Né en octobre 2006 à Vancouver, où il vit toujours, le jeune Jacob Tremblay est entré en force sous l’œil public grâce à sa performance dans Room: le monde de Jack, de Lenny Abrahamson. Il ne faisait pas là ses toutes premières armes, mais c’est là qu’il a marqué les esprits (et les a émus aux larmes).
Sélection.ca a été invité à la conférence de presse tenue par Zoom à l’occasion de la sortie de Luca d’Enrico Casarosa, le nouveau film produit par Pixar (en salle et sur Disney + à partir du 18 juin) où, en anglais, il prête sa voix au personnage principal.
(Cinéphile, il est certain que notre rubrique cinéma va vous inspirer!)
Un été initiatique
Imaginons la riviera italienne. Ses côtes escarpées. Ses villages caressés par le soleil. Ses tables garnies de pasta et de gelato. Et ses eaux bleues.
Ce sont elles, les eaux, la première escale de Luca le film parce que Luca le personnage est un monstre marin. Enfin, monstre… disons plutôt créature marine: il est trop mignon pour être monstrueux. Mignon de l’extérieur comme de l’intérieur. Il n’est pas dangereux… sauf peut-être pour lui-même: «Luca est timide, mais il veut vraiment explorer le monde des humains», résume Jacob Tremblay.
C’est là qu’il rencontre Giulia, l’exemple même des «nouveaux» personnages féminins désormais présents chez Disney et Pixar: «Elle est forte, audacieuse, tenace, déterminée, travailleuse, authentique et intense. Mais elle est aussi maladroite et excentrique. (Rires.) Elle me ressemble», fait Emma Berman, qui l’interprète.
Mais bien avant que sa route ne croise celle de Giulia, Luca croise Alberto. Alberto qui est lui aussi une créature marine, mais qui n’est pas couvé par ses parents et qui passe beaucoup de temps sur la terre ferme… car quand ils sortent de l’eau, ces «monstres» prennent apparence humaine. Peu importe leurs différences, c’est le début d’une amitié forte qui ne sera pas sans hauts et bas.
Jack Dylan Grazer prête sa voix à Alberto: «Il est, lui aussi, très curieux, mais il est passé à l’action.» Car contrairement à Luca, «il n’a personne pour le superviser, pour le couver, alors il est libre d’explorer et de réaliser ses rêves.»
N’hésitez pas à lire notre entrevue avec Kate DiCamillo, l’auteure de Flora et Ulysse.
Silencio Bruno!
Comprendre qu’Alberto fait ce qu’il veut, quand il veut. Ce qui va séduire Luca est, également, lui faire peur. La liberté est enivrante, mais elle peut donner le vertige. Et si la peur prend le dessus, pour Alberto, c’est clair: il faut crier «Silencio Bruno!» Un des thèmes du film est englobé par ces deux mots: Bruno est cette voix intérieure qui retient, empêche d’aller de l’avant, de prendre des risques. Pour réaliser son plein potentiel et se sentir bien dans sa peau, il faut savoir l’écouter.
Alberto sait cela. Luca va l’apprendre. Et Jacob Tremblay peut totalement s’identifier à ça: «Pour jouer un rôle, tu dois te donner à 100% dans chaque performance. Sinon, ça va tomber à plat. Et pour me donner comme ça, je dois à chaque fois sortir de ma zone de confort.» Sortir de lui pour devenir quelqu’un d’autre.
L’Italie en mode COVID
Devenir quelqu’un d’autre simplement avec sa voix n’est, au départ, pas la chose la plus simple à faire. Et le faire en temps de COVID est encore plus complexe: impossible pour les acteurs de se rendre en studio et de travailler, parfois ensemble, mais toujours en compagnie du réalisateur.
«J’ai passé un an dans le placard de ma mère, pouffe Jack Dylan Grazer. C’était définitivement nouveau pour moi! Un défi en tant qu’acteur et être humain. Je parie que mes voisins se demandaient ce qui se passait chez moi à cause de tous ces hurlements qu’ils entendaient!»
Jacob Tremblay a été plus chanceux puisque l’enregistrement a commencé pour lui avant que la pandémie ne ferme toutes les portes: «J’ai d’abord pu me rendre à San Francisco, chez Pixar – ce qui a été vraiment très cool. Puis, j’ai pu enregistrer dans un studio à Vancouver.»
Reste que l’opération a représenté un défi de taille pour l’équipe derrière… pas la caméra, mais les micros: «Il a fallu envoyer des iPads et des micros à tout le monde, leur faire tester les endroits les plus adéquats de leur maison, là où le son ne serait pas étouffé, raconte la productrice Andrea Warren. C’est bien beau être dans un placard, mais si vous faites un grand mouvement et que vos bras heurtent des cintres, décrochent des vêtements… Ou bien si tout le monde n’appuie pas sur le bon bouton au bon moment…» Un défi, disait-elle.
