Le terme «binge-watch» (visionner compulsivement, ou en rafale) était en lice pour le mot de l’année du dictionnaire Oxford en 2013. Bien qu’il n’ait pas été retenu (c’est «selfie» qui a remporté la palme), cela a mis en évidence l’essor d’une activité populaire qui consiste à regarder d’un coup plusieurs épisodes d’une série télévisée.
De nos jours, des millions de personnes – dont moi –, consomment régulièrement leurs séries préférées de cette manière que la prolifération des services de lecture en continu a rendue facile. Comme on pouvait s’y attendre, les études démontrent que, pendant le confinement dû à la Covid, beaucoup de gens ont passé plus de temps à faire du visionnement en rafale que d’habitude.
Mais cela peut-il devenir un problème ou une dépendance? Et s’il vous est impossible d’arrêter, que pouvez-vous faire?
Pour savoir si la situation est problématique, ce n’est pas une question de nombre d’épisodes regardés (bien que la plupart des chercheurs s’accordent pour dire qu’il faille au moins deux épisodes consécutifs), ni de quantité d’heures passées devant la télévision ou l’écran d’ordinateur. Comme pour d’autres comportements qui entraînent une dépendance, il est plus important de savoir si la compulsion a un impact négatif sur d’autres aspects de la vie de la personne concernée.
Mes nombreuses années d’études sur les dépendances m’ont amené à constater six éléments essentiels des comportements de dépendance. En ce qui concerne le visionnement en rafale, cela signifie que:
- Le visionnement d’émissions est ce qui est devenu le plus important dans la vie de la personne (prépondérance).
- La personne fait du visionnement en rafale pour changer son humeur, c’est-à-dire pour se sentir mieux à court terme ou pour échapper temporairement à quelque chose de négatif dans sa vie (modification de l’humeur).
- Le visionnement excessif compromet des aspects importants de la vie de la personne, comme les relations, l’éducation ou le travail (conflit).
- Le nombre d’heures que la personne passe à regarder des émissions chaque jour a augmenté de manière significative au fil du temps (tolérance).
- La personne éprouve des symptômes de sevrage psychologique ou physiologique si elle ne peut pas faire du visionnement en rafale (manque).
- Si la personne parvient à arrêter temporairement sa compulsion, lorsqu’elle reprend l’activité, elle retombe directement dans le cycle dans lequel elle se trouvait auparavant (rechute).
À mon avis, toute personne qui répond à ces six critères est réellement dépendante du visionnement en rafale. Une personne pour qui certains de ces critères ne s’appliquent pas peut avoir un problème de visionnement compulsif, mais ne serait pas classée comme dépendante selon mes critères.
Comme bien d’autres dépendances comportementales, telles que celles au sexe, au travail et à l’exercice, la dépendance au visionnement n’est reconnue dans aucun manuel de psychiatrie. Nous ne disposons pas non plus d’estimations précises de sa prévalence. Mais la recherche sur ce phénomène progresse.
Coup d’œil aux données
Dans la dernière étude publiée sur le sujet, une équipe de scientifiques polonais a interrogé 645 jeunes adultes, qui ont tous déclaré avoir regardé au moins deux épisodes d’une émission en une seule fois. Les chercheurs ont voulu comprendre certains des facteurs sous-jacents du visionnement compulsif problématique.
Les auteurs (qui ont fondé leur définition du visionnement en rafale problématique en partie sur mon modèle des éléments de la dépendance) ont utilisé un questionnaire qu’ils avaient élaboré dans une étude antérieure pour évaluer le visionnement compulsif chez les participants. Parmi les questions posées, citons: «À quelle fréquence négligez-vous vos obligations pour regarder des séries?» «À quelle fréquence vous sentez-vous triste ou irrité lorsque vous ne pouvez pas regarder des séries télévisées?» et «À quelle fréquence négligez-vous votre sommeil pour regarder des séries en rafale?»
Les participants devaient donner des réponses sur une échelle de six points allant d’un (jamais) à six (toujours). Un résultat supérieur à un certain nombre de points était considéré comme une indication d’un problème de dépendance.
À l’aide d’une série d’autres barèmes, les chercheurs ont constaté que la difficulté à contrôler ses impulsions, le manque de préméditation (difficultés à planifier et à évaluer les conséquences d’un comportement donné), le fait de regarder des séries pour fuir et oublier ses problèmes ou pour éviter de se sentir seul figuraient parmi les prédicteurs les plus significatifs du visionnement en rafale à caractère problématique.
