L’excitation du début
Le premier projet auquel nous avons renoncé est la peinture. Quand nous avons acheté ce «chalet» sur la rivière Skeena, dans le nord de la Colombie-Britannique, Alisa et moi étions tout excités à l’idée de le peindre en jaune. Beurre frais, pensions-nous, avec des bordures vert cendré, voilà qui aurait été adorable. Puis nous nous sommes dit: est-ce bien nécessaire? Après tout, ce n’était qu’une cahute sans valeur immobilière, plus rustique que bien des cabanes de pêche sur glace.
Tout le monde convenait qu’il valait mieux la démolir, si elle ne s’effondrait pas d’elle-même auparavant. Quand nous nous y rendions, nous apportions d’ailleurs la tente, au cas où nous la trouverions par terre. Elle ressemblait plus à un gros jeu de construction qu’à une maison.
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La nature mécontente
L’été suivant, nous nous sommes tournés vers ce que j’appelais avec grandiloquence le «terrain». La hutte était située à l’orée d’une clairière qui s’était transformée en un fouillis d’herbes hautes, de ronces et de berces laineuses aux airs préhistoriques qui répandaient un parfum similaire à celui d’une poudre antifongique pour les pieds. Avec une équipe de parents et d’amis, nous nous y sommes attaqués avec des faux, des machettes et des haches.
À peine avions-nous libéré la cabane de son corset de verdure qu’un oiseau furieux nous a violemment fait comprendre que nous étions sur le point de détruire son nid. Le labyrinthe de verdure qui menaçait d’avaler notre maison abritait, eh oui, toutes sortes de créatures. L’oiseau en colère revendiquait un droit acquis. Nous ne nous y sommes pas opposés. Vous seriez d’ailleurs étonné de voir de quelles façons la nature stimule votre santé.
Aucun changement
L’un après l’autre, avec les années, nous avons fini par renoncer à tous nos projets. Ainsi nous n’avons pas réparé le toit, dont la tôle ondulée avait été si tordue et soulevée par le temps qu’elle ressemblait maintenant à la surface d’un bol de croustilles. Nous avons dressé des plans élaborés de nouvelles fondations, qui n’existent toujours pas. Nous n’avons pas creusé de puits ni rafraîchi les toilettes extérieures.
Nous n’avons pas installé de charmant petit portail, de balcon, de panneaux solaires, de sauna, de fumoir, de foyer extérieur, ni une de ces merveilleuses douches en plein air que j’apprécie tant chez les autres. En pleine frénésie des pergolas, nous n’en avons pas construit une. Quant à l’intérieur de la cabane, comme aux premiers jours, il ressemble encore à une scène de crime en milieu rural.
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Le choix d’être passif
Avec le temps, notre inertie est devenue aussi normale que toutes ces choses qu’on fait en général quand on va au chalet. Nous sommes fiers de n’avoir rien changé à ce lieu, à tel point que nous nous sentons parfois en rivalité avec d’autres propriétaires passifs comme nous. Mais ne vous méprenez pas: ce n’est pas de la paresse.
Le résultat de notre inaction n’est pas une vie insouciante, pieds nus, un brin d’herbe à la bouche, mais plutôt le travail ardu de vivre dans la nature sauvage. Parfois, revenus en ville, nous parlons de ces chalets de rêve qu’on voit dans les magazines. Puis nous revenons à notre hutte et nous murmurons: «Pas ici».
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Un lieu hors du temps
Nous avons fini par comprendre que le changement est la première menace à laquelle nous voulons échapper quand nous allons au chalet. Le rouleau compresseur du soi-disant progrès. Le téléphone le plus récent. La rénovation perpétuelle de nos maisons, de nos corps, de nos personnalités. Le changement est devenu un polluant de l’ère moderne. Certes, il peut être utile, mais il se présente le plus souvent là où il n’est pas nécessaire. Même le fichu climat s’y est mis!
Chaque année, désormais, nous suivons le sentier, nous ouvrons un passage jusqu’à la porte, puis nous nous abandonnons à la magie d’un lieu hors du temps. Un jour, nous le savons, cet abri s’effondrera. Peut-être bien que nous construirons alors un nouveau chalet. Mais peut-être que nous nous contenterons de monter la tente.
D’autres vestiges du passé, comme ces 50 maisons abandonnées, auraient bien besoin d’être restaurés.