Comment s’entendre avec tout le monde, réellement?
Invitée à une fête prénatale, j’échangeais poliment des banalités avec des convives quand ma journée a brusquement été gâchée. «Oh, tu es enceinte?», a demandé une amie de la famille en me regardant de haut en bas. J’ai hoché la tête d’un air penaud, regrettant aussitôt ma petite robe cocktail et mon assiette remplie de canapés. J’étais persuadée que la conversation ne pouvait aller plus loin dans l’horreur, mais cette personne a ajouté avec le plus grand sérieux: «Eh bien, pourquoi pas?»
La tête pourtant pleine de bonnes reparties – «juste un peu d’embonpoint, merci», mes doutes profondément ancrés sur ma capacité d’être mère, la peur du changement climatique ou pourquoi pas un juron bien mérité –, malheureusement, rien de tout cela ne s’est matérialisé. J’ai murmuré quelques mots sur le travail qui m’accaparait avant de m’excuser pour aller broyer du noir tout l’après-midi.
Je m’en suis remise, bien sûr, mais je revis parfois la scène avec une réponse bien tournée. Comment réagir à la question indiscrète d’une personne mal élevée? Et que dire de tous ces gens provocateurs à qui il faut parler, qu’on en ait envie ou non? En prévision de la période des fêtes, j’ai invité des spécialistes à nous expliquer comment se comporter avec ces personnalités difficiles, ringardes, méchantes et exaspérantes, sans prononcer un seul gros mot.
Avez-vous une relation à sens unique? Voici 8 signaux d’alarme à reconnaître.
Le critiqueux
Vous connaissez la chanson: «Le restaurant est trop cher, la musique est trop forte, le hamburger est trop cuit et de toute façon, comme je couve quelque chose, ça n’a pas de goût.» Dans la vraie vie, une personne qui se plaint sans arrêt, ça n’a rien de drôle. «Elle se croit victime d’une injustice», explique Jody Carrington, psychologue à Olds, en Alberta. Un simple hamburger ne peut pas être la cause d’une telle déception, c’est autre chose qui la déprime et qui est projetée sur ce qu’elle a dans son assiette (ou sur autrui: pensons au pauvre serveur).
Comment doit-on se comporter avec ces rabat-joie? «Pour faciliter l’échange, rien de mieux que l’empathie», suggère la psychologue. (C’est vrai pour tous les gens difficiles, mais particulièrement les râleurs.) Éliminez de l’équation ce qui est sans importance – laissez au râleur le choix du restaurant, par exemple – et concentrez-vous sur l’essentiel. Faites-le parler de ce qui le dérange vraiment et posez-lui des questions sur ce qui le rend heureux, lui fait plaisir ou l’allume dans la vie. C’est un bon moyen de contrer sa négativité. «Soyez très gentil en espérant que ça déteigne», résume Jody Carrington.
Le contradicteur
Vous dites qu’il fait beau, il répond qu’il fait chaud. Vous avez terminé un bon bouquin; il n’a rien lu d’aussi ennuyeux en 10 ans. Vous faites remarquer qu’il vous contredit systématiquement; «Non, pas du tout!»
«Le contradicteur aime débattre, explique la journaliste Mónica Guzmán, de Seattle, dans l’État américain de Washington. C’est parfois amusant, mais ça peut aussi être agressif et désagréable. Il ne sait pas toujours faire la différence.» Quand vous débattez d’un problème précis, il discute pour le plaisir de la dispute – et gagne à tout coup.
Comment affronter ce genre d’adversaire? Le contradicteur veut croiser le fer, alors choisissez-en les termes. Pour tout ce qui est sans importance, explique Ian Leslie, spécialiste du débat à Londres, en Angleterre, «rien de plus désarmant, pour le contradicteur, que de lui dire que vous êtes d’accord avec lui».
Il ne s’agit pas de mentir. «Je suis d’accord avec toi» s’applique à un élément précis et sans grande importance de la conversation. «Je comprends parfaitement ton point de vue» est une bonne réaction quand vous n’êtes pas d’accord. Puis changez de sujet.
Quand vous voulez vraiment défendre votre point de vue, soyez plus nuancé et entraînez le contradicteur au-delà de sa défense habituelle. «Le bras de fer sur les opinions cède parfois quand on l’interroge sur son histoire ou son expérience dans la matière en discussion», conseille Mónica Guzmán. En demandant par exemple «Qu’est-ce qui t’a amené à croire ça?» ou «Ça t’est déjà arrivé?», la conversation passera du concours d’opinions à une discussion plus personnelle. Vous pourriez même découvrir que vous appréciez ce qu’il pense.
Ressentez-vous le besoin de plaire à tout le monde? Voici comment fixer des limites saines.
La pipelette
Si vous n’arrivez jamais à terminer une phrase ou à raconter une histoire, vous êtes sans doute face à une pipelette. C’est mignon comme mot, mais il désigne le plus souvent une personne qui peut se montrer assez irritante, explique Sandy Gerber, spécialiste en communication dans l’île de Vancouver, en Colombie-Britannique. «Les pipelettes, ajoute-t-elle, sont des voleurs, qui s’identifient à ce que vous racontez, puis se mettent à parler d’eux-mêmes.»
La pipelette donne l’impression de vouloir essayer de marquer un point, ce qui n’est pas toujours le cas. À la vérité, elle souffre d’anxiété sociale, a du mal à supporter le silence, ou elle est simplement de nature passionnée et enthousiaste. Quelle qu’en soit la raison, elle est logorrhéique sans s’en rendre compte et sans savoir pourquoi.
«La pipelette cherche à établir le contact, surtout chez les enfants, note Jody Carrington. C’est leur souhait le plus cher, mais comme elle ne vous donne pas la chance de réagir, elle est encore plus bavarde.» Et parce qu’elle discute à toute vitesse dans un monologue fastidieux, vous prendrez conscience seulement plus tard, quand l’irritation vous aura gagné sur le chemin du retour, qu’elle a détourné toutes vos histoires.
La prochaine fois, tentez une réaction inattendue: «Et ensuite?» La psychologue suggère de choisir un sujet et de la laisser l’épuiser. «Posez-lui des questions, suivez son discours et écoutez attentivement.» Quand elle aura épuisé son répertoire, son besoin d’être écoutée a été satisfait et c’est à vous. Profitez-en pour dire: «J’adore tes histoires et j’en ai une pour toi.» Pour une fois, vous aurez la parole.
L’accro aux technologies
Quoi de plus ennuyeux qu’une personne qui a les yeux rivés sur l’écran de son téléphone alors que vous êtes en conversation avec elle. Rapidement sur la défensive, explique Jody Carrington, vous vous dites: Je l’ennuie, je ne l’intéresse pas, elle se fout de moi, mais ce n’est pas forcément le cas. Voici en revanche, ajoute la psychologue, ce qui est vrai: «Si on avait une vraie discussion, tu serais moins intéressé par ton téléphone.» Ouille.
Que vous le lui fassiez remarquer ou non, n’oubliez jamais que les mauvaises habitudes de l’accro de la technologie n’ont rien à voir avec vous. «C’est assurément grossier, confirme Ian Leslie, mais le comportement traduit parfois une certaine nervosité, une anxiété.» Qui sait si son conjoint n’a pas eu une crevaison, ou que son enfant est malade? En réalité, vous ne le savez pas.
Avant de bouillir intérieurement contre son impolitesse flagrante, cherchez donc un moyen de rendre la conversation plus agréable et oubliez ce qui se passe sur Instagram.
Ça donne parfois des résultats, malgré la puissance du piège à clics contemporain. Si vous êtes suffisamment familier avec votre interlocuteur, Jody Carrington suggère de lui demander carrément: «Qu’y a-t-il de si intéressant là-dessus?» Cela pourrait l’inciter à vous présenter ses excuses avant de ranger d’un air penaud son téléphone. (S’il y a une vraie réponse à la question, parlez-en.)
Encore mieux, parez à cette éventualité. «On a pas mal de rattrapage à faire. Et si on laissait nos téléphones dans la voiture?» Si c’est vraiment une crevaison ou un enfant malade, vous saurez que ce n’est pas votre conversation qui l’ennuie.
L’adversaire politique
Aïe. Sur le plan idéologique, vous êtes à des années-lumière. Il a lu les journaux (ou consulté le Dark Web) et, comme d’habitude, il est impatient d’en venir aux mains.
Je ne connais pas de familles à l’abri de différends politiques, bien que le cas de Mónica Guzmán soit particulièrement complexe: elle est la fille libérale (au sens politique) d’immigrants mexicains qui ont voté deux fois Donald Trump et veulent bien sûr débattre de leur divergence politique au moment du dessert.
Comme le contradicteur, l’adversaire politique adore la discussion, et celle-ci n’a qu’un but: vous faire changer d’idée. Eux, ils n’en changeront pas, et vous non plus parce que vous êtes également passionnément convaincus – c’est d’ailleurs précisément pour cela que vous avez été choisi pour la discussion. Au secours.
C’est un mal pour un bien, car ça signifie que vous êtes considéré comme un adversaire intellectuel digne d’estime dont votre interlocuteur ne peut se passer pour exister. «S’il est votre adversaire, vous êtes sans doute le sien aussi», note Mme Guzmán.
Autrefois, politique et religion étaient des sujets interdits dans une conversation courtoise. Ce n’est plus le cas, et c’est tant mieux. «Il est bon de trouver un peu de passion dans les échanges, insiste Mónica Guzmán. C’est l’occasion de se frotter à des points de vue différents, de découvrir l’autre et de se lancer des défis.»
Ian Leslie acquiesce: «Ces conversations qui ont l’apparence de disputes permettent à de nombreux couples et familles de s’épanouir. Il s’agit de favoriser les discussions riches et productives et surtout pas de les éviter.»
Comment échapper aux querelles inutiles? «Il ne faut pas en arriver au conflit personnel», explique Ian Leslie. Si vous sentez que la conversation s’emballe, mettez la pédale douce. Si votre interlocuteur se fâche ou devient agressif, essayez la méthode de désescalade de conflit de Mónica Guzmán: «Pardon, j’ignorais que c’était si important pour toi.» Vous pouvez même enchaîner avec «Dis-m’en un peu plus», si une conversation plus productive semble possible.
Mais si la discussion est trop passionnée, la manœuvre de distraction reste une excellente stratégie de sortie. «Il est temps de servir la tarte! Pommes ou abricots?» (Tout le monde s’accorde sur la tarte.)
Le blagueur déplacé
Toutes les familles on le leur, appelons-le «mononcle Marcel». Il est bruyant et lourd, il n’a jamais oublié les années 1980 et pendant que vous passez le plat de purée, il trouve le moyen de balancer un mot ou une blague complètement inappropriée.
Ses impairs peuvent s’expliquer. «Il ne se rend pas compte que c’est gênant, voire blessant, ou il cherche la controverse. Il se peut aussi qu’il ne supporte pas le point de vue d’autrui», explique Chuck Wisner, conseiller de direction et coach personnel à Manchester dans le Massachusetts. Aucune de ces explications ne justifie la discrimination.
Mais voilà, disons, que c’est gênant. Faut-il se contenter de glousser pour préserver la paix ou faire une scène et s’en prendre à mononcle Marcel pour sa «blague» (raciste, sexiste, élitiste, homophobe)? Bien sûr, ça dépend. «En présence d’une personnalité pareille, il vaut mieux intervenir», estime Mónica Guzmán. Il faut réagir pour défendre la dignité de la personne offensée et éviter le sentiment de culpabilité éternelle du spectateur silencieux – attitude souvent aussi blessante que la blague elle-même.
Mais traiter mononcle Marcel de raciste ou exiger qu’il change immédiatement de comportement (il ne le fera pas) ne donne rien. «Mononcle Marcel, ça ne se fait pas», propose Mme Guzmán. La phrase exprime en quelques mots ce que tout le monde pense. De son côté, M. Wisner suggère plutôt: «Ces propos me semblent plutôt racistes. Je sais que tu ne le penses pas.» Le blagueur déplacé n’osera pas ajouter: «Oui, en fait, je suis très raciste.»