En utilisant les mêmes données, les scientifiques ont rapporté dans une étude précédente que le visionnement compulsif présentait une association significative avec le syndrome anxio-dépressif. Plus les symptômes d’anxiété et de dépression d’une personne étaient importants, plus le visionnement en rafale était problématique chez elle.
D’autres études ont fait état de résultats similaires. L’une d’elles, qui portaient sur des adultes à Taïwan, a révélé que le visionnement en rafale excessif était associé à la dépression, à l’anxiété sociale et à la solitude.
Une étude américaine a montré que ce comportement était associé à la dépression et à un attachement anxieux. La plupart des études connexes – comme celle-ci, réalisée au Portugal – ont également montré que le visionnement excessif était souvent causé par un désir de fuite.
Pour ce qui est des traits de personnalité, la recherche a montré que le visionnement compulsif problématique semble être lié à une faible conscienciosité (avec tendance à l’impulsivité, à la négligence et à la désorganisation) et à un important névrosisme (avec anxiété et tendance aux émotions négatives). Nous observons ce type d’associations dans les comportements de dépendance de manière plus générale.
Rompre la dépendance
Si vous souhaitez réduire le nombre d’épisodes que vous regardez d’un coup, je vous suggère d’arrêter au milieu d’un épisode. Il est très difficile d’arrêter à la fin, car cela se termine souvent avec un suspens.
Je conseille également de fixer des limites quotidiennes réalistes. Pour moi, c’est 2,5 heures si j’ai du travail le lendemain, ou jusqu’à 5 heures si je n’en ai pas. Et commencez à regarder pour vous récompenser seulement après avoir fait tout ce que vous deviez faire en termes de travail et d’obligations sociales.
N’oubliez pas que la différence entre un enthousiasme sain et une dépendance est que le premier ajoute à votre vie, alors que la seconde vous en détourne. Si vous avez l’impression que le visionnement en rafale est envahissant, vous devriez demander à votre médecin de vous orienter vers un psychologue clinicien. La plupart des dépendances sont des symptômes d’autres problèmes sous-jacents.
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Mark Griffiths, Directeur de l’International Gaming Research Unit et professeur de Behavioral Addiction, Nottingham Trent University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
Ce que nous savons du sommeil et de l’alimentation provient en grande partie d’enquêtes épidémiologiques ayant établi que les insomniaques chroniques mangent en général plus mal: moins de protéines, moins de fruits et de légumes, plus de sucre ajouté. Mais ces études ne démontrent que des corrélations, non un lien de cause à effet. Elles n’expliquent pas, par exemple, si c’est le régime malsain qui provoque l’insomnie ou l’inverse.
Marie-Pierre St-Onge, professeur adjoint de médecine nutritionnelle à la clinique Irving de l’université Columbia de New York et directrice de son centre du sommeil, étudie le rapport entre l’alimentation et le sommeil. Ses résultats laissent penser qu’il vaut mieux se concentrer sur la qualité du régime alimentaire. Dans le cadre d’un essai clinique aléatoire dont les résultats ont paru dans le Journal of Clinical Sleep Medicine en 2016, elle et ses collègues ont recruté 26 adultes en bonne santé et ont surveillé ce qu’ils mangeaient et comment ils dormaient pendant quatre jours. Ils ont ainsi découvert que manger plus de graisse saturée et moins de fibres provenant d’aliments comme les légumes, les fruits et les grains entiers tendait à réduire le sommeil à ondes lentes qui est le plus profond et le plus réparateur.
Mme St-Onge a aussi porté attention au genre de glucides consommés. Quand on mange plus de sucre et d’hydrates de carbone simples – ceux du pain blanc, des pâtisseries et des pâtes –, on se réveille plus souvent pendant la nuit. Mieux vaut manger des hydrates de carbone complexes et des fibres pour dormir profondément. «Les hydrates de carbone complexes stabilisent la glycémie. La corrélation entre ces glucides et un sommeil plus réparateur vient peut-être de là.»
Cela dit, le lien entre alimentation et sommeil est réciproque: quand on dort moins bien, le corps subit des changements physiologiques qui rendent la malbouffe plus attrayante. Lors des essais cliniques, des adultes en bonne santé qui dorment seulement quatre ou cinq heures par nuit finissent par absorber plus de calories et par grignoter plus souvent pendant la journée. Ils ont faim plus souvent et ont plus envie de sucre.
