendez la fin de la question pour répondre.)
2. La mnémotechnique aide à renforcer la mémoire, mais l’idéal est de s’exercer suffisamment longtemps pour ne pas avoir besoin de mnémotechnique.
3. Si vous avez mémorisé des choses dans un certain ordre, ou dans une certaine structure – par exemple, une liste – changer cet ordre peut améliorer votre mémorisation.
4. Des images mentales fortes peuvent contribuer à fixer les informations dans votre tête. Par exemple, quand j’ai besoin de me souvenir du nom d’une personne que je viens de rencontrer, j’invente dans ma tête une blague salace en utilisant son nom, ainsi je suis certain de m’en souvenir.
5. Les rituels et les habitudes – comme attacher une cravate ou conduire une voiture – s’inscrivent dans nos cerveaux beaucoup mieux que des faits. Si un comportement devient automatique, vous pouvez compter bien davantage sur vos réflexes que si vous faites quelque chose à quoi vous devez penser.
Arthur Chu, un chroniqueur culturel et acteur américain, a participé au jeu Jeopardy ! en 2014 et est devenu célèbre pour sa manière désordonnée de choisir les questions.