Si la remarque incendiaire déclenche un débat, critiquez la présumée blague et non la personne et précisez que c’est vous qui énoncez la critique. «Pour moi, cette blague est offensante et je vais te dire pourquoi», est une bonne façon d’aborder le sujet, juge Chuck Wisner. Réservez la conversation à plus tard, quand Marcel sera seul et calme et que vous aurez du temps pour un échange non conflictuel sur l’enjeu véritable. «Dans toutes les mauvaises blagues, il y a un sous-entendu: Je suis frustré et je ne peux pas le dire», explique Mónica Guzmán. Si vous arrivez à persuader Marcel de l’exprimer, il se comportera mieux aux prochaines retrouvailles familiales.
Apprenez-en plus sur ces 31 comportements toxiques (que l’on croit bons).
La diva
«C’est la pipelette sur stéroïdes», selon Jody Carrington. La diva domine la conversation tout en vous rabâchant les oreilles sur les événements délirants et incroyables qu’elle a vécus durant la «Pire. Semaine. De toute mon existence!» (Absolument rien à voir avec les détails ennuyeux qui ont ponctué votre semaine, alors n’essayez même pas.)
À quoi est-ce dû ? «La diva exagère tout le temps pour être au centre de l’attention», affirme Sandy Gerber. À force de s’imposer, elle fait le vide et les gens s’éloignent de cet excès d’émotions qui témoigne d’une vie constamment en crise.
«On a tendance à l’éviter, car il faut une énergie considérable pour supporter le drame», explique Mme Carrington. «Par conséquent, elle en rajoute. Elle épuise son entourage, ce qui nourrit son sens du drame.» Elle cherche désespérément à retenir votre attention et redoute de la perdre, d’où le spectacle qu’elle livre dans l’espoir de ne jamais cesser d’attirer votre regard.
S’attend-elle pour autant à un traitement royal? Pas vraiment. Au fond, elle cherche à se rassurer, veut savoir si vous accepteriez de la retrouver autour d’un bon repas sans qu’elle ait à afficher tout ce spectacle. Résistez à l’envie de la rejeter et établissez plutôt des limites que vous respecterez tous les deux.
«Exprimez clairement ce que vous êtes prêt ou non à faire», dit Jody Carrington. Ça peut se traduire par une discussion de 20 minutes sur son ex, mais pas une seconde de plus. Ou même le report d’une semaine de votre déjeuner, «quand tu te sentiras mieux». La diva sera vexée sur le coup, mais sachez que ce genre de personne aime secrètement être traitée comme tout le monde, preuve qu’on tient à elle – sans drame.
L’ami-ennemi
Nous venons de faire état de personnalités difficiles, mais celle qui remporte la palme est incontestablement l’ami-ennemi – ami et ennemi à parts égales –, un phénomène si subtil et complexe qu’il faut parfois se trouver dans la situation pour le comprendre. «C’est l’amitié en balançoire parce qu’elle est faite de hauts et de bas et qu’on ne sait jamais à quoi s’attendre», explique Sandy Gerber. Un jour, votre ami est drôle, formidable, et c’est un régal de passer du temps en sa compagnie; la fois suivante, il est de mauvaise humeur ou méchant. «L’ami-ennemi est une personne que le manque d’estime de soi rend passive-agressive, poursuit Mme Gerber. Elle critique tout ce que vous avez fait qui pourrait lui donner le sentiment d’être dévalorisée.» Pour regagner un peu de confiance, l’ami-ennemi a besoin à l’occasion de vous dévaloriser.
On se protège d’un ami-ennemi en identifiant le jugement négatif sans y voir une attaque personnelle. «Il vous envoie une flèche, explique Chuck Wisner. Vous pouvez l’esquiver, la laisser vous transpercer et en rester blessé ou offensé, ou la saisir pour l’empêcher de poursuivre sa route.» Les deux premières attitudes sont faciles sur le moment, mais si vous voulez que ça change c’est la dernière qui est la plus courageuse. Pour entamer une conversation difficile, M. Wisner recommande de dire : «Je ne te crois pas. Tu le penses vraiment?»
C’est une réaction à un coup précis, mais si vous voulez réparer et sauver votre amitié – mais vous ne le souhaitez peut-être pas – il faudra creuser davantage. «Les amis-ennemis sont en apparence très compétitifs mais, au fond, ce sont des gens blessés, peu sûrs d’eux et très méfiants», explique Sandy Gerber. Pour qu’un ami-ennemi devienne un véritable ami, il faut s’ouvrir et en parler. «Dites-lui ce que vous cherchez dans une amitié et ce que vous êtes disposé à offrir. S’il ne veut pas l’entendre ou s’il refuse d’avoir cette conversation, vous avez la réponse.»
Le sans-filtre
Le commentaire non sollicité sur la vie sexuelle d’un tiers et les détails du divorce difficile de son meilleur ami ou sur ce qui vient de se passer aux toilettes (beurk) sont autant d’indices que vous êtes en présence d’un sans-gêne. C’est assez répandu et ce personnage qui n’a ni filtre ni limite raconte sa vie intime ou pose des questions qui vous mettent dans l’embarras.
Mais quelle idée saugrenue de dresser la liste des symptômes du syndrome de l’intestin irritable pendant le déjeuner? En réalité, il a deux qualités particulières qui se chevauchent. La première: la frontière de son intimité est très, très éloignée de la vôtre. «Vous avez des standards différents sur les sujets de conversation acceptables et c’est ce qui vous met mal à l’aise, dit Chuck Wisner. Vous n’avez pas les mêmes critères pour déterminer ce qui peut être partagé.» En même temps, il cherche uniquement à s’approcher de l’autre en se dévoilant davantage – dans l’espoir qu’on fera de même. «Nous sommes enclins à trouver ces gens indiscrets, envahissants ou grossiers, note Sandy Gerber. En fait, ils ont seulement envie d’être aimés et acceptés.»
Pour satisfaire le sans-gêne et, dans la foulée, mettre un frein au commentaire interminable, partagez autre chose – de tout aussi personnel, mais idéalement moins intrusif. Cela devrait soulager son besoin d’entrer en relation. Quand ça va trop loin, n’hésitez pas à signifier clairement que la limite a été franchie. «Arrête, c’est une affaire privée!» résume parfaitement la situation et vous n’aurez pas à revenir sur le sujet.
Le compliment fait des merveilles chez un sans-gêne, ajoute Mme Gerber, parce qu’il recentre la conversation sur lui tout en rétablissant avec subtilité vos limites. J’aurais pu, par exemple, offrir cette réponse avisée à l’amie trop curieuse de ma famille qui demandait des nouvelles de mon utérus: «Avoir des enfants ressemble à une vraie partie de plaisir pour toi! Comment tu fais?» (Puis faire un signe de tête et sourire.)
Je ne pourrai pas rejouer la scène de la fête prénatale dans cette vie, mais la prochaine fois, je serai prête à affronter un sans-filtre – ou une autre de ces personnalités difficiles qui font aussi partie du monde.
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J’aime bien qu’on souligne la qualité d’un livre papier dans la langue de l’informatique. Si le livre numérique est proposé avec une «suite d’outils de navigation», mine de rien, le pouce et l’index constituent le meilleur dispositif de navigation qui soit. À eux deux, ils permettent de tourner les pages dans un sens ou dans l’autre. Et dire qu’ils étaient là, discrets, pendant au bout du bras. Les adeptes du livre numérique vantent le côté pratique de l’outil de «recherche». En revanche, les livres à l’ancienne ont aussi leur fonction «recherche» où il suffit de revenir au premier chapitre pour retrouver le nom de famille du héros. Ils ont même droit à une «fonction de signet» avec la bande souple qu’on appelle le «marque-page».
Le livre traditionnel offre-t-il toutes les fonctionnalités du livre numérique? Hélas, non. Il lui manque la «barre de progression» indiquant le pourcentage lu du livre. Il est heureusement possible de «pirater» cet outil: placez votre (vrai) livre ouvert de manière à voir la tranche de queue ou regardez-le en contre-plongée. Il se forme naturellement deux blocs qui se rejoignent au centre (le «dos»). Si la partie gauche est plus épaisse que la droite, c’est que vous avez lu plus de la moitié du livre.
Les inconditionnels du eBook soutiennent que le texte numérique est plus facile à annoter. Sur certains appareils, un petit crayon s’affiche à l’écran pour guider le lecteur dans sa démarche. Les adeptes de la lecture à l’ancienne ont un système comparable appelé le «crayon». Il permet de souligner les passages qu’ils préfèrent ou, si c’est un livre d’histoire, d’inscrire à la marge un commentaire qui ne s’en laisse pas imposer du genre: «Pas suivant Histoire du déclin et de la chute de l’Empire romain.»
Ainsi annotés, ces livres laissés aux autres pour consultation sauront convaincre de votre acuité intellectuelle.
Il faut convenir que le livre numérique est plus léger, mais est-ce vraiment un avantage? Dans mon cas, le transport quotidien de manuels de science a façonné ma silhouette. Glissés dans le sac à dos, ces ouvrages lourds dégagent les épaules et font bomber le torse. L’école a fait office de terrain d’entraînement militaire pour mes camarades et moi.
À la recherche de votre prochaine lecture? Voici 23 classiques à lire (ou à relire!).
De nombreux bienfaits pour le livre «traditionnel»
Le livre imprimé a bien sûr d’autres avantages. Une étagère remplie de bouquins sert autant l’acoustique qu’elle rend visible l’ampleur du savoir. En tombant, un livre bien écorné s’ouvrira invariablement sur la scène la plus sexy.
Marie Kondo, la gourou du rangement, ne conserve jamais plus de 30 livres chez elle. Ceux qui adoptent sa méthode ont sans doute un intérieur moins encombré, mais une bibliothèque remplie reste plus éloquente. C’est la cartographie de votre vie de lecteur: les passions qui n’ont eu qu’un temps et celles qui ont duré; les livres qui vous ont fait découvrir d’autres livres, un peu comme des amis dans les soirées; et ceux qui vous ont soutenus dans les moments difficiles.
Et que dire de l’odeur des vieux livres dans une librairie d’occasion? Oui, c’est un mélange de moisissure et de vieux papier, mais pour moi, c’est une réserve de surprises. Passez une heure à écumer les rayons et vous tomberez forcément sur un livre épuisé que vous ne pensiez jamais trouver.
En matière d’éducation, les modes vont et viennent et il se peut que le retour au livre papier ne dure pas. Pour le moment, je suis au garde-à-vous, les épaules droites fortifiées par les manuels scolaires, saluant leur retour glorieux.
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Il y a huit ans, avec deux douzaines d’autres médecins et de chercheurs, le neurologue Dan Gibbs examinait les images d’un cerveau. Pas n’importe lequel: le sien. Elles devaient répondre une fois pour toutes à une question qu’il se posait depuis des années: qu’est-ce que j’ai?
Les premiers symptômes s’étaient manifestés lorsqu’il avait 55 ans, à Portland, en Oregon. Il ne percevait plus certaines odeurs, celles des fleurs notamment. Puis, il s’était mis à sentir des odeurs fantômes, du pain qui cuit, du parfum ou encore des agrumes. Il avait accidentellement eu un indice sur la cause possible après un test d’ADN maison qui devait lui en apprendre davantage sur son arbre généalogique. Les résultats avaient révélé qu’il possédait deux copies du gène APOE4, marqueur d’un risque plus élevé de la maladie d’Alzheimer. Cela l’avait secoué; il ne lui était jamais venu à l’idée qu’il pourrait en être victime.
À l’époque, sa mémoire n’était pas atteinte, mais les années suivantes quelques signes ont apparu: il oubliait le nom de ses collègues, n’arrivait pas à retenir le nouveau numéro de téléphone du bureau. Il s’est alors inscrit à une étude de l’université de la Californie à San Francisco sur le diagnostic de la maladie d’Alzheimer.
Ce sont les résultats qu’il attendait donc ce jour-là avec ses collègues. Les images montraient des plaques amyloïdes logées à divers endroits de son cerveau, dont le cortex préfrontal, qui régit le sens olfactif. C’était la preuve d’une phase précoce de la maladie d’Alzheimer. Curieusement, Dan Gibbs s’en est réjoui: «Quand on m’a montré les images, j’ai été soulagé d’être enfin fixé.»
Connaissez-vous les types d’oublis les plus liés à la maladie d’Alzheimer?
Qu’entend-on par «démence» ?
«Démence» est un terme générique qui désigne une série de symptômes entraînant une dégradation de la mémoire, de la réflexion, du raisonnement et du comportement en société. Elle s’aggrave avec le temps, au point que certaines victimes ont besoin de soins constants en fin de vie.