Chez les hommes, la privation de sommeil stimule la sécrétion de ghréline ou hormone de la faim, tandis que chez les femmes, elle abaisse le taux de la GLP-1, l’hormone de la satiété. «Le manque de sommeil donne plus d’appétit aux hommes et affaiblit le signal qui incite les femmes à cesser de manger», résume Mme St-Onge.
Le cerveau aussi subit des altérations. Mme St-Onge a constaté que, si on dort seulement quatre heures par nuit pendant cinq nuits de suite, le système de récompense cérébral est plus excité par une pizza au saucisson, un beignet ou des friandises que par des aliments sains comme des carottes, du yaourt, du gruau d’avoine ou des fruits, aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Après cinq nuits de sommeil normal, cette surréaction à la malbouffe disparaît.
Une étude effectuée par des chercheurs du King’s College de Londres en 2018 a aussi démontré qu’un bon sommeil accroît la capacité de résister à la malbouffe. Après avoir fait suivre à des personnes qui dormaient peu un programme prolongeant leur période de sommeil – d’environ une heure par nuit – ils ont constaté une amélioration du régime alimentaire de leurs sujets, notamment une réduction d’une dizaine de grammes de sucre ajouté par jour.
«Pour être en bonne santé, conclut le Dr Susan Redline, professeur de médecine du sommeil à l’école de médecine de l’université Harvard, il n’y a pas mieux que de bien manger et de bien dormir. Ces deux aspects cruciaux de la santé se renforcent mutuellement.»
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Adapté du New York Times (10 décembre 2020) ©New York Times Company
Le requin blanc est, à nos yeux, l’incarnation de la terreur. Avec ses rangées de dents acérées et une peau si dure qu’elle servait jadis de papier abrasif, on l’imagine fonçant sur ses proies comme un missile. La peur primitive se comprend. Mais nous sommes une espèce particulière, également fascinée par cela même qui la terrifie. Des Dents de la mer à la Shark Week, les requins sont au croisement de l’horreur et de l’émerveillement. Alors si l’un d’eux se met à tweeter, bien sûr qu’on le suit. D’ailleurs, les Dents de la mer fait partie des films d’horreur qui ont été inspirés de faits réels.
En mars 2017, en Caroline du Sud, l’équipe de recherche américaine de l’Ocearch capture au large de l’île de Hilton-Head un requin blanc de 3,7 m et 600 kilos. Les biologistes installent sur sa nageoire dorsale un émetteur satellite de la taille d’une lampe de poche et baptisent le requin Hilton. Le même mois, ils lui ouvrent un compte Twitter géré par un groupe d’employés, de bénévoles et de scientifiques. Il suffit dès lors de télécharger l’application Shark Tracker pour suivre la migration de Hilton, qui croise le long de la côte Atlantique de la Nouvelle-Écosse.
Avec près de 50 000 abonnés, Hilton est une petite célébrité et devient la mascotte officielle des passionnés de requins en Nouvelle-Écosse. Sur le compte Twitter de Hilton, l’équipe d’Ocearch le présente comme un type enjoué en quête de nourriture et d’amour. (On y trouve ce genre de tweets: «J’ai donné 15 secondes d’avance à mon dernier poisson. Je me sens l’esprit sportif aujourd’hui. Le prochain aura droit à 25 secondes.») Hilton n’est pas la seule vedette des réseaux sociaux. Ocearch gère 27 comptes Twitter pour ses requins balisés.
Ocearch, mot-valise formé d’ocean et research, est une organisation de recherche océanographique très connue, et controversée, faut-il ajouter, en raison notamment de son marketing original. À la barre de cette ONG: Chris Fischer, une personnalité tout aussi clivante. Au lieu de craindre les requins, il veut les sauver.
Chris Fischer règne sur le MV Ocearch, un navire de recherche de 38 mètres. Il s’exprime avec un reste d’accent traînant du Kentucky et porte une veste à capuche et une casquette avec les logos de ses sociétés commanditaires. Pour Ocearch, il dit s’être inspiré de Jacques Cousteau, le cinéaste et explorateur océanographique apprécié du public. Mais avec son faible pour l’innovation et le développement, il évoque davantage un fondateur de startup.
Chris a découvert sa vocation quand il animait Offshore Adventures, une série sur la pêche diffusée sur la chaîne ESPN2. En 2005, il a invité des biologistes à aider son équipe à attraper des poissons pour la recherche. Il découvrait ainsi que l’écosystème des océans repose sur des superprédateurs comme les requins blancs.
