Les édulcorants artificiels sont-ils sans danger?
Les édulcorants artificiels sont omniprésents dans notre alimentation. Mais sont-ils sains et contribuent-ils vraiment à vous faire perdre du poids?
Les personnes qui comptent leurs calories ou cherchent à limiter leur consommation de sucre se tournent généralement vers les édulcorants artificiels. Étant donné qu’on les retrouve dans le yogourt maigre, la gomme sans sucre et de nombreux plats de régime, il est difficile d’éviter ces substances à saveur sucrée.
Innocuité
Les édulcorants sont-ils inoffensifs? Dans des études sur des animaux de laboratoire, on a associé au cancer certains de ceux qui sont vendus comme substituts du sucre de table (par exemple, pour édulcorer le café ou le thé) et qui sont ajoutés aux aliments transformés. Cependant, selon Santé Canada, la FDA américaine et l’Organisation mondiale de la santé, on ne dispose pas de preuves probantes à l’effet qu’ils présenteraient des risques pour la santé, y compris chez les femmes enceintes et les enfants.
Même le Center for Science in the Public Interest (CSPI), organisme indépendant de protection des consommateurs, soutient que les risques potentiels qu’ils présentent ne sont pas aussi menaçants que l’épidémie d’obésité. Cependant, Michael Jacobson, directeur général de l’organisme américain, dont le siège social est à Washington (D.C.), se dit peu convaincu, à la lumière des résultats des études, de leur innocuité. Il souhaite que les gouvernements financent des études d’innocuité, plutôt que de fonder leur approbation sur celles qui sont menées par l’industrie. «Le risque qu’une personne en particulier souffre d’un cancer en conséquence de la consommation des édulcorants est très faible, dit-il, mais si vous multipliez cet infime risque par des millions de consommateurs, cela devient assez significatif pour que les gouvernements agissent. À mon sens, ils ont fait preuve de laxisme dans ce dossier.»
La filière édulcorant/perte de poids
Les édulcorants artificiels favorisent-ils la perte de poids? Peut-être pas. Au cours d’une étude dont les résultats ont été publiés en août 2008 dans la revue Obesity, on a découvert que les personnes de poids normal qui prenaient plus de 21 boîtes de boissons gazeuses contenant de l’aspartame par semaine couraient deux fois plus de risques de faire de l’obésité que celles qui ne prenaient aucun édulcorant. Sharon Fowler, co-auteure de l’étude et professeure adjointe en épidémiologie clinique au Health Science Center de l’université du Texas à San Antonio, explique : «Les édulcorants ont été associés à un gain de poids chez les rongeurs. En outre, au cours de deux études de grande envergure, on a associé l’ingestion quotidienne de sodas de régime à une augmentation du risque de souffrir du syndrome métabolique [groupe de symptômes liés aux maladies cardiovasculaires et au diabète].»
Ces découvertes préoccupent certains chercheurs. Arya Sharma, médecin et directrice de la chaire sur la recherche et la prise en charge de l’obésité de l’université de l’Alberta, conseille à ses patients d’éviter les édulcorants artificiels et de consommer, à la place, des quantités modérées de sucre. (Santé Canada conseille de limiter la consommation de sucres au quart de l’apport calorique quotidien. Quant aux experts, ils estiment qu’il est préférable d’en prendre moins.)
Le docteur Yoni Freedhoff, directeur médical du Bariatric Medical Institute d’Ottawa, prétend qu’aucune de ces études n’a permis d’établir un lien de cause à effet entre la consommation d’édulcorants et l’obésité. Parmi les diverses théories proposées par les chercheurs pour expliquer l’existence d’un tel lien, il y aurait l’effet psychologique ‘ les gens remplaceraient les calories «épargnées» par des aliments riches en gras ‘ et l’effet biologique ‘ les édulcorants tromperaient le cerveau, créant un sentiment d’insatisfaction et poussant les gens à ingérer plus de calories. À cela, Yori Freedhoff rétorque : «J’échangerais volontiers ce risque non démontré par le risque bien réel que les gens prennent du poids en consommant plus de calories.»
Selon Santé Canada, les édulcorants artificiels permettrent de surveiller son poids lorsqu’ils sont intégrés à une alimentation saine. Cependant, en remplaçant les aliments sains, comme les fruits et le lait, par des aliments nocifs, comme les friandises et les sodas, on augmente assurément son risque de souffrir de cardiopathie et d’ostéoporose.
Par conséquent, adoptez une alimentation équilibrée et, si vous voulez consommer un édulcorant artificiel, faites des choix avisés : dans leur recherche d’équilibre entre saveur et conservation, les fabricants offrent un vaste éventail de produits alimentaires.