Cinquante-cinq millions de personnes dans le monde souffrent de démence, dont 5,8 millions aux États-Unis et presque 600 000 au Canada. Si seulement 1% des aînés de 65 à 69 ans en sont atteints, le risque double tous les cinq ans entre 65 et 84 ans et, passé 85 ans, une personne sur quatre est touchée.
Des percées annoncées cette année dans le diagnostic et le traitement nourrissent heureusement de nouveaux espoirs. «Il y a vraiment de quoi être optimiste, se réjouit le Dr Don Weaver, directeur et chercheur principal de l’Institut Krembil pour la recherche du réseau universitaire de santé de Toronto, au Canada. La recherche avance plus vite que jamais auparavant.» De nouveaux traitements sont prêts, des tests révolutionnaires sont en voie de développement, et ce n’est pas fini.
Parmi la douzaine de formes que peut prendre la démence, la plus courante est la maladie d’Alzheimer, qui rend compte de 60% à 70% des cas. Si la cause exacte de cette maladie n’est pas encore bien établie, les dysfonctionnements de deux protéines spécifiques du cerveau ont retenu l’attention. La première, appelée bêta-amyloïde, est présente dans tout le système nerveux central, mais dans un cerveau atteint d’Alzheimer, elle n’est pas correctement clivée et forme entre les neurones des agrégats appelés plaques amyloïdes qui perturbent le fonctionnement des cellules.
La deuxième molécule est la protéine tau qui se trouve pour l’essentiel dans les neurones et contribue au transport des nutriments. Chez les alzheimeriens, elle s’accumule et s’«entortille» à l’intérieur des cellules. Les dépôts de ces deux protéines entravent les échanges entre les neurones cérébraux, ce qui finit par les tuer, altérant la mémoire et la pensée du malade.
Il y a d’autres types de démence. La démence à corps de Lewy est causée par des dépôts protéiniques, appelés corps de Lewy, qui affectent la pensée, la mémoire et la mobilité. La démence vasculaire est déclenchée par un AVC ou une lésion vasculaire qui réduisent l’apport de sang et d’oxygène au cerveau. Et la démence fronto-temporale résulte d’une atrophie des lobes frontaux et temporaux. Elle peut frapper dès la quarantaine; on en a beaucoup parlé plus tôt cette année après l’annonce que l’acteur Bruce Willis en était atteint à l’âge de 67 ans.
De nouveaux médicaments contre la maladie d’Alzheimer
Pendant des décennies, le traitement de la démence a fait un frustrant surplace. Deux classes de médicaments remontant à trois décennies atténuent les symptômes: les inhibiteurs de la cholinestérase stimulent la sécrétion d’acétylcholine, molécule nécessaire à la vigilance, à la mémoire et au jugement; et la mémantine régule le glutamate, substance au rôle crucial dans l’apprentissage et la mémorisation. Mais aucune de ces médications ne freine la maladie. L’aducanumab en usage depuis deux ans peut réduire la formation des plaques amyloïdes dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer; toutefois, rien ne prouve qu’il ralentisse le déclin cognitif.
Mais voilà que des années de recherche portent de nouveaux fruits et nous placent au seuil de progrès majeurs dans la prévention et le traitement.
«Les nouveaux médicaments sont une énorme et prometteuse percée», affirme Gill Livingston, professeur de psychiatrie gériatrique à l’University College de Londres et chef du comité permanent sur la prévention et le traitement de la démence de la revue The Lancet, même si elle précise qu’il est encore tôt et que la route est semée d’embûches.
En janvier dernier, la FDA, organisme américain qui réglemente les produits alimentaires et pharmaceutiques, a homologué le premier médicament qui ralentit la maladie d’Alzheimer au lieu de simplement en atténuer les symptômes. (La FDA est souvent la première à donner son aval à un médicament qui sera par la suite autorisé dans des pays comme le Royaume-Uni et le Canada.)
Lors des essais cliniques, les alzheimeriens qui avaient pris du lecanemab (Leqembi) pendant 18 mois ont subi une perte de mémoire et de cognition inférieure de 27% à celle des sujets qui étaient sous placebo. Mais est-ce que cela se répercute dans la vie courante? Voilà qui n’est pas encore clair. «Nous devons savoir ce que ça signifie dans la vie d’une personne atteinte de démence. Ce qu’il faut viser, c’est une amélioration fonctionnelle», explique le Dr Roger Wong, professeur clinicien de médecine gériatrique à l’université de Colombie-Britannique à Vancouver, au Canada.
Ajoutons que ce nouveau médicament doit être administré par intraveineuse, coûte très cher et peut avoir des effets indésirables graves dont une hémorragie cérébrale.
Un autre produit, le donanemab, n’a pas encore reçu la caution de la FDA, mais s’est révélé prometteur lors des essais cliniques. Il ralentit d’environ un tiers le déclin cognitif des alzheimeriens, mais peut lui aussi avoir des effets indésirables graves. «Nous ne sommes donc pas au bout de la route, mais nous sentons bien que nous avançons», se réjouit Gill Livingston.
Saviez-vous que le thé et café réduisent le risque de démence?
Des avancées majeures dans la prévention
Depuis quelques années, nous en savons beaucoup plus sur les façons de prévenir la démence et notamment, de traiter ses causes. «Nous avons enfin cerné les facteurs de risque et nous y accordons plus d’attention», dit le Dr Don Weaver, directeur et chercheur principal de l’Institut Krembil pour la recherche du réseau universitaire de santé de Toronto.
D’après un rapport dirigé par Gill Livingston et publié en 2020 dans The Lancet, 40% des cas de démence sont évitables. Le danger numéro un, c’est la malentendance, car elle affecte les interactions avec autrui et vous isole. «Cela nous a beaucoup surpris. Et c’est un risque réversible puisqu’on peut corriger le problème avec des prothèses.»
Les contacts sociaux sont un autre élément clé du mode de vie, ajoute Mme Livingston. « Parler aux autres stimule le cerveau, le fait travailler parce qu’on doit entrer en contact, réfléchir. »
Faire 150 minutes d’exercice par semaine, c’est bon pour le cœur et, par suite, pour le cerveau. Un travail stimulant est un autre atout, tout comme un niveau d’instruction supérieur parce que ça augmente ce qu’on appelle la réserve cognitive dans laquelle on puise lorsque les facultés diminuent. Traiter la dépression a aussi son importance.
Enfin, il y a ce qu’il faut éviter: le tabac et la pollution de l’air aggravent le risque de même que les traumatismes crâniens, l’alcool en grande quantité, l’hypertension, le diabète et l’obésité. «Nous savons à présent que, pour beaucoup de gens, la démence n’est pas une fatalité.»
Consultez notre section Prévention sur notre site web afin d’en savoir plus sur les manières de prévenir les maladies!
Un diagnostic plus sûr grâce aux analyses sanguines
Les progrès diagnostiques sont tout aussi importants que ceux de la médication. Toute une série de tests sanguins de la maladie d’Alzheimer, déjà largement utilisés dans le cadre d’essais cliniques, seront à la disposition du public avant la fin de 2023, selon Gil Rabinovici, professeur de neurologie et de radiologie qui dirige le centre de recherche sur la maladie d’Alzheimer de l’université de la Californie à San Francisco. «Les tests sanguins et traitements qui s’en viennent vont métamorphoser la pratique et les soins offerts aux personnes souffrant d’une perte de mémoire.»
À l’heure actuelle, les médecins diagnostiquent la maladie d’Alzheimer par divers moyens –symptômes, antécédents familiaux, bilan de santé, imagerie cérébrale. Ils font aussi passer des tests cognitifs, demandant par exemple au patient de mémoriser une liste de mots, de dessiner une horloge ou de nommer le plus d’animaux possible. Jusque-là, le diagnostic dépend donc pratiquement de l’expertise du médecin, explique Gil Rabinovici. Ce qui manque, c’est un marqueur biologique direct et concluant de la maladie.
Don Weaver partage le même avis. «Ce n’est pas comme la polyarthrite rhumatoïde détectable par test sanguin, ou la pneumonie qui l’est par radiographie.» Une étude de 2012 constatait d’ailleurs déjà qu’environ 30% des sujets qui avaient reçu un diagnostic clinique de maladie d’Alzheimer s’en étaient révélés exempts après autopsie. L’étude portait sur des cas légers à modérés de démence, mais selon Gil Rabinovici, chez les personnes légèrement atteintes, le diagnostic, plus délicat en soi, serait encore moins sûr.
Dans certains cas, il s’agirait plutôt d’une démence vasculaire ou à corps de Lewy, mais dans d’autres, les symptômes pourraient avoir des causes curables comme un trouble du sommeil dû à l’apnée, un trouble de l’humeur comme la dépression, ou encore des changements hormonaux. Les médicaments employés contre l’insomnie, l’incontinence ou même des allergies peuvent aussi altérer les fonctions cognitives, surtout chez les aînés.
Maintenant que des médicaments contre la maladie d’Alzheimer sont disponibles aux États-Unis, la sûreté du diagnostic médical devient cruciale pour le médecin qui doit prescrire. Elle permettra en outre au patient de décider en connaissance de cause s’il vaut mieux arrêter de travailler ou emménager dans une résidence offrant des soins, et à sa famille de planifier l’aide qu’elle lui apportera.
Selon Michelle Mielke, directrice du département d’épidémiologie et de prévention à l’école de médecine de l’université Wake Forest de Winston-Salem, en Caroline du Nord, un diagnostic plus précoce et plus précis que fournirait un test sanguin révolutionnerait le traitement. Les plaques apparaissent dans le cerveau une vingtaine d’années avant les symptômes, explique-t-elle, et les personnes qui en ont ne développent pas toutes des troubles cognitifs. Un jour viendra, prédit-elle, où «tout comme on mesure le cholestérol parce qu’il représente un risque de crise cardiaque et d’AVC, nous ferons à partir d’un certain âge un test de dépistage des protéines amyloïdes et tau du cerveau. Si leur niveau est inquiétant, nous pourrons prescrire des médicaments qui retarderont ou préviendront l’apparition des symptômes.»
En plus du café et du thé, un corps actif et une vision claire aident à prévenir la démence!
Enfin, on pense aux aidants
Prendre soin d’un proche atteint de démence peut être extrêmement éprouvant. Pendant longtemps, les besoins des aidants naturels ont pourtant été négligés. Leur combat est maintenant mieux. Un article paru dans Dialogues in Clinical Neuroscience en 2022 estime que, dans les pays avancés, jusqu’à 85% des aidants font une dépression et jusqu’à 45%, de l’anxiété.
Peu à peu, cependant, le soutien de proximité se développe. On pense à des initiatives comme les «cafés mémoire» où les aidants peuvent amener leur proche aidé pour prendre un café, participer à des activités, rencontrer des gens – bref, vivre un moment normal. Il y en a plus de 1200 dans le monde, dont environ 700 aux États-Unis, 40 au Canada, 90 au Royaume-Uni et une multitude partout en Europe. (La Société Alzheimer de votre région vous aidera à en trouver un près de chez vous.)
D’autres lieux publics comme les musées font leur part en organisant des journées destinées aux personnes atteintes de troubles cognitifs et à leurs accompagnateurs. Les sociétés Alzheimer de divers pays ont des programmes de soutien aux collectivités alliées des personnes atteintes de démence. Phoenix, en Arizona, est l’une des plus grandes parmi les douzaines de villes américaines devenues des alliées dans le cadre de l’initiative Dementia Friendly America.
Elle a augmenté le nombre de ses cafés mémoire et organise des conférences pour renseigner la population sur la démence et l’aide qu’on peut apporter aux malades. Son aéroport distribue des cordons à cactus verts aux personnes qui souffrent de démence ou d’autres handicaps invisibles pour que le personnel sache qu’elles ont peut-être besoin de plus d’attention.
Au Royaume-Uni, des centaines de collectivités offrent à leur personnel des formations sur la démence, placent des panneaux de signalisation clairs à la hauteur des yeux et décorent les portes vitrées pour les rendre plus visibles. Dans la ville d’Aberfeldy, en Écosse, le cinéma local propose des films qui peuvent convenir aux victimes de démence. La fédération britannique de football a approuvé le nouveau guide de la Société Alzheimer sur les clubs et centres sportifs adaptés aux personnes atteintes de démence. Le stade de Wembley deviendra leur premier allié national officiel au Royaume-Uni. L’objectif est de rendre plus agréable l’assistance à un match pour ceux et celles qui risquent de trouver l’ambiance désorientante et écrasante.