En plus d’être menacés par la surpêche, les requins blancs sont capturés pour leurs ailerons et leurs nageoires, puis rejetés mutilés mais vivants à la mer. Perdre ces joueurs essentiels à l’équilibre marin, avertissent les scientifiques, ne peut conduire qu’à l’effondrement des réseaux écologiques. Apprenez-en plus sur l’industrie la plus meurtrière au monde: la pêche.
Chris a alors l’idée de transformer son navire en laboratoire flottant qu’il appelle le MV Ocearch. Le bateau devient la base à partir de laquelle il tourne l’émission de téléréalité documentaire centrée sur les requins Expedition Great White, diffusée à partir de 2010 sur National Geographic (rediffusée plus tard sous le nom de Shark Men, puis sous celui de Shark Wranglers). «J’étais assez jeune et assez fou pour me lancer à la conquête d’un noble objectif: faire entrer l’océan dans la vie des gens comme à l’époque de Cousteau.»
Depuis les années 1970, les scientifiques analysent les populations de requins blancs dans le nord-ouest atlantique, comptent les individus trouvés dans les palangres et considérés comme prises accessoires, et extrapolent à partir de ces données des tendances démographiques. La méthode est imparfaite et ne tient pas compte des requins qui circulent plus près des côtes. Comme il n’existe aucune donnée fiable sur ces populations de requins blancs, Ocearch et d’autres chercheurs se tournent vers le marquage pour les suivre dans leur migration et leur reproduction, qui restent un mystère. C’est habile de choisir un prédateur qui exerce une telle fascination.
La méthode de marquage de l’équipage de l’Ocearch n’est pas conformiste et cela contribue à la popularité de l’émission où l’on voit Chris Fischer attraper des requins toutes les semaines devant la caméra.
La plupart des chercheurs utilisent des balises d’archivage par satellite installées au harpon sous la peau de l’animal pendant qu’il nage ou qu’il est retenu sur le côté d’un bateau. Ocearch préfère appâter le requin et l’attirer vers le navire, puis le sortir de l’eau sur une plateforme hydraulique. Les chercheurs font alors plusieurs prélèvements – sang, parasites, muscles. En plus des balises d’archivage, ils en installent une autre sur sa nageoire dorsale qui transmet la position et la température de l’animal. Quand le requin est remis à l’eau, la balise envoie les données à l’application Ocearch – et rapidement à son compte Twitter.
Soulever un prédateur de plus de 500 kilos ne se fait pas sans tension et tout ne se passe pas toujours bien. Shark Men mettait en vedette Chris Fischer, son équipe et le biologiste spécialiste des requins Michael Domeier, défenseur de la méthode de sortie de l’eau des requins pour le marquage.
Dans le premier épisode de la saison 2, pendant une séance de marquage près des îles Farallon, au large de San Francisco, l’équipe a accidentellement logé un hameçon au fond de la gueule d’un requin. L’hameçon n’ayant pas été entièrement retiré quand on a relâché l’animal, le sanctuaire marin local a alors suspendu le permis accordé à l’organisation en attendant que Ocearch modifie sa technique – tout cela étant filmé en direct. Plus tard, dans le même épisode, c’est un Michael Domeier inquiet qui s’adresse à Chris Fischer. Il craint que l’incident n’ait un effet négatif sur sa réputation professionnelle. «Mon nom est sur tous ces permis, se désole-t-il. Toi, tu pourras continuer à faire tes émissions de pêche, mais moi, je serai coincé avec ça.»
Lisez ce témoignage sur la traque aux bateaux de pêche illégale dans l’Antarctique.
D’autres chercheurs reprochent à Michael Domeier ses méthodes de marquage invasives. Et Chris Fischer, de son côté, a la réputation d’un marginal. Depuis l’incident des îles Farallon, Ocearch suscite la controverse partout où va le navire. L’organisation est critiquée pour sa façon d’appâter les requins en déversant dans l’eau d’importantes quantités de sang et de viscères de poissons. En Afrique du Sud, on a reproché à Ocearch la mort d’un bodyboardeur attaqué par un requin près du Cap (la Ville a par la suite déclaré que rien ne prouvait que la méthode d’appâtage ait été à l’origine de l’accident).