Pareil, pas pareil
Un défi qui a été bien relevé entre autres parce que les acteurs choisis avaient plusieurs points en commun avec le personnage qu’ils avaient à «vocaliser».
D’ailleurs, dès le départ, le design des deux jeunes monstres marins est le reflet de leurs différences: «Alberto est un nageur rapide, ses lignes sont nettes, sa queue est inspirée de cette du thon rouge, aigüe; alors que pour traduire l’innocence de Luca, nous sommes allés vers une forme plus arrondie», explique le réalisateur Enrico Casarosa.
Quant aux acteurs, leurs similitudes avec leur personnage, ça sautait aux yeux simplement en les observant à l’écran lors de la conférence de presse. Là où Jack Dylan Grazer, chevelure bouclée en désordre, avait de la difficulté à tenir en place («Je suis incontestablement un Alberto, il y a longtemps que j’ai fait taire mon Bruno!»); là où Emma Berman sourit et s’exclame comme Giulia («Elle et moi sommes excitées et joyeuses. Et puis, elle est persévérante: chaque année, même si elle perd, elle se réinscrit à la course dont le prix est une Vespa. Moi, je passe une audition, je n’ai pas le rôle, je passe une autre audition, je n’ai pas le rôle, je passe encore une audition… Je n’abandonne pas»).
Jacob Tremblay, cheveux longs (mode COVID?) et visage désormais adolescent, était attentif et sérieux – façon Luca. «Je me reconnais en lui, par son désir d’explorer le monde et… et de sortir de chez lui! Je pense qu’après plus d’en an de confinement, on est tous prêt à aller dehors!»
Lui, est d’ailleurs en ce moment en tournage en Bulgarie. Après, ce seront les vacances en famille à Osoyoos, «le Palm Springs de la Colombie-Britannique». Et puis, retour au travail… et derrière le micro puisqu’il prêtera sa voix à Barbotteur, leur poisson tropical qui est le meilleur ami d’Ariel, dans le remake en prises de vues réelles de La petite sirène.
Un nouveau titre à ajouter à une liste déjà bien garnie, dont voici quelques exemples.
Les Schtroumpfs 2 (2013)
Jacob Tremblay avait aux alentours de 6 ans quand il a incarné Blue, le fils du seul et unique Neil Patrick Harris dans le film de Raja Gosnell où Gargamel poursuit sa grande quête en vue de diriger la planète. Pour cela, il a besoin d’essence de Schtroumpf et de la Schtroumpfette.
Lesquels peuvent toujours compter sur leurs alliés humains, dont Patrick, maintenant marié et père de Blue (oui, Blue pour Bleu pour ce que l’on imagine), qui viennent de débarquer à Paris.
Jacob Tremblay, lui, n’a pas quitté le continent pour ce rôle puisque le film a été tourné… à Montréal (qu’il est possible de reconnaître pour qui s’y attarde).
Room: le monde de Jack (2015)
Le film réalisé par Lenny Abrahamson et scénarisé par Emma Donoghue à partir de son propre roman (qui, pour qui ne l’aurait pas lu, est plus poignant encore que le long métrage) a secoué le Festival international du film de Toronto quand il y a été présenté. Personne n’est sorti les yeux secs des projections… et pour cause! Room: Le monde de Jack est maintenant un classique parmi les films qui sont disponibles sur Netflix.
L’histoire est celle d’une jeune femme (formidable Brie Larson) qui, des années auparavant, a été kidnappée et vit captive dans une chambre. Son bourreau vient la rejoindre régulièrement dans la pièce. Il la nourrit, l’abreuve, la vêt. La viole. Elle a ainsi eu un enfant, Jack, qui célèbre ses 5 ans au début de l’histoire et pour qui la chambre dans laquelle il grandit est «le monde». Il n’a jamais mis le nez dehors, inconscient que Ma et lui sont captifs. Jacob Tremblay y est hallucinant de justesse.
Ne t’endors pas (2016)
Après l’horreur (malheureusement) très plausible de Room, une horreur… de cinéma: dans ce film de Mike Flanagan, Jacob Tremblay incarne Cody, un gamin de 8 ans qu’adopte un couple (interprété par Kate Bosworth et Thomas Jane) après la mort tragique de leur fils. Mais il y a un «problème» avec Cody: lorsqu’il s’endort, ses rêves deviennent réels… tant qu’il dort. Pour disparaître quand il s’éveille. Ainsi, après avoir vu une photo de l’enfant défunt de ses nouveaux parents, il rêve à lui… et le garçon apparait sous les yeux de son père et sa mère éplorée. Cette dernière fera tout