Paula Spencer Scott, de Fort Collins, au Colorado, sait d’expérience à quel point le rôle de l’aidant est dur. Elle a publié un ouvrage sur la question. Elle a pris soin de son beau-père atteint de démence. «C’est comme soignante à domicile que j’ai ressenti les émotions les plus vives de ma vie», avoue-t-elle. Pour tenir bon, son mari et elle avaient l’habitude de se dire: «Ce n’est pas lui, c’est la démence.» «Intellectuellement, on le sait, poursuit-elle, mais émotivement, on s’énerve, on s’enrage, puis on se sent coupable.»
Même si ça ne réglerait pas tout, il est de plus en plus question de dédommager les aidants naturels. Dans beaucoup d’États américains, par exemple, Medicaid est autorisé à rémunérer les enfants, les petits-enfants, parfois même les amis aidants des malades, et ils sont de plus en plus nombreux à rémunérer aussi le conjoint.
Le Royaume-Uni et le Canada offrent également un soutien financier: les Britanniques qui ont un faible revenu ont droit à une allocation, et le Canada accorde des allégements fiscaux.
Les programmes de soutien aux aidants naturels peuvent prévenir certains problèmes, mais les soignants bénévoles à temps plein ont souvent du mal à y accéder. Aussi l’information et l’aide sont-elles de plus en plus offertes en ligne afin que les aidants surchargés puissent se brancher chez eux au moment qui leur convient.
«L’attention croissante qu’on porte à la santé mentale et physique des aidants est une petite révolution, note Mme Scott. Depuis 10 ou 15 ans, c’est une véritable déferlante.» Elle tend à atténuer les préjugés sur la démence, soutient Dan Gibbs. «Je parle très franchement de ma maladie. Il y a quelques semaines, ma femme et moi avons assisté à la cinquantième réunion d’anciens de mon collège, et j’en ai discuté avec mes camarades. Parfois, je trouve que nous sommes trop timides avec les victimes de démence.»
Plus de clarté sur les causes de la démence
Depuis deux décennies, estime Don Weaver, on se focalise à l’excès sur les plaques amyloïdes. «Les nouveaux médicaments prouvent qu’elles jouent un rôle, mais elles sont une pièce seulement d’un immense casse-tête.»
Son labo étudie un autre facteur possible: l’inflammation. «Je vois la maladie d’Alzheimer comme une maladie auto-immune du cerveau, le système immunitaire y étant activé par toutes sortes de facteurs comme la pollution de l’air, la dépression ou des infections. Ce système surexcité se lance dans une mission de recherche et destruction, patrouille l’intérieur du crâne et, au passage, extermine quelques neurones, déclenchant une réaction inflammatoire.»
D’autres chercheurs explorent aussi des voies différentes, ajoute-t-il: dysfonctionnement des mitochondries qui fournissent leur énergie aux cellules du cerveau; distorsion des lipides du cerveau ; maladie de membranes dont l’altération peut tuer la cellule. Contre les autres causes possibles de la démence, on pense encore notamment à la greffe de cellules souches et à la stimulation magnétique transcrânienne.
Don Weaver n’oubliera jamais l’une de ses premières rencontres avec un patient dément, un ancien militaire. «Le pauvre homme était si désorienté qu’il se cachait sous son lit d’hôpital. Il revivait ses expériences de combat. Je me suis mis à quatre pattes et je l’ai regardé dans les yeux. C’était à vous briser le cœur. Je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose pour ces gens-là.»
Après les frustrantes décennies qu’il a passées depuis à annoncer à des milliers de patients qu’ils souffraient de démence, il est plus déterminé que jamais à pouvoir enfin leur dire: «J’ai quelque chose pour vous.»
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Avez-vous déjà remarqué ces petits chiffres écrits sur la branche de vos lunettes? Ces chiffres sont bien plus qu’une simple ordonnance. Connaitre leur signification peut s’avérer utile pour acheter une paire de lunettes en ligne… ou par simple curiosité.
Vous devez choisir vos prochaines lunettes? Voici ce que votre optométriste ne vous dit pas.
Que signifient les petits chiffres sur vos lunettes?
«Trois mesures différentes, présentées dans la forme AA-BB-CCC, se trouvent sur une monture», explique l’optométriste new-yorkais Jonathan Wolfe. Les chiffres qui représentent la forme AA correspondent à la mesure de la taille horizontale des verres. En d’autres mots, il s’agit de la largeur frontale de la lunette. Ce chiffre se situe généralement entre 42 et 58 mm. Plus la valeur est élevée, plus la monture est grande.
Le deuxième chiffre, qui incarne la forme BB, calcule «le pont», soit la distance entre la lentille gauche et droite. Ce chiffre est compris entre 16 et 24 mm.
Finalement, la forme CCC est la longueur des branches. La valeur se situe entre 130 et 150 mm. Plus votre tête est grande, plus ce nombre est élevé, afin que les lunettes puissent être bien ajustées sur votre visage.
En plus de ces trois chiffres, il est possible d’y apercevoir d’autres chiffres (ou lettres) gravés sur le côté. Ces informations constituent le modèle ou la couleur de la monture. Par exemple, sur l’image de cet article, les lettres «RB» désignent la marque Ray-Ban et le nombre «7159» représente le modèle.
Pourquoi est-il important de savoir tout cela?
«Les patients pensent souvent à tort que la taille des verres est fixe et que si celle de leurs lunettes actuelles est, par exemple, de 54 mm, ils ont besoin que leurs nouvelles montures soient du même chiffre», explique M. Wolfe. «Ce n’est pas nécessairement le cas, car les valeurs AA et BB interagissent entre elles.» Puisque la forme BB est incluse dans la forme AA (le «pont» faisant partie de la largeur frontale de la lunette), chaque valeur est dépendante de l’autre.
Tout le monde a des formes et des tailles différentes, c’est la même chose pour la dimension du visage. Une paire de lunettes qui convient à une personne peut ne pas être adéquate à une autre. Ces mesures permettent au client de trouver plus facilement une paire de lunettes adaptée.
La forme de la lunette est également importante. «Par exemple, vous pouvez avoir un modèle très rectangulaire avec une largeur de 56 mm et une distance de 16 mm entre les lentilles», explique Wolfe. «Si vous souhaitez passer à un look plus rond, vous obtiendrez un ajustement similaire avec une monture dont la mesure frontale est de 50 mm, mais dont la distance entre les verres est de 18 mm. C’est pour cela qu’il est important de les essayer en personne.»
La plupart des gens utilisent uniquement la prescription optique lorsqu’ils veulent acheter une nouvelle paire de lunettes en ligne. Ne vous méprenez pas, la prescription est essentielle, mais il est tout aussi crucial de s’assurer que les montures s’adaptent adéquatement à votre visage. Bien que vous puissiez vous servir de ces tailles comme guide, chaque paire est différente.
Par conséquent, si vous souhaitez obtenir le meilleur choix possible, n’hésitez pas à demander des conseils à un professionnel de la vue.
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Ce que l’on mange ne fait pas qu’affecter notre poids, notre faim et notre énergie. Selon des études scientifiques récentes, les choix alimentaires ont d’importantes conséquences sur la santé physique et mentale. Une étude de 2022 souligne notamment le lien entre les aliments ultra-transformés et la dépression, alors qu’une autre étude parue dans l’European Journal of Human Genetics de 2020 révèle les conséquences d’une mauvaise alimentation sur les troubles de santé mentale chez les jeunes. La nourriture et notre comportement à l’égard de celle-ci peuvent affecter, entre autres, notre humeur et notre estime de soi. Elle devrait également nous inciter à prévenir les quatre habitudes suivantes qui sont nocives pour notre bien-être mental, comme le constate une diététicienne spécialisée dans le lien nourriture et équilibre psychologique.
En parlant d’aliments ultra-transformés, pourquoi la viande transformée est-elle mauvaise pour la santé?
Consommation trop grande de sucre
«Bien que le cerveau favorise le glucose comme source d’énergie, certaines études démontrent qu’un régime riche en sucre s’associe à de la mauvaise humeur et de la dépression», affirme la diététicienne Kitty Broilhier, propriétaire de NutriComm et créatrice du Eating Habits Lab. «Le sucre augmente l’inflammation dans le corps, qui à son tour joue sur la réponse mentale à un régime sucré. On peut identifier assez facilement les aliments sucrés de notre alimentation, mais il faut aussi examiner ce que l’on boit.»
Les boissons sucrées comme les sodas sont associés à de nombreux problèmes de santé, et notamment un risque accru de diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires et de stéatose hépatique. Elles nuisent même à votre santé neurologique: selon une étude de Frontiers of Psychiatry, la consommation régulière de boissons sucrées s’accompagne d’une hausse des problèmes psychologiques et comportementaux chez les adolescents, et de conséquences négatives sur la santé mentale des adultes.
Voici comment une alimentation trop riche en sucre transforme le cerveau.
Suivi d’un régime de tendance occidentale
Le sucre est un élément majeur de ce que des nutritionnistes professionnels appellent le régime américain standard (RAS). Une telle alimentation entraîne un régime débordant de graisses saturées et d’aliments raffinés ou transformés. Des recherches montrent que leur consommation augmente le risque de symptômes de dépression, selon la revue PLoS ONE.
Cependant, on ne peut nier le côté pratique de ces aliments. Passer en courant au service au volant est parfois nécessaire, en cas de faim et de régulation glycémique. Vous pouvez toujours tenter d’obtenir des repas pratiques sans exagérer les graisses saturées et les aliments raffinés.
Suivi de tout ce qu’on mange et boit
Compter les calories est un moyen classique pour essayer de perdre du poids et être en bonne santé, mais Mme Broilhier précise qu’une obsession des chiffres peut nuire à la santé mentale à la longue. «Faire un suivi est pratique, surtout lorsque vous adoptez une nouvelle habitude, ou essayez de vous débarrasser d’une autre qui est superflue. Mais en le faisant à trop long terme, cette habitude peut se transformer en obsession qui finit par vous gâcher l’existence.»
Mme Broilhier encourage ses nouveaux patients à faire un tel suivi au début; elle les invite ensuite à laisser tomber le suivi pour établir leurs propres limites et habitudes santé.
Alors plutôt que de compter, elle explique que de nombreux experts conseillent d’instaurer un équilibre entre les aliments sains de notre alimentation. Puis, de surveiller votre réaction en augmentant leur consommation.
Saviez-vous que manger sainement fait du bien, même sans perte de poids?
Consommation insuffisante d’aliments anti-inflammatoires
La recherche explique le rôle que joue l’inflammation dans le corps sur le risque de dépression, et conseille de trouver des moyens pour la diminuer. Votre régime peut jouer un rôle clé dans l’augmentation de l’inflammation, et des aliments anti-inflammatoires comme les légumes, fruits et poissons que l’on consomme régulièrement peuvent aider à abaisser ce risque, contrairement à un régime riche en sucres ajoutés, en sodas et en malbouffe, selon l’International Journal of Environmental Research and Public Health.
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«J’ai survécu à l’inondation de mon appartement»
Christian Fleischmann, 33 ans
Il était 1h20, le matin du 15 juillet 2021. Je venais de me mettre au lit, légèrement ivre après avoir fêté mon 31e anniversaire avec des copains, dans l’appartement que j’occupais au sous-sol de la maison de ma sœur.
Je vivais à Sinzing, au sud de Bonn, en Allemagne, à environ 500 m de la rivière Ahr. Il avait plu à verse toute la semaine; les autorités avaient émis un avertissement de crue et ordonné des évacuations, mais pas dans mon quartier. Par précaution, j’avais empilé des sacs de sable devant la porte qui donnait sur le jardin, et placé les vêtements et les appareils électroniques sur les tables et le canapé, au cas où l’eau s’infiltrerait. Mes amis s’étaient moqués de moi durant la soirée, mais je ne voulais rien risquer.
Je sombrais dans le sommeil quand j’ai été brusquement réveillé par un bruit d’eau tumultueuse. En sortant du lit, j’ai atterri dans l’eau froide jusqu’aux genoux. Et elle montait vite!
