Voici pourquoi les Nord-Américains mettent leurs oeufs au réfrigérateur et pas les Européens
L’essentiel est d’isoler les bactéries dangereuses. Mais le frigo est-il absolument nécessaire? Pas d’après les Européens.
En Amérique du Nord, on met traditionnellement presque tout au frigo et même des aliments qui devraient être conservés sur le comptoir de la cuisine ou dans le garde-manger. Et c’est là qu’on apprend cette chose invraisemblable: les Européens gardent leurs œufs sur le comptoir! Ils sont absolument contre leur réfrigération. Qui a raison? Il semble que l’on se trouve devant deux approches différentes pour un même mal.
Au cœur de l’enjeu se trouve la salmonellose, l’une des causes d’intoxication alimentaire les plus courantes. Elle couve dans les élevages avicoles et se retrouve sur les coquilles par contamination avec la saleté et les excréments. Mais le danger s’accroît lorsque la bactérie se trouve dans l’œuf après une infection bactérienne des ovaires de la poule. Pour mettre fin à ce problème, les Américains ont instauré dans les années 1970 une nouvelle technique de nettoyage des œufs au savon et à l’eau très chaude après la ponte. Cette douche bouillante élimine bien toute trace de salmonelle, mais décape également l’œuf de sa fine couche protectrice appelée cuticule. Cette perte le prive de sa réserve d’eau et d’oxygène, ainsi que de sa protection contre les bactéries nuisibles. D’où la réfrigération dans le compartiment le plus froid du réfrigérateur (habituellement au centre) pour prévenir la contamination.
Les experts européens en sécurité alimentaire, de leur côté, ont fait un autre choix: la préservation de la cuticule, l’interdiction aux producteurs de laver les œufs et de les réfrigérer (pour éviter la moisissure et la contamination bactérienne d’œufs mouillés remis à température ambiante). Ils ont mis en place un programme efficace de vaccination des poules contre la salmonelle. Ainsi, la quantité d’empoisonnements alimentaires liés aux œufs en Grande-Bretagne en 2000 était de 14 000 cas pour 8 000 aujourd’hui, après le déploiement extensif de mesures préventives. Aux États-Unis, on compte 79 000 cas pour une population nettement supérieure.
Les deux approches ont toutes deux leurs défauts et leurs mérites. On sait que les œufs se conservent plus longtemps au frigo, soit 50 jours, plutôt que 21 sur le comptoir. Cependant, ils absorbent des odeurs et des goûts provenant des aliments voisins. Les adeptes du comptoir affirment que leurs œufs ont nettement meilleur goût. Mais des œufs conservés dans leur boîte au frigo sans autre aliment odoriférant ne subissent pas d’altération du goût. Et pour certains chefs, les œufs destinés à la pâtisserie devraient toujours être à température ambiante. Ce qui peut expliquer cette exigence dans certaines recettes.
Si vous choisissez de conserver vos œufs hors du frigo, commencez par en discuter avec des producteurs avicoles au marché fermier du coin. Vous pourriez alors trouver des œufs non lavés et non réfrigérés avec une cuticule intacte, ce qui vous permettrait de les conserver sur le comptoir. Essayez de constater la différence. Mais soyez conséquent: un œuf non lavé qui a fait un passage au frigo doit y rester jusqu’au moment où il sera consommé. À cet effet, Santé Canada estime que les œufs (crus ou cuits) ne doivent pas être conservés à la température ambiante pendant plus de deux heures.
Alors que les œufs vendus dans les épiceries canadiennes sont classés catégorie Canada A, ceux qui sont vendus à la ferme ou dans les marchés fermiers peuvent ne pas être classés. Les œufs non classés ne sont pas assujettis aux mêmes normes de salubrité des aliments et peuvent ainsi ne pas être lavés ou ne pas être entreposés au froid. Le symbole de la feuille d’érable sur la boîte certifie que les œufs sont de catégorie A, selon l’innocuité, la salubrité et la qualité des œufs.