Voici la liste des édulcorants les plus courants, ainsi que les principaux arguments en leur faveur ou défaveur, et, au final, ceux qui sont considérés comme inoffensifs.
Sucralose
Édulcorant de table qui peut remplacer le sucre dans le café ou pour la cuisson, et additif entrant dans la composition de plus de 4000 produits alimentaires et boissons.
Nom de marque Splenda
Composition Le sucralose dérive d’une réaction entre le sucre (sucrose) et le chlore.
Innocuité Les autorités gouvernementales ainsi que le CSPI estiment que les études sur les animaux de laboratoire n’ont révélé aucun risque.
Verdict Inoffensif.
Aspartame
Édulcorant de table et additif alimentaire dans les desserts, la gomme à mâcher, les boissons gazeuses et les céréales.
Noms de marque Equal et NutraSweet
Composition Dérivé synthétique résultant d’un mélange de deux acides aminés, l’acide aspartique et la phénylalanine.
Innocuité Les personnes souffrant de phénylcétonurie, maladie rare, ne peuvent métaboliser la phénylalanine et doivent donc l’éviter. Selon Michael Jacobson, les résultats d’études sur les animaux menées par la Ramazzini Foundation of Oncology and Environmental Sciences indiquent qu’il augmente le risque de leucémie et de lymphome. «La preuve était on ne peut plus probante», s’écrie-t-il. Cependant, selon Santé Canada, on a relevé de sérieuses lacunes dans ces études.
Verdict Probablement inoffensif pour la majorité des gens.
Néotame
Nouvel additif qui devrait remplacer l’aspartame au cours des cinq prochaines années. Pour l’instant, on le trouve dans certaines gommes à mâcher mais il n’est pas encore largement utilisé.
Nom de marque Néotame
Composition Comme l’aspartame, il est composé d’acide aspartique et de phénylalanine mais, contrairement à lui, il ne se dégrade pas en phénylalanine et n’est donc pas toxique pour les personnes souffrant de phénylcétonurie.
Innocuité Selon Santé Canada et le CSPI, rien, dans les études sur les animaux, ne permet de croire qu’il présenterait des risques
Verdict Solution de rechange possible à l’aspartame.
Acésulfame
Édulcorant de table et additif, souvent jumelé à l’aspartame dans les sodas de régime et la gomme à mâcher.
Nom de marque Sunett
Compositon Produit de synthèse, également appelé acésulfame potassium et acésulfame K.
Innocuité Le CSPI soutient que les études sur les animaux menées dans les années 1970 et sur lesquelles s’est appuyé le gouvernement pour donner le feu vert à cet édulcorant, présentaient de sérieuses lacunes Quoiqu’il en soit, ces études montraient un risque de cancer. Santé Canada ne nie pas que la preuve de l’innocuité de l’acésulfame s’appuie sur des données désuètes.
Verdict Éviter cet édulcorant.
Saccharine
Édulcorant de table vendu derrière le comptoir dans les pharmacies.
Noms de marque Hermasetas et Sweet’N Low
Composition Produit chimique portant le nom de sulfimide benzoïque
Innocuité Suite à des études sur des rats de laboratoire menées dans les années 1970 et montrant qu’elle était carcinogène, la saccharine a été retirée de la liste des additifs au Canada. Santé Canada p;prétend que, selon des études plus récentes, les résultats observés chez les rats ne sont pas transposables aux humains et considère la possibilité de l’accepter à nouveau comme additif. Quant à Michael Jacobson, il estime que «il n’y a pas de preuve évidente ni d’un côté ni de l’autre».
Verdict À éviter jusqu’à preuve de son innocuité.
Cyclamate
Édulcorant de table à n’utiliser que sur le conseil d’un médecin.
Nom de marque Sugar Twin
Composition Sel de l’acide cyclamique.
Innocuité Interdit comme additif depuis que les résultats d’études sur les animaux ont montré qu’il provoquait le cancer de la vessie. Santé Canada en autorise la vente à la condition que le produit soit accompagné d’une notice d’avertissement.
Verdict À éviter.
Un édulcorant naturel?
De nombreux fabricants souhaiteraient édulcorer leurs sodas au stévia, plante sud-américaine dont le pouvoir édulcorant est beaucoup plus élevé que celui du sucre et qui ne fournit pas de calories. En 2008, la FDA a donné le feu vert au rébaudioside A, extrait du stévia, sur la foi d’études menées par les fabricants et montrant qu’il était généralement considéré comme sûr. Cependant, Michael Jacobson, du CSPI, affirme que la revue des données d’études commandée par son groupe a révèle un risque de mutations génétiques. Santé Canada se montre également prudente et n’autorise pas la vente de produits alimentaires édulcorés au stévia. On peut toutefois trouver la plante dans les magasins de produits naturels.