J’ai pensé qu’une canalisation avait sans doute sauté dans la salle de bain. Tremblant de froid, j’ai attrapé mon téléphone et allumé la lampe de poche. Il faisait nuit noire. Ce n’était pas la canalisation. L’eau entrait par la porte du jardin. Les sacs de sable avaient vraisemblablement cédé. Des tas d’objets flottaient dans le salon, des chaises, des étagères, une partie de ma batterie. Je commençais à paniquer. La rivière Ahr, ce cours d’eau tranquille, au débit habituellement si lent, était violemment sortie de son lit. Il fallait que je sorte – et vite !
Les effets de l’alcool s’étaient dissipés – la peur dégrise. Sous la pression de l’eau, la porte du jardin faisait un bruit de craquement d’allumettes. Ça ne ressemblait à rien que je connaissais, un mélange de crissements, de sifflements et de collisions. Implacable. Avec de l’eau qui me montait désormais à la taille, les pieds nus, le boxer collé à la peau, j’ai avancé péniblement vers la seule sortie accessible: la porte de l’escalier qui conduisait au rez-de-chaussée de la maison. Tout se brisait autour de moi – les lampes volaient en éclats, le frigo et les placards étaient renversés. J’ai pu tant bien que mal gagner la porte qui menait à l’étage, mais l’eau la tenait sous pression. Quand j’arrivais à l’entrouvrir, la masse liquide la refermait aussitôt. J’ai cherché autour de moi un objet qui m’aurait permis de la caler et de la maintenir ouverte.
Dans un coin, j’ai repéré un balai, une épée très lourde dénichée dans une foire médiévale et un portemanteau. Je les ai mis en tas entre le cadre et la porte pour la maintenir suffisamment entrebâillée. L’épée m’a sauvé la mise. Je me suis glissé par les 30 cm d’ouverture et j’ai pu enfin gagner l’entrée. La noirceur était totale. J’ai gravi l’escalier jusqu’au deuxième où habitait ma sœur. Mort d’inquiétude, j’ai tambouriné à sa porte et crié son nom avant de me rappeler qu’elle ne dormait pas à la maison ce soir-là.
Revenu au rez-de-chaussée – mon autre sœur y louait un bureau –, je suis sorti. Immobile dans le noir, trempé et essoufflé, je contemplais le paysage aquatique où flottaient des branches et des arbres. La rivière avait inondé le quartier. Me calmant peu à peu, j’ai pris conscience que, si j’avais tardé de quelques minutes à me réveiller, j’y aurais laissé ma peau.
On nous a assuré que de tels événements ne se produisent qu’une fois tous les 100 ans. Je l’espère. Plus de 180 personnes sont mortes dans ces inondations, et certains villages de la région ont été balayés.
Aujourd’hui, je vis chez mes parents au centre-ville et dors dans le bureau de mon père. Étudiant en psychologie, j’enseigne les arts martiaux à des écoliers. Je ne pourrai jamais retourner vivre dans cet appartement parce que je suis hanté par la peur que ça ne se reproduise.
Nous n’avions pas d’assurance inondation, le quartier où se situait la maison n’étant pas considéré comme une zone à risque. Nous nous chargeons donc des travaux nous-mêmes. La maison a été dévastée, comme bien d’autres habitations voisines, y compris celle qui accueillait des personnes handicapées. C’était horrible. Certains ne s’en sont pas sortis.
Quand mon ancien appartement sera sec et que les travaux seront finis, il accueillera une école d’arts martiaux.
Cette expérience aura eu du bon: je suis plus reconnaissant et déterminé à vivre intensément chaque jour de ma vie. J’ai failli me noyer et je retiens les paroles que ma mère a prononcées par la suite: «Christian, il ne faut pas se souvenir du jour où tu as tout perdu, mais de celui où tu as survécu.»
Découvrez ensuite cette histoire d’une jeune femme qui a été emportée par la rivière Niagara!
«J’ai survécu au dysfonctionnement de mon parachute»
Jordan Hatmaker, 36 ans
Le 14 novembre 2021 était une journée idéale pour le parachutisme: ensoleillée avec très peu de vent. J’étais encore novice avec seulement 14 sauts à mon actif – trop peu pour obtenir la licence. J’avais peur, bien sûr, mais on affronte mieux le risque avec un peu de peur, non? C’est cela qui m’avait séduit dans ce sport. J’ai toujours fait dans l’excès.
Le hangar était à 40 minutes en voiture de chez moi. À la périphérie de Suffolk, dans le sud-ouest de la Virginie, il y avait tout l’espace aérien et les terres non habitées dont on pouvait rêver. Je suis monté à bord de l’avion avec 15 autres parachutistes pour un premier saut à 13h30. Le temps était superbe. J’avais repassé avec mon instructrice toutes les consignes de sécurité – un rituel à reprendre avant chaque saut, quelle que soit l’expérience du parachutiste. Il faut notamment pointer depuis la porte de l’avion la zone de saut – l’endroit où vous prévoyez atterrir – à 4100 m, pour diriger le saut.
Nous avons sauté, moi d’abord, puis mon instructrice, plongeant en chute libre à quelque 200 km à l’heure, soit 300 m en 5 secondes. C’est une sensation exaltante et terrifiante à la fois, avec le monde qui s’ouvre sous nos yeux. J’étais porté par le vent et, à environ 1200 m du sol, j’ai déployé l’extracteur – un petit parachute utilisé pour l’extraction de la voile principale. Une fois libéré, le grand parachute s’est gonflé d’air, et je disposais d’environ une minute pour profiter de la quiétude en me balançant doucement vers l’herbe du sol. Je me sentais invincible.
Nous sommes vite repartis pour un deuxième saut. Le groupe de parachutistes discutait et plaisantait dans l’avion. C’était génial. J’ai répété la même scène avec l’instructrice, puis nous avons sauté.
Après 30 secondes, à environ 1680 m, nous nous sommes éloignés l’un de l’autre pour que nos parachutes puissent se déployer sans obstacle. J’ai jeté un coup d’œil sur l’altimètre et me je suis rendu compte que j’étais plus bas que je ne croyais. Le sol arrivait à une vitesse vertigineuse! Je savais qu’il fallait libérer l’extracteur à environ 1200 m, comme la dernière fois, mais, pris au dépourvu et pressé, je n’ai pas pris le temps de stabiliser ma position. Quand j’ai tiré l’extracteur, au lieu qu’il se relâche dans la colonne d’air pour se gonfler, il s’est enroulé autour de ma jambe droite en la tirant vers le haut – je ressemblais à une ballerine. Le parachute principal restait dans son sac. Il suffit que je me dégage, ai-je songé calmement. J’ai perdu 7 secondes à essayer de me démêler, en vain. J’aurais mieux fait de déployer immédiatement le parachute de réserve.
Je distinguais de plus en plus nettement le sol et me préparais au choc. Étonnamment, je ne m’attendais pas à un impact catastrophique. Je m’en tirerais avec une fracture de la jambe, tout au plus. J’ai toujours été optimiste.
Soudain, le parachute de réserve automatique (qui se déploie quand le principal ne fonctionne pas) s’est ouvert. J’ai regagné une certaine maîtrise avant de viser les herbes en espérant que l’atterrissage y serait plus doux.
Mon soulagement a été de courte durée. Quelques secondes plus tard, le parachute principal sortait enfin de son sac et se gonflait. Entrées en concurrence, les deux voiles se sont mises à tirer chacune de son côté, ce qui a violemment précipité ma chute au sol, non loin de la zone de saut.
En m’écrasant, j’ai senti une brûlure vive sur tout le corps. J’ai essayé de me relever – c’est ce qu’il faut faire quand on n’atterrit pas sur ses pieds – pour montrer que ça allait. J’en étais incapable. Mes membres inférieurs étaient figés. Le visage dans l’herbe, les bras en croix, j’ai hurlé: «À l’aide! Au secours!» Entre chaque appel, je priais à haute voix: «Pitié, mon Dieu. Faites que je ne sois pas paralysé!»
Je suis resté ainsi 5 minutes, le visage enfoui dans l’herbe. Puis les gens du club de parachutisme sont arrivés. Ils m’ont entouré, désireux d’aider, mais ne pouvaient rien faire. Me bouger aurait été trop risqué, ce que je n’ai pas compris tout de suite. Je les ai donc accablés d’injures et d’appels à l’aide à mesure que l’état de choc se dissipait et que la douleur s’installait.
L’ambulance est arrivée une demi-heure plus tard; la douleur était telle qu’il a été impossible de me mettre sur une civière pour le transport. Je hurlais. Puis j’ai entendu l’hélicoptère. À son arrivée, l’équipe médicale de l’ambulance aérienne m’a administré de la kétamine qui m’a envoyé au pays des rêves, puis j’ai été transporté au centre de trauma le plus proche.
Les blessures se sont révélées assez graves: une cheville éclatée, une fracture du tibia et une lésion de la colonne vertébrale responsable d’une fuite de liquide rachidien. Personne ne pouvait assurer que je marcherais de nouveau un jour, mais j’étais déterminé et, en février 2022, trois mois après l’accident, je faisais mes premiers pas. J’ai entrepris un programme de physiothérapie soutenu qui se poursuit encore aujourd’hui. En novembre 2022, alors que j’étais incapable de soulever les jambes après l’accident, je grimpais jusqu’au camp de base de l’Everest. Je prévois reprendre le saut en parachute – mais je n’ai encore rien dit à mes parents.
Cette histoire d’atterrissage à haut risque, où un pilote d’avion s’est évanoui, laissant au passager l’obligation de diriger l’avion, est toute aussi terrifiante!
«J’ai survécu à une « tornade de neige », coincée dans ma voiture»
Shannon St. Onge, 38 ans
La tempête devait débuter en soirée, le lundi 31 janvier 2022. Je travaillais à la maison, mais j’avais prévu me rendre au bureau à l’université canadienne des Premières Nations, à Regina, pour signer le chèque d’une bourse d’urgence accordée à un étudiant. Étant directrice des finances, je souhaitais lui faire parvenir cet argent le plus vite possible, tempête ou pas. Je n’étais pas inquiète. J’avais amplement le temps de faire l’aller-retour.
J’ai roulé 30 minutes sur la Transcanadienne vers l’est. Dès mon arrivée, mon collègue s’est pointé pour signer lui aussi le chèque et il a aussitôt quitté l’université. J’allais partir à mon tour quand j’ai remarqué le sac d’ordinateur qu’il avait oublié dans mon bureau.
« Zut, je suis déjà à la maison, a-t-il soupiré quand je l’ai appelé.
— Je te l’apporte si tu veux.»
Il était un peu passé 16h30. La neige n’était pas prévue avant le début de la soirée, mais par mesure de prudence, j’ai préféré prendre les petites routes plutôt que l’autoroute qui risquait de se transformer rapidement en patinoire. Avant d’arriver chez lui, j’ai fait un plein et acheté deux pizzas en prévision du souper, comme je m’y étais engagée auprès de ma fille de 15 ans et de mon fils de 10 ans.
Le trajet jusque chez mon collègue a pris une quinzaine de minutes. Je lui ai laissé le sac et j’ai repris la route aussitôt. Il a commencé à neiger et les flocons tombaient, abondants. En quelques minutes, tout était blanc. J’étais au milieu d’une «tornade de neige», ou ce que les météorologues à la télé appellent un «hurleur de la Saskatchewan», une tempête qui s’abat vite avec des vents si violents qu’elle hurle. C’était terrifiant!
Engagée sur une route de gravier, j’étais forcée de ralentir. J’ai baissé la vitre pour suivre le bord de la chaussée afin de ne pas dévier. En réalité, je ne savais pas de quel côté je roulais. Craignant de me retrouver dans le champ, le fossé ou quoi encore, j’ai fini par m’arrêter, sans couper le contact pour rester au chaud, et appeler les secours. On m’a recommandé de ne pas bouger et d’attendre le lendemain – personne ne viendrait me chercher avant le matin, au plus tôt.
Les quelques secondes qui ont suivi ont été les pires de mon existence. Il était exclu de sortir dans cet univers de blanc où tout est invisible, avec des vents puissants et une température frôlant les -10°C. Et puis je ne savais pas où j’étais et j’avais peur que les automobilistes, faute de me voir, ne foncent dans ma voiture. Ou que la neige ne bouche le pot d’échappement et que je meure intoxiquée par le monoxyde de carbone. Et si la tempête durait plus longtemps que prévu et qu’on me retrouvait trop tard? Respire, inutile de paniquer, me suis-je dit.