Si la deuxième aventure de Chris avec la téléréalité a pris fin après deux ans et quatre saisons, il admet que c’est pour le mieux. «Comment voulez-vous organiser des réunions avec des présidents d’entreprises et des responsables politiques si vous faites le guignol à la télé le mardi soir?» dit-il.
La situation financière de son organisation se fragilise quand il quitte la télévision. Il propose alors à des commanditaires de faire de la publicité par «intégration de la marque au contenu». De fait, Ocearch devient un groupe de conservation avec une branche publicitaire.
Aujourd’hui, la coque du MV Ocearch est tapissée des logos de ses commanditaires.
Chris Fischer réussit à transformer l’argent des entreprises en financement pour la recherche scientifique et en divertissement en ligne pour des milliers de fans. Populariser un requin comme Hilton permet de sensibiliser le public à une problématique plus globale. De plus, avec cet argent, Chris peut financer son énorme navire et offrir le meilleur équipement aux scientifiques qui travaillent avec lui. Et quand ces derniers arrivent à des résultats de recherche passionnants, le public est avide de les suivre et Ocearch attire de nouveaux commanditaires pour soutenir des travaux futurs.
L’organisation ne manque jamais de souligner sa collaboration avec la communauté scientifique. Partout dans le monde, les chercheurs ont accès aux différentes données recueillies par les balises. Bien sûr, les scientifiques collaborent volontiers. En décembre 2018, 46 chercheurs du monde entier ont publié un article sur l’urgence d’entreprendre des recherches sur le requin blanc. Chris ne se laisse pas impressionner. «Ce qui m’intéresse, c’est une collaboration complète. Ils s’entendent et, oui, ils collaborent, mais ils n’ont pas d’envergure», regrette-t-il. Il aimerait que les scientifiques du monde entier partagent leurs données via Ocearch.
En septembre 2018, Ocearch a repris sa pratique controversée en Nouvelle-Écosse dans le cadre de son étude sur le requin blanc dans l’Atlantique Nord. Le navire s’est installé dans les eaux de la rive sud de la province avec l’autorisation du ministère des Pêches et des Océans (MPO) pour le marquage de 20 requins blancs. Ocearch a jeté l’ancre près de Hirtle’s Beach, plage prisée des baigneurs et des amateurs de surf, et des îles La Hève, populaires chez les kayakistes, les plongeurs et les pêcheurs de pétoncles – et a déversé ses appâts sanglants. Seth Congdon pêchait le maquereau avec deux amis quand un membre de l’équipage de l’Ocearch est venu leur parler d’un requin blanc que l’équipage venait de marquer.
Pour plaisanter, Seth a lancé que, plus tôt dans la journée, des requins avaient nagé tout près de là. L’employé d’Ocearch les a mis en garde: quantité d’appâts avaient été déversés et il était préférable de ne pas se baigner dans les parages. Inquiets, les amis de Seth et Jefferson Muise, un surfeur de la région, ont alerté la chaîne CBC. La population a soudain compris qu’elle ignorait à peu près tout de l’opération d’Ocearch. Bob Hueter, principal conseiller scientifique d’Ocearch à l’époque, a répondu en déclarant au journal local que ces propos «étaient une pure invention ; que rien de tout cela ne s’était produit».
Jefferson Muise n’est pas naïf. Il n’ignore pas que, l’été et l’automne, quand il est dans les vagues, il partage l’eau avec les requins blancs.
Mais son inquiétude est justifiée. Tandis que des scientifiques discutent encore de la pertinence de cette méthode d’appâtage susceptible de modifier le comportement des requins et de mettre en danger des baigneurs près de la plage, d’autres chercheurs, et ils sont nombreux, ne veulent pas courir ce risque.
Heather Bowlby, directrice du laboratoire de recherche sur les requins du Canada atlantique au MPO, se déplace d’au moins trois milles nautiques au large quand elle appâte des requins blancs. (Elle préfère accrocher un poisson à un hameçon et n’appâte jamais les requins autrement.)
Chris Lowe, directeur du Shark Lab à l’université d’État de Californie à Long Beach, qui marque régulièrement des requins au large de la côte de Los Angeles, confirme: «Je n’irai jamais appâter des requins près d’une plage publique.»
Chris Fischer balaie la critique. Dans son esprit, un biologiste qui refuse de travailler avec Ocearch est un collectionneur de données égoïste, plus intéressé par ses ambitions personnelles que par la survie des requins. «Il fallait secouer la recherche scientifique, explique-t-il. Il est évident qu’ils ont tous des intentions différentes et ça n’a rien à voir avec les requins.»
Allez dire ça aux biologistes qui y consacrent leur vie et le son de cloche sera différent. Ocearch n’est pas si avant-gardiste, juge Chris Lowe.
Il s’agit au fond d’un laboratoire scientifique comme tous les autres, sauf que la mobilité de ses installations lui permet de passer facilement d’un endroit à l’autre – armé de caméras, de commanditaires et de comptes Twitter –, laissant dans son sillage beaucoup de ressentiment.
Au printemps dernier, Ocearch poursuivait le marquage et le traçage de requins dans le monde, claironnant partout «#factsoverfear» («les faits plutôt que la peur»). Mais le compte Twitter du requin blanc Hilton s’est tu en août 2020. Ocearch a perdu sa trace. Les signaux de sa balise n’émettent plus.
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©2019, par Chelsea Murray. Tiré de «Twitter Sharks», publié dans The Walrus (3 juin 2019), thewalrus.ca
Aujourd’hui, Lesley mène une vie enrichissante et bien remplie, et son emploi du temps rivalise même avec celui des plus ambitieux d’entre nous. En plus de son travail à temps plein comme technicienne en comptabilité, elle étudie pour terminer sa maîtrise en psychologie de l’orientation, fait du bénévolat auprès de plusieurs organismes et poursuit ses projets personnels. Mais ce qui rend cette jeune femme encore plus remarquable, c’est le chemin qu’elle a parcouru depuis qu’on lui a diagnostiqué une schizophrénie il y a six ans.
«Maintenant que j’ai les réponses et le soutien dont j’ai besoin, je suis déterminée à profiter au maximum de chaque journée», raconte-t-elle.
Durant cette période, Lesley a appris ce qui fonctionnait pour elle. Vivant avec son chien dans un logement attenant à la maison de ses parents, elle est très bien entourée. Elle rend régulièrement visite à une équipe de spécialistes en santé mentale qui lui administre chaque mois par injection les médicaments dont elle a besoin, en plus de rencontrer son psychiatre tous les trois mois.
Lesley continue de se fixer de nouveaux objectifs professionnels et prend le temps de faire les activités en plein air qui la passionnent, soit le golf, le ski et la randonnée. Elle accepte le fait que la schizophrénie est une maladie chronique qu’elle devra gérer toute sa vie . Parce que, comme elle le dit elle-même, elle ne veut pas revivre ce qu’elle a vécu avant que son diagnostic tombe.
«Avant d’avoir mon diagnostic, je vivais avec les symptômes de la schizophrénie et cela gâchait ma vie autant d’un point de vue émotionnel que personnel», explique-t-elle.
Lesley décrit ses premières hallucinations auditives comme une expérience extrêmement déroutante. La jeune femme était contrainte de chasser les voix qu’elle entendait et d’écouter malgré elle ce qu’elles lui disaient. Incapable de distinguer le réel de ce qui ne l’était pas, Lesley devenait paranoïaque et avait des comportements instables. Voyant que quelque chose n’allait pas, elle est allée à l’hôpital et a consulté un psychiatre.
Cependant, les voix qu’elle entendait lui ont soufflé de ne pas être honnête avec celui-ci. Elles lui ont dit que sa famille serait blessée si elle avouait au médecin qu’elle entendait des voix. Ce jour-là, Lesley a quitté l’hôpital avec une prescription de somnifères. Elle a été hospitalisée et renvoyée sans diagnostic deux autres fois cet été-là. Les délires et les hallucinations sont des symptômes typiques de la schizophrénie et Lesley s’est sentie obligée de dissimuler cette information.
«Je cachais le fait que j’entendais des voix», se souvient-elle.
Il a fallu près de six mois avant que Lesley sente qu’elle avait suffisamment confiance en son équipe de professionnels de la santé pour qu’elle puisse leur dire qu’elle entendait des voix. Pour elle, ce moment a marqué un tournant dans son parcours, car cette révélation a permis à son psychiatre de confirmer son diagnostic de schizophrénie et de déterminer une stratégie de prise en charge appropriée.
«Mon diagnostic a été un moment décisif. Mon traitement a commencé immédiatement après. On m’a donné beaucoup de conseils et j’ai commencé à prendre des médicaments. Ma vie a alors commencé à s’améliorer».