Mes enfants! Ils passeraient une première nuit à la maison sans moi. J’ai appelé pour les prévenir, me forçant à garder un ton calme. Je ne leur ai pas dit que j’étais terrifiée.
Il était près de 18h et il faisait nuit. Comment les secours arriveraient-ils à trouver mon VUS Ford Edge noir dans toute cette neige? Verraient-ils seulement une ombre? Un camion est passé, évitant de peu la voiture. Je l’avais échappé belle. J’ai d’abord eu peur, puis je me suis dit que j’étais sauvée. J’ai embrayé pour le suivre, désespérée, rou- lant lentement, n’ayant aucune idée où il allait. Quand le camion a bifurqué à un carrefour, je suis restée désemparée.
«Je vais à la plage», a-t-il crié par la vitre baissée, les paroles emportées par le vent.
Ma maison ne se trouvait pas dans la direction de la plage, mais je ne savais pas du tout où j’étais. J’ai arrêté la voi- ture pour envoyer un texto au collègue à qui j’avais rapporté le sac. J’ai plaisanté sur cette bonne action se terminant par une catastrophe. Il a eu une idée. «Détermine ta position sur Google Maps et envoie-moi le résultat.»
Je me suis exécutée et quelques minutes plus tard, il me renvoyait une capture d’écran de la vue satellite du lieu où je me trouvais. Il s’agissait vraisemblablement de Bouvier Lane, une petite route qui reliait deux fermes. Il était 18h30. J’ai posté cette information sur mon compte Facebook en priant que quelqu’un connaisse au moins une personne qui pourrait venir à mon secours.
Il n’y avait plus qu’à attendre sagement dans la voiture en tâchant de rester au chaud. J’étais contente d’avoir fait le plein. J’avais pris les bonnes décisions et, quoi qu’il arrive, je ne pouvais pas m’en vouloir. Mais même si on savait où je me trouvais, comment avancer dans cette neige tourbillonnante soufflée par des vents hurlants ?
Les réactions à ma publication sur Facebook ont été rapides. Des gens connaissaient une famille qui vivait par là! J’ai reçu le message d’une personne qui allait me mettre en relation avec elle. À 20h, mon téléphone a sonné. C’était le fils du fermier propriétaire de la terre qui longeait la route où je m’étais arrêtée. Son père viendrait me chercher!
Quarante-cinq minutes plus tard, j’ai vu un homme assez grand vêtu d’un imperméable jaune avançant dans ma direction dans le noir, une lampe torche à la main. Quel soulagement! André Bouvier avait parcouru 500 m dans le blizzard pour venir à mon secours, luttant pas à pas contre le vent et la neige, se protégeant les yeux de la morsure des flocons de sa main recouverte d’une mitaine.
«Vous prenez le volant? ai-je demandé d’une voix chevrotante à travers la vitre. Je suis trop nerveuse.» Malgré sa démarche puissante, le voyant maintenant de près, j’ai compris qu’il s’agissait d’un vieil homme.
«Non, a-t-il répondu d’une voix calme. Vous me suivrez en voiture. Tout ira bien.»
Il a commencé à avancer péniblement dans la neige, sûr de sa direction. Je roulais lentement derrière lui, les mains cramponnées au volant, sentant les battements de mon cœur s’apaiser. Nous sommes arrivés chez lui en
quelques minutes. En sortant de la voiture, j’ai éclaté en sanglots, la peur cédant au soulagement et à la gratitude. Pendant que sa femme me servait une boisson chaude et une compote de pommes, André – je venais d’apprendre qu’il avait 80 ans – est ressorti dans la tempête. Il avait vu deux autres voitures bloquées et allait les aider à leur tour: un père et ses deux enfants et un couple avec leur fille.
Nous avons passé la nuit à raconter des histoires, les enfants ont mangé les pizzas que j’avais achetées et nous avons dormi dans la maison, qui sur les canapés, qui dans les fauteuils à bascule. À 5h30, le lendemain, André avait dégagé la neige devant chez lui pour nous permettre de reprendre la route et de rentrer à la maison. J’étais finalement à 5 minutes en voiture, mais je ne m’en étais pas rendu compte la veille. Même si je l’avais su, j’aurais risqué ma vie en poursuivant ma route.
Cette expérience a transformé ma vision de l’existence. Elle m’a appris à accueillir plus calmement les défis et les retournements de situation. Elle a aussi renforcé ce sentiment qu’il faut, quand c’est possible, tendre la main vers les autres et les aider, les amis comme les étrangers. Je suis toujours en relation avec André. Nous sommes amis pour la vie!
Pour son «dévouement exceptionnel et son sens du civisme» ce soir-là, André Bouvier s’est vu décerner une médaille du jubilé de platine de la reine Elizabeth II.
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Quand Eugenie George a appris que son amie avait réussi un examen de conseil financier, elle a senti son cœur se serrer. Elle avait elle-même échoué à ce test quelques semaines plus tôt, et avait besoin de ce certificat pour progresser dans sa carrière. «Mon enfant intérieur était contrarié», se souvient Eugenie, rédactrice financière et enseignante à Philadelphie. Puis, au lieu de ruminer, elle a plutôt appelé son amie. «Je lui ai dit que j’avais échoué et j’ai admis être un peu jalouse.» Elle savait qu’être honnête désamorcerait son sentiment d’envie, mais elle a été surprise de voir à quel point cela lui permettait également de participer au bonheur de son amie et d’éprouver à son tour de la joie. «Je l’ai félicitée et lui ai dit qu’elle était une source d’inspiration pour moi.»
Se réjouir de la bonne fortune d’autrui est ce qu’on appelle en sciences sociales la freudenfreude (freude, en allemand, signifie «joie»), un terme qui décrit le plaisir qu’on éprouve devant la réussite d’une autre personne, même sans être directement touché.
Ce sentiment, qu’on appelle aussi compersion, est un ciment social, explique Catherine Chambliss, professeur de psychologie au Ursinus College de Collegeville, en Pennsylvanie. Il rend les émotions «plus intimes et agréables».
Selon Erika Weisz, chercheuse à l’université Harvard, cette émotion est très proche de l’empathie. Une étude de 2021 a démontré qu’elle encourageait les actes de bienveillance. Aider son prochain, partager sa joie, stimule à son tour la résilience, améliore la satisfaction générale et dispose à coopérer en cas de conflit.
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Si ses avantages sont nombreux, ce sentiment de joie partagée ne s’impose pas facilement. Parfois, la perte est si douloureuse qu’il semble hors d’atteinte. Si, encore, on a été élevé dans un milieu où on lie estime de soi et triomphe, explique Catherine Chambliss, on sera sans doute porté à interpréter les succès d’autrui comme des échecs personnels. Enfin, d’autres facteurs tels que la santé mentale et le bien-être global influent également sur la capacité à prendre part à la joie des autres.
Malgré tout, se laisser aller à éprouver de la compersion en vaut la peine. Voici quelques manières de nourrir ce sentiment.
Se réjouir du malheur des autres: des effets néfastes
Pour mieux comprendre la freudenfreude, il est bon de rappeler son pendant plus célèbre, la schadenfreude: le plaisir qu’on tire du malheur des autres. Dans une étude de 2012, Catherine Chambliss et ses collègues ont étudié ces deux sentiments opposés chez des étudiants d’université, dont certains souffraient de dépression modérée. Chez les étudiants qui n’étaient pas déprimés, ont-ils noté, le sentiment positif était plus fréquent; les étudiants légèrement déprimés, en revanche, avaient de la difficulté à adopter un état d’esprit leur permettant de partager la joie des autres. «Lorsqu’on se sent mal, il est naturel de dévaloriser les bonnes nouvelles», explique Mme Chambliss.
Mais il n’est pas nécessaire d’être en situation de souffrance morale pour se réjouir du malheur des autres – lorsque le méchant d’un film obtient ce qu’il mérite, par exemple, ou qu’un opposant est mis en difficulté. Ce sentiment peut même être réconfortant et avoir son utilité. «La schadenfreude est une façon de gérer la jalousie et la vulnérabilité», explique la psychologue clinicienne Emily Anhalt, cofondatrice de Coa, une application de santé mentale. C’est un «protecteur de l’ego» qui préserve de la souffrance et renforce les liens sociaux à l’intérieur d’un groupe – par exemple dans les rangs d’amateurs de sport lorsque l’équipe rivale subit une humiliante défaite.
Cela dit, se complaire dans la schadenfreude peut avoir des effets néfastes. Sur les réseaux sociaux, on a pu établir qu’elle diminuait le sentiment d’empathie, surtout à l’endroit de gens différents. D’autres recherches tendent à prouver que se réjouir du malheur des autres réduit l’estime de soi, surtout lorsqu’on se compare à ceux qui réussissent.
Assurez-vous de connaître ces comportements toxiques (que l’on croit bons).
Est-il possible d’éprouver plus de freudenfreude?
«L’empathie n’est pas toujours automatique, affirme Erika Weisz. Cela demande souvent une forme de motivation.» Pour aider à renforcer le sens du partage de la joie, Catherine Chambliss et ses collègues ont mis au point un programme appelé Freudenfreude Enhancement Training (FET), qui comprend deux exercices. Et il est apparu que les étudiants déprimés les ayant pratiqués pendant deux semaines avaient plus de facilité à exprimer de la compersion, ce qui améliorait leurs relations et leur humeur.
Si vous souhaitez éprouver plus facilement ce même sentiment, essayez de suivre les conseils suivants issus du FET et d’autres spécialistes de la question.
Démontrez un intérêt sincère pour le bonheur de votre entourage
L’une des façons de faire naître ou d’entretenir des sentiments agréables envers les autres est de poser des questions. Pour Catherine Chambliss et ses collègues il s’agit ainsi de partager la joie. Pour commencer, invitez le porteur de bonnes nouvelles à parler de son expérience. Même si votre cœur n’y est pas, le bonheur peut s’épanouir lorsqu’on fournit un effort sincère pour prendre part à une activité positive, ainsi que le montre dans ses recherches Sonja Lyubomirsky, professeur de psychologie à l’université de Californie à Riverside. En parlant à votre interlocuteur, assurez-vous de le regarder dans les yeux et de l’écouter attentivement. Cela devrait vous soutenir et vous donner le sentiment que vos efforts portent leurs fruits. (Essayez l’un de ces trucs pour entamer une conversation et capter l’attention!)
Considérez les succès individuels comme des résultats d’efforts communs
«Lorsque nous nous sentons heureux pour les autres, leur joie devient notre joie», déclare la psychologue Marisa Franco. «Personne n’atteint le sommet seul, ajoute Emily Anhalt, et lorsqu’on aide les autres à s’élever, on est souvent entraîné avec eux.»
L’artiste Jean Grae soutient ses amis et collègues dans cette conviction. Si l’un de ses proches saisit une occasion ou passe un cap important, elle s’assure de célébrer l’événement. Jean Grae affirme être particulièrement touchée lorsqu’une personne considérée comme «différente» réussit. «C’est vraiment une source d’inspiration, déclare-t-elle, car cela nous élève tous et nous fait briller.»
Attribuez également aux autres le mérite de vos succès
Les émotions sont contagieuses, manifester sa reconnaissance permet donc d’augmenter le sentiment de freudenfreude pour celui qui exprime sa gratitude et celui qui la reçoit. Vous aussi vous avez la capacité de propager ce sentiment lorsque vous éprouvez une joie personnelle.
Pour cela, essayez cet exercice du FET qui consiste à exprimer sa gratitude quand le succès ou le soutien d’une autre personne entraînent votre propre réussite. Commencez par partager votre victoire, puis remerciez-la pour son aide. Soyez précis. Si le comptable de votre ami vous a bien conseillé pour épargner, dites par exemple: «Mes économies augmentent. Merci de m’avoir recommandé ton excellent comptable.»
C’est là un plaisir qu’on partage comme un dessert: on en apprécie également la douceur.
Devenez un admirateur de la joie
«Trop souvent, on pense à la joie de manière passive, soutient Marisa Franco. On la considère comme une émotion qui vient à nous, et non comme un sentiment dont nous sommes l’auteur.»
Cultivez la joie en invitant les autres à partager leurs réussites. Demandez: «Quel était le meilleur moment de ta journée?» ou «J’ai besoin d’entendre de bonnes nouvelles; quelle est la meilleure chose qui te soit arrivée cette semaine?» S’intéresser aux succès des autres vous transforme en spectateur de leur joie et vous donne une occasion de les découvrir sous leur meilleur jour.
Éprouver plus de freudenfreude ne signifie pas que vous ne vous réjouirez plus jamais des malheurs du méchant de film, mais être capable de saisir le bonheur est un avantage en soi.
Selon Catherine Chambliss, «on a beau se réjouir des défaites de nos ennemis, célébrer les succès de nos amis – petits et grands – nous permet de triompher tous».
© 2022 The New York Times Company. Tiré de The New York Times (28 novembre 2022).
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Les colorants alimentaires artificiels, on le sait, ne sont pas toujours inoffensifs. Certains, présents dans presque tout – des bonbons aux soupes – provoquent chez certains enfants une hyperactivité qui nuit à l’apprentissage. Mais les autorités réglementaires du monde ne s’entendent pas. Lesquels sont nocifs et pourquoi?
Cela pourrait bientôt changer grâce aux pressions des consommateurs et à un rapport très complet publié en 2021. Ce document de l’OEHHA – le bureau d’évaluation des risques sanitaires environnementaux de la Californie – conclut que les colorants alimentaires synthétiques «causent ou aggravent des troubles neurocomportementaux chez certains enfants» et que les niveaux jugés sûrs par le gouvernement fédéral sont trop élevés.
Sensible au rapport et à une pétition ultérieure signée par des défenseurs des enfants et des consommateurs ainsi que par des spécialistes de la santé et de l’environnement, la Californie envisage d’exiger des fabricants qu’ils placent des étiquettes d’avertissement sur les produits et suppléments contenant 7 des colorants artificiels les plus largement employés, notamment le rouge Allura AC, la tartrazine et le jaune orangé Sunset, qui forment plus de 90% des colorants autorisés dans les aliments aux États-Unis. Les restaurants californiens seraient tenus de signaler les plats de leurs menus qui contiennent ces additifs.
La fidélité au rapport de l’OEHHA mettrait l’autorité réglementaire sur la même longueur d’onde que les chercheurs et les militants. Cela tient pour l’essentiel à sa qualité, estime Lisa Lefferts, experte-conseil en écosalubrité qui fait partie des 10 premiers signataires de la pétition. «C’est tout simplement la meilleure, la plus complète, la plus rigoureuse évaluation des effets neurocomportementaux des colorants alimentaires artificiels sur les enfants qui ait jamais été réalisée.»
En exigeant un avertissement, la Californie suivrait l’exemple de l’Union européenne qui, depuis 2010, demande aux fabricants d’aliments et boissons contenant certains colorants synthétiques de les accompagner d’une mise en garde contre leurs effets nocifs sur l’activité et l’attention des enfants.
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Qu’en est-il au Canada?
Rien de tel n’est prévu au pays. Marie-Pier Burelle, agente des relations avec les médias à Santé Canada, a déclaré à Sélection que, «considérant les données scientifiques disponibles, le ministère est d’avis que les colorants alimentaires artificiels ne présentent pas de risque pour la santé de la population en général quand ils sont employés de la façon prescrite dans la liste des additifs alimentaires autorisés». Depuis 2016, Santé Canada exige que tous les colorants alimentaires artificiels figurent sur l’étiquette pour que le consommateur souhaitant éviter certains additifs puisse en être informé.
Il faut savoir que les colorants artificiels servent uniquement à rendre le produit plus appétissant, ce qui signifie, pour Bill Jeffery, directeur administratif du Centre for Health and Science Law à Ottawa, «maquiller la nourriture». Les couleurs vives et les formes amusantes des friandises et céréales sont certes attrayantes, surtout pour les enfants, mais on trouve aussi des colorants dans des compotes de pomme, des guimauves, des préparations pour gâteaux, des vinaigrettes, et bien d’autres choses.
À mesure que la recherche avance, les pressions exercées par les consommateurs forcent les fabricants à modifier la composition de produits vendus aussi bien au Canada qu’aux États-Unis, à commencer par l’emblématique Kraft Dinner. En 2016, son fabricant a remplacé la tartrazine et le jaune orangé Sunset par un mélange de curcuma, de roucou et de paprika. À la même époque, la chaîne Chipotle, Nestlé USA et d’autres restaurants et fabricants ont annoncé qu’ils travaillaient à réduire ou à éliminer les colorants artificiels.
En Europe, la loi sur l’étiquetage de 2010 a poussé les entreprises à modifier leurs recettes. «Elles veulent éviter l’étiquette de mise en garde», explique Lisa Lefferts, préférant souvent changer simplement quelques ingrédients.
Voilà pourquoi les en-cas aux fruits Starburst vendus en Europe contiennent des colorants naturels plutôt que ceux, artificiels, qui rendent leurs équivalents nord-américains potentiellement nocifs. Le rouge Allura, par exemple, a exacerbé la colite chez des souris dans le cadre d’une expérience menée en 2022 à l’université McMaster d’Hamilton, au Canada.
Il faut poursuivre ces recherches, mais comme les colorants alimentaires artificiels sont superflus, les spécialistes s’entendent pour qu’on essaie de s’en passer.
Tout compte fait, note Joe Schwarcz, professeur de chimie et directeur de l’Organisation pour la science et la société de l’université McGill, à Montréal, nous ne colorons pas les fruits et légumes frais, mais plutôt les bonbons, les beignets et les vermicelles en sucre. «Les aliments qui contiennent des colorants sont pauvres, dit-il. Moins vous en consommez, mieux vous mangez.»
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Ce raisonnement vous semble illogique? Laura Johnson, analyste en recherche et développement pour une compagnie de laveuses et de sécheuses, explique que cette façon de faire aura plutôt l’effet contraire. «Utiliser trop de détergent à lessive peut créer trop de mousse, ce qui entraînera une consommation d’eau plus élevée ainsi qu’une accumulation de savon dans la laveuse au fil du temps. Cela entraînera forcément un jour des problèmes d’odeur», ajoute-t-elle.
Apprendre à faire la lessive, selon les experts, est le moyen infaillible de s’assurer que vos vêtements aient toujours l’air impeccables et qu’ils aient une bonne odeur, surtout si vous n’utilisez pas les meilleurs détergents qui soient sur le marché. Qu’il s’agisse de savons en poudre, liquide ou de dosettes, ces conseils d’experts vous aideront certainement à déterminer la juste quantité de détergent à utiliser. Voici quelques astuces pour un nettoyage en profondeur des serviettes et des draps.
Signes que l’on utilise trop de détergent à lessive
En premier lieu, jetez un œil à cette brassée qui vient d’être lavée. Si vos vêtements mouillés semblent un peu gluants ou collants, il s’agit probablement de résidus de savon. Voilà le signe flagrant que vous utilisez trop de détergent à lessive.
Il existe une multitude d’autres signes:
- des vêtements blancs qui deviennent avec le temps blanc cassé, voire grisâtre;
- des vêtements colorés qui perdent leur éclat;
- ou encore des vêtements mouillés qui sont raides sont tous des signes que quelque chose cloche avec votre détergent à lessive ou, du moins, l’utilisation que vous en faites.
L’indice le plus flagrant est probablement le fait que votre laveuse dégage de mauvaises odeurs. L’explication est souvent que le savon s’est accumulé avec le temps sous la cuve. Face à une telle situation, vous devrez nettoyer votre machine à laver avant de faire toute autre brassée.
Pour ce faire, vous pouvez utiliser du bicarbonate de soude ou du vinaigre. Ces deux ingrédients sont excellents pour le nettoyage de la machine à laver. Encore une fois, en utiliser une trop grosse quantité laissera une odeur de vinaigre dans votre laveuse…
Quand utiliser davantage de détergent à lessive
Rares sont les moments où les vêtements souillés nécessitent davantage de détergent à lessive. Si vos vêtements sont très sales, comme un uniforme de sport par exemple, référez-vous aux indications de la marque de détergent que vous utilisez. Assez régulièrement, la compagnie indique des ajustements de doses potentielles selon la grosseur ou le niveau de saleté de votre brassée.
Les directives d’utilisation des détergents sur l’emballage sont également basées sur la taille du tambour d’une machine à laver traditionnelle. Si votre modèle est surdimensionné avec un tambour plus grand (généralement plus fréquent chez les machines plus récentes), vous devrez forcément ajuster le tir. Par exemple, si vous utilisez une seule dosette pour votre brassée habituelle, vous pouvez en ajouter une supplémentaire pour les brassées extra-larges.
La qualité de l’eau affectera elle aussi l’efficacité du détergent à lessive. Si vous vivez dans une région où l’eau est particulièrement forte en calcaire, vous devrez utiliser plus de détergent. Cela varie habituellement d’un pays à un autre.
Quelle quantité de détergent utiliser dans les laveuses à haute efficacité (HE)
«Si vous possédez une laveuse à haute efficacité, vous devez utiliser le détergent qui conviendra, comme un détergent identifié lui aussi HE», explique Mary Gagliardi, scientifique pour une compagnie de détergent et experte en nettoyage. En effet, ces derniers sont spécifiquement formulés pour les machines qui utilisent moins d’eau et nettoieront parfaitement vos vêtements et ce, sans mousse excessive.
«Les laveuses HE (haute efficacité) ont un cycle beaucoup moins rapide et sont donc beaucoup plus sûres pour les différents types de tissus», assure-t-elle. «Cependant, cela signifie également qu’elles ne nettoient pas de manière aussi intense et qu’elles s’appuient davantage sur la chimie des produits de lessive pour compenser cette différence». Toutefois, ce n’est pas le moment d’utiliser davantage de détergent pour autant.
En effet, ces machines utilisent de plus petites quantités d’eau et fonctionnent donc plus efficacement avec de plus petites quantités de détergent, notamment afin de respecter l’équilibre savon/eau.
«La différence notable entre les détergents à lessive réguliers et les détergents HE réside dans les différents agents nettoyants qu’ils contiennent», explique Mary Gagliardi. «Un changement notable par rapport aux détergents ordinaires, est qu’ils ne moussent pas pendant le cycle», souligne-t-elle.
Elle ajoute que les laveuses HE ont un nettoyage plus variable en raison du culbutage bien différent pendant le cycle de lavage. «Pour la plupart des vêtements, ce n’est pas un problème, mais pour les articles de couleur tachés, il est très important de prétraiter la tache avant le lavage», conseille-t-elle.
Vous pouvez également utiliser le détergent HE dans les machines à laver traditionnelles, mais «ne vous attendez pas à ce qu’il produise de la mousse», prévient l’experte. Bien entendu, un détergent standard est la meilleure option pour une laveuse standard.
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Quelle quantité de détergent utiliser dans les laveuses à chargement par le haut
Une laveuse traditionnelle à chargement par le haut possède un agitateur central qui fait tourner le détergent, les vêtements et l’eau afin d’enlever les taches et éliminer les odeurs tenaces des vêtements. «Les laveuses traditionnelles agitent le linge de manière plus forte, ce qui se traduit par un nettoyage plus uniforme, notamment parce que les vêtements sont complètement immergés dans la solution savonneuse», explique Mary Gagliardi.
Les laveuses à chargement par le haut utilisent généralement plus de 150 litres d’eau, contrairement aux laveuses HE qui en utilisent une quinzaine uniquement. Puisque les laveuses à chargement par le haut utilisent beaucoup plus d’eau, l’utilisation accidentelle d’un peu plus de détergent que nécessaire s’avère moins dangereuse.
Un autre argument pour ne pas utiliser trop de détergent à lessive est le respect de vos économies. Ne jetez donc pas votre argent à l’eau et suivez les instructions sur l’emballage du détergent.
Enfin, ne versez jamais de détergent à lessive directement de la bouteille dans l’eau sans mesurer la quantité que vous ajoutez. Il s’agit d’un excellent moyen d’utiliser une trop grosse quantité de savon.
Directives pour mesurer le détergent à lessive
Alors que les ensembles laveuse-sécheuse HE gagnent en popularité, les individus utilisent de moins en moins de détergent. Où le respect des quantités indiquées par les compagnies peut devenir un peu plus délicat, c’est que les fabricants de détergents à lessive souhaitent augmenter leurs ventes alors qu’elles ont pris un coup dur dans les dernières années. Certaines compagnies recommandent donc d’utiliser plus de détergent que nécessaire.