Initialement, le diagnostic de Lesley a été aggravé par une dépression débilitante. Heureusement, elle et sa famille ont reconnu qu’elle avait besoin d’un soutien continu. À l’époque, Lesley vivait en Colombie-Britannique – bien loin de la maison de ses parents située en Nouvelle-Écosse. Mais son père, Robert, faisait de son mieux pour l’aider à retrouver une bonne santé mentale.
«J’avais peur qu’elle se retrouve à la rue, ce qui aurait été terrible. Je la voyais aller», raconte Robert.
Robert s’inquiétait du fait que sa fille soit seule face à son diagnostic. Au cours de leurs conversations, Lesley lui avait mentionné que, parmi les personnes qui suivaient une thérapie de groupe avec elle, beaucoup se retrouvaient seules face à la schizophrénie – et la plupart d’entre elles étaient incapables de surmonter dans ces conditions les défis d’une maladie aussi complexe. La dépression et la toxicomanie sont des troubles concomitants courants.
Les personnes atteintes de schizophrénie ont souvent besoin d’être aidées financièrement, pour se loger, se nourrir, se vêtir, et ont besoin d’une approche de gestion globale. Robert voulait être sûr que sa fille ne tombe pas entre les mailles du filet.
«Nous avons aidé Lesley à s’installer et à consacrer son énergie à trouver du travail. Elle a besoin de beaucoup d’encouragements et d’être rassurée sur ses progrès», ajoute Robert.
Avec le soutien et les encouragements de ses parents, Lesley est retournée vivre en Nouvelle-Écosse. Le fait d’avoir un logement séparé du leur tout en étant aussi proche d’eux lui a permis de retrouver une certaine indépendance sans se sentir isolée. Atteindre de petits objectifs, comme se promener tous les jours avec son chien, a donné à la jeune femme la confiance dont elle avait besoin pour se fixer des objectifs plus ambitieux, tels que reprendre un travail à temps plein et poursuivre sa maîtrise dans un domaine qui lui tient particulièrement à cœur.
«Après avoir reçu le diagnostic de ma maladie et obtenu l’aide dont j’avais besoin, mes relations se sont développées, mes amitiés et mes relations familiales ont grandi. J’ai pu travailler, étudier, jouer au golf, skier et faire de la randonnée ainsi que toutes les choses que j’aimais faire», explique-t-elle.
L’expérience de Lesley avec la maladie mentale a fait grandir en elle la passion d’aider les autres en défendant leurs droits et en travaillant de manière bénévole pour des organisations telles que la Fondation CureSZ et le Schizophrenia Oral History Project. Son prochain objectif est d’apporter son aide à la Société de la schizophrénie de la Nouvelle-Écosse – un lieu idéal pour quelqu’un dont le parcours difficile a donné naissance à une foule d’idées pour bien vivre avec la maladie. «Cela commence par parler à un professionnel de la santé», conclut-elle.
Si vous avez des symptômes de schizophrénie, parlez-en à votre médecin et demandez-lui quelles sont les possibilités de traitement ainsi que la bonne fréquence de prise de médicaments pour votre situation.
Pour en savoir plus sur la schizophrénie, notamment ses symptômes ainsi que la façon de la diagnostiquer et de la traiter, visitez iamentalhealth.ca.
Avis de non-responsabilité: Cette histoire a été créée par Content Works, la division de contenu commercial de Healthing.ca, pour le compte d’une société pharmaceutique canadienne basée sur la recherche.
En décembre dernier, alors que je cherchais des cadeaux pour les fêtes, j’ai eu la fantaisie de m’offrir un casse-tête. Achat inhabituel chez moi, mais que j’ai expliqué plus tard par le besoin d’échapper au stress que nous sommes nombreux à éprouver en cette époque de l’année.
Qu’on ne se méprenne pas: je suis toujours très heureuse de voir ma famille, mais ces réunions ont le don de mettre nos défauts au premier plan. Ce casse-tête pimpant aux teintes roses avait tout ce qu’il fallait pour me changer les idées. Et pour 20$, c’était une affaire. Pourquoi s’en priver?
Inventé au XVIIe siècle, le casse-tête a servi d’outil éducatif. Il a gagné en popularité chez les adultes lors de la crise de 1929. «La fabrication et l’achat étaient bon marché, et cette activité remplissait les journées et les soirées de désœuvrement», écrit la romancière Margaret Drabble dans ses mémoires. Aujourd’hui, certains esprits parmi les plus éclairés sont accros, notamment Bill Gates et la reine d’Angleterre. Vu ses bienfaits sur la santé – il stimule les compétences cognitives et retarde la perte de mémoire, la démence et l’alzheimer, par exemple –, on comprend pourquoi.
Aussitôt que je me mets à mon casse-tête, je sens que j’ai trouvé ce qu’il me fallait. Au lieu de l’excès habituel de Netflix en fin de soirée, je classe les 1000 pièces jusqu’au petit matin et finis par assembler le tout en quelques jours. Je me sens possédée par ces gestes calmes et méthodiques, comme en état d’hypnose ou comme si j’avais médité des heures. Pour assembler un casse-tête, les deux côtés du cerveau doivent travailler de concert, ce qui explique le sentiment de sérénité. Tout le cerveau est mobilisé par une tâche spécifique et les pensées parasites sont mises en sourdine. Quoi de plus apaisant?
C’est un sentiment que partage Roby Breen, une danseuse qui enseigne à Toronto. À l’occasion d’une réunion de famille il y a quelques années, Roby a redécouvert le casse-tête et en a aussitôt apprécié l’effet relaxant. «Je me suis sentie vraiment bien, complètement détendue», se remémore-t-elle.
Roby Breen souffre d’anxiété et quand l’inquiétude devient trop écrasante, elle passe un peu de temps devant un casse-tête avant de se mettre au lit. «C’est une façon de faire taire des pensées superflues», explique-t-elle. Et ça marche, si bien que, pendant un temps, se pencher sur un casse-tête a fait partie de son rituel quotidien.
D’après Susan Vandermorris, neuropsychologue clinicienne à Toronto, tous les casse-tête sont bons pour le cerveau. Elle insiste sur les bienfaits de cette activité pour soulager le stress. «Se consacrer à un casse-tête dans ce monde hyperconnecté revient à se mettre entre parenthèses pour plonger dans une tâche immersive, loin des interruptions et des tensions de la vie quotidienne», dit-elle.
Le casse-tête nous oblige à décoder une information visuelle complexe et à résoudre des défis logiques, explique Susan Vandermorris. «Le cerveau est en activité, et tout ce qui nous fait apprendre est bon pour la santé.» Faire un casse-tête en compagnie est encore plus bénéfique, estime la neuropsychologue. «À plusieurs, l’engagement cognitif qui maintient le cerveau actif et l’engagement social sont réunis. La conversation est une activité cognitive complexe.»
Le casse-tête est aussi l’occasion de développer des liens intergénérationnels, aujourd’hui si rares. «Encouragez vos adolescents à éteindre leur téléphone pour faire un casse-tête avec grand-maman et vous susciterez une de ces belles interactions familiales si difficiles à organiser de nos jours.»
Ma longue histoire d’amour avec les casse-tête a commencé avec les formes en bois que ma mère empruntait à la bibliothèque et que j’assemblais par terre dans le salon, à Thompson, au Manitoba. On offrait souvent des casse-tête à Noël, quand nous étions enfants et, pendant quelques jours, toute la famille s’y mettait sur la table de la salle à manger. C’est là une note nostalgique qui contribue certainement à mon engouement actuel.
Ces derniers mois, les casse-tête ont eu de salutaires effets thérapeutiques. Les soirs d’ennui, assembler ces petites pièces a fait plus que m’aider à passer le temps. J’y ai trouvé un sentiment de confiance et un but les jours où j’avais l’impression de n’en avoir aucun. J’aime cette activité et j’ai hâte de m’y remettre quand je rentre à la maison. La vie n’est peut-être pas parfaite, mais trouver la bonne pièce pour mon casse-tête me comble.
Comment réussir un casse-tête
- On peut se procurer des casse-tête dans les boutiques de jouets, les librairies, les grands magasins ou en ligne.
- Choisissez une image qui vous plaît et tenez compte du sujet et de la couleur – vous allez y passer beaucoup de temps.
- Installez le casse-tête là où vous pourrez vous asseoir confortablement pendant de longues séances. Si vous manquez de place, roulez-le dans un tapis de casse-tête quand vous n’y travaillez pas.
- Invitez vos amis et la famille. Un casse-tête en cours d’assemblage est une bonne façon d’occuper vos hôtes.
- Un casse-tête est toujours un beau cadeau. Cherchez une image qui tienne compte des goûts de la personne à qui vous souhaitez l’offrir.
- Pour ajouter à la difficulté, lancez-vous dans un casse-tête tout en dégradés, sans image.
- Quand vous avez terminé un casse-tête, offrez-le à des amis.
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