Assurez-vous, en tout temps, de vous référer aux symboles de lessive des vêtements pour vous assurer que vous les nettoyez correctement.
Pour vous simplifier la tâche, voici la quantité exacte de détergent à lessive à utiliser pour les laveuses standard ainsi que les laveuses HE.
- Les petites boites pré-mesurées ou les dosettes: Ajoutez-en une par cycle, peu importe le type de machine à laver.
- Détergent en poudre: Les laveuses standard prennent un quart de tasse (environ 63 ml) de détergent à lessive en poudre. Si vous avez affaire à une brassée particulièrement sale, utilisez alors une demi-tasse (125 ml) de détergent. Les machines HE, pour leur part, fonctionnent mieux avec deux cuillères à soupe.
- Détergent liquide: Utilisez deux cuillères à soupe pour une laveuse standard ou deux cuillères à thé pour une laveuse HE. Toutefois, si votre eau est particulièrement douce, pensez à ajuster la quantité jusqu’à une cuillère à soupe et demie pour une machine standard et une cuillère à thé et demi pour un modèle HE.
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De plus en plus présent au petit comme au grand écran, le géant Jean-Jean en a fait du chemin depuis le feuilleton 1, 2, 3… Géant! En effet, Guillaume Cyr n’en finit plus de cumuler les bons rôles à son répertoire. Son interprétation est si juste et sa présence si naturelle qu’on a l’impression qu’il entre avec facilité dans la peau de ses personnages. L’année 2023 fut d’ailleurs bien remplie, avec la sortie de Bungalow au printemps – réalisé par Lawrence Côté-Collins, le tournage de La meute, une adaptation au cinéma de la pièce de Catherine-Anne Toupin ainsi que l’animation du gala Prends ça court! qui récompense les meilleurs courts métrages de l’année. En plus de ça, au début de 2024, on le verra dans une coproduction canado-américaine (où devrait-on dire québéco-américaine…) sur Amazon Prime. Plein feu sur cet acteur en pleine ébullition.
La révélation du théâtre
C’est en secondaire trois, alors qu’il assiste à une pièce de théâtre amateur à la polyvalente Benoît-Vachon à Sainte-Marie de Beauce où il étudie, que Guillaume Cyr a une révélation: il sera comédien. Il s’inscrit aux auditions et l’année suivante il fait partie de la troupe de l’école et commence à briller sur les planches.
S’il n’avait jamais pensé faire du théâtre avant ça, il est dans son élément. «J’étais un peu le bouffon de la classe à l’école, toujours en représentation, alors dès que j’ai vu un spectacle de théâtre je me suis dit C’est ça que je fais depuis toujours: je veux monter sur la scène!» Dans sa famille, personne n’a jamais fait carrière dans les arts, mais il avoue que la fibre artistique vient du côté de sa mère. Il y a plein d’artistes potentiels qui n’ont jamais percé dans le métier, probablement en choisissant des professions plus courantes. Mais le potentiel était là. «Dans les réunions de famille du côté de ma mère quand j’étais jeune, tout le monde chantait et jouait d’un instrument de musique.»
Chose étonnante, il ne choisit pas l’option théâtre au cégep. Pas tout de suite en tout cas: «Je suis allé en histoire en me disant que pour être comédien il fallait que j’aie de la culture! Mais je n’ai vraiment pas aimé ça, il fallait toujours prendre des notes», avoue-t-il candidement, en riant un bon coup. «J’ai changé pour un DEC [diplôme d’études collégiales] en cinéma au Cégep Garneau à Québec et j’ai adoré ça. Après le cégep, j’ai préparé mes auditions pour entrer dans les écoles de théâtre.»
Si ça ne marche pas du premier coup, il ne se décourage pas et recommence le processus l’année suivante pour finalement être accepté à l’École nationale de théâtre du Canada à Montréal.
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L’antithèse du jeune premier
C’est un euphémisme de dire que Guillaume Cyr n’a pas un physique passe-partout: très grand et costaud, on l’imagine bien dans les rôles de géants ou de bon gars sympathique. Quand il a commencé sa carrière, on lui disait que son physique atypique pouvait être un atout – il est unique en son genre – mais que ça pouvait aussi nuire, car il n’y a pas tant de rôles pour des acteurs de son gabarit. Mais comme le dit si bien cet acteur québécois originaire de la Beauce, le casting, c’est relatif.
Depuis sa sortie de l’école, il a joué un peu de tout: du bon gars costaud comme le géant Jean-Jean (1, 2, 3… Géant!) au maire corrompu d’un petit village (La genèse de la rage) en passant par le mousquetaire Porthos au théâtre et même un animateur québécois de camp de jour dans un film en France (Nos jours heureux). Il a repris le rôle emblématique de Lennie Small au théâtre (Des souris et des hommes), un personnage complexe et joué par tant de comédiens avant lui. Il récemment a brillé au cinéma coup sur coup avec trois films: Jusqu’au déclin (de Patrice Laliberté), Arsenault et fils (de Rafaël Ouellet) et Bungalow (Lawrence Côté-Collins). On l’a vu beaucoup à la télévision, notamment dans L’imposteur, Ruptures, Léo, Le bonheur, La confrérie et plusieurs autres téléfilms et séries télévisées.
Le rôle d’Horace Barré – le protégé de Louis Cyr – a été le premier grand rôle de sa carrière au cinéma, qui lui a valu le Jutra du meilleur acteur de soutien révélé au grand public. Quand on lui demande si ce rôle a propulsé sa carrière, il reste mitigé: l’après Louis Cyr a été somme toute une période tranquille. «Mais ça reste que c’est un projet très marquant. Le monde se souvient beaucoup de moi pour mon rôle dans Louis Cyr.»
À la bonne place au bon moment
Pendant sa formation à l’École de théâtre, entre sa deuxième et troisième année, Guillaume Cyr a joué dans un film français réalisé par Éric Toledano et Olivier Nakache Nos jours heureux. «Les Français avaient déjà approché trois agences de distribution pour trouver un gros nounours québécois et en dernier recours, une amie de Catherine Gadouas – professeur de chant à l’École nationale – lui a demandé si par hasard il y aurait un gros nounours québécois parmis ses étudiants… «Et Catherine a dit bien sûr, il y a Guillaume en deuxième». Ceux qui auront l’occasion de voir le film pourront y découvrir un jeune Guillaume Cyr très naturel qui a l’air bien à l’aise de jouer parmi ces grosses pointures du cinéma français (notamment Omar Sy) mais la vérité c’est qu’il était dans ses petits souliers: «Heureusement, j’ai toujours eu de la facilité à faire croire que je ne suis pas stressé. Comme en impro, tout le monde me disait que j’étais vraiment bon, mais pour de vrai j’haïssais ça, j’étais profondément paniqué…»
Faire sa place, tranquillement
Mais le comédien insiste pour préciser que sa carrière n’est pas partie sur les chapeaux de roue. Après avoir décroché son diplôme de comédien en 2007, Guillaume Cyr fait son chemin de figurations en troisièmes rôles, puis en deuxièmes rôles pour finalement décrocher des premiers rôles. Quand on lui demande comment ça s’est passé, il répond avec sincérité: «J’ai toujours considéré avoir bien placé mes pions, tranquillement, mais sûrement.» Si Louis Cyr a été une étape importante de sa carrière, c’était en 2012, 5 ans après sa sortie de l’école, et c’était son premier grand rôle. Un peu comme la consécration d’un travail sérieux et constant.
Bien qu’on se doute de la réponse, la question se pose: a-t-il une préférence entre le théâtre, le cinéma ou la télévision? Le comédien tranche rapidement: «J’aime les trois – je m’ennuierais de ne plus faire l’un ou l’autre. Je me considère vraiment chanceux de pouvoir faire du théâtre, de la télévision et du cinéma. Au théâtre, il y a le frisson du direct avec le public: c’est une seule prise – qui dure deux heures devant 800 personnes – et tu n’as pas le droit de la recommencer. La réussir et te faire ensuite applaudir, il n’y a rien qui peut remplacer ça.» En même temps, il ajoute que tourner pour le cinéma ou la télé, c’est autre chose complètement, mais tout aussi important: «pendant les 60 jours de tournage, l’équipe devient comme une famille et c’est vraiment particulier. J’ai besoin du théâtre comme du cinéma et de la télé, car chacun assouvit un besoin différent.»
Au théâtre, il a incarné des personnages de Tchékhov, de Brecht et de quelques autres grands dramaturges ainsi que plusieurs créations québécoises. Quand on lui demande s’il y a un rôle qu’il l’a particulièrement marqué, il pense tout de suite à Lennie Small dans Des souris et des hommes (2018): «C’est un personnage qui venait vraiment me chercher. J’aurais pu le jouer à l’infini.» Il ajoute également que le fait d’être sur scène avec Benoît McGinnis – un comédien qu’il admire depuis toujours – était un peu comme une consécration. Et le rôle qu’il aimerait jouer un jour? «Tout en haut de la pyramide, c’est définitivement Cyrano de Bergerac.»
Bienvenue chez Amazon Prime
En attendant de le voir en majestueux Cyrano, les abonnés d’Amazon Prime pourront l’apprécier dans une nouvelle série – dans la méga production canadienne et américaine The Sticky – dès le début de l’année 2024. Inspirée du fameux vol de près de 3000 tonnes de sirop d’érable qui s’est déroulé sur plusieurs mois entre 2011 et 2012 et qui a fait ensuite les manchettes. Produite par Jamie Lee Curtis, The Sticky sera tournée principalement à Montréal et mettra en vedette les acteurs américains Margo Martindale et Chris Diamantopoulos ainsi qu’une belle brochette d’acteurs québécois. Guillaume Cyr y jouera le rôle de Rémy Bouchard, un agent de sécurité de nature plutôt calme qui se fera embarquer dans cette fraude par Ruth Landry (Margo Martindale), une acéricultrice qui décide de jouer dans la cour des grands et de faire ses propres règles.
Pour Guillaume Cyr, c’est deux fois une grande première: jouer en anglais et dans une coproduction américaine-canadienne. Quand on lui demande ses impressions d’être aux côtés de Jamie Lee Curtis et sous sa direction, il ne tarit pas d’éloges: «C’est une femme extraordinaire et très professionnelle, et elle donne autant d’énergie devant que derrière la caméra. Jouer auprès d’elle et sous sa direction fut très formateur.»
Pour réussir une telle coproduction entre non seulement deux cultures, mais deux langues, Amazon Prime a mis les bouchées doubles. En tournant au Québec avec des acteurs d’ici, il fallait trouver le niveau de français à mettre en place. Et que chacun soit rassuré, lorsque dans la version originale les acteurs québécois parlent en français, ce sera authentique. «C’était important de déterminer la ligne entre ce qui est trop ou pas assez et de trouver le bon dosage de québécois à mettre dans la série, parce que ceux qui vont regarder The Sticky n’auront pas le choix de comprendre: oui c’est une histoire qui se passe au Québec, mais c’est une série qui sera projetée dans 240 pays et territoires.» Et il semble que le dosage ait été bien réussi, selon Guillaume Cyr. «Pour l’authenticité, mais aussi pour notre plaisir personnel, de pouvoir placer quelques-uns de nos jurons les plus colorés.» Même qu’il plaint ceux qui vont devoir écrire l’adaptation doublée en français…
Conciliation travail famille
Guillaume Cyr n’est pas seulement un comédien en demande, c’est aussi le père d’Edmond (8 ans) et de Vivianne (3 ans et demi). Difficile de concilier tout ça? «C’est épouvantable», résume-t-il en rigolant. «Ma blonde est première assistante-réalisatrice aussi, donc elle tourne encore plus que moi.» Mais pas sur les mêmes films, heureusement. Ils ont trouvé une solution avec le programme Au Pair qui s’occupe de trouver une bonne correspondance entre la famille d’accueil et une étudiante qui prend une année sabbatique pour voyager. «Ça fait la troisième année qu’on s’arrange comme ça, et ça marche très bien. Ça devient un peu comme une grande sœur pour les enfants.» Pour Edmond, c’est la troisième année et ça se passe très bien. «Ça facilite la gestion du temps, et c’est beaucoup moins préoccupant quand on part le matin à 6h et qu’on revient le soir à 20h.» En revanche, quand les périodes de travail sont plus tranquilles, Guillaume Cyr prend plaisir à être papa à la maison et à aller chercher son fils à l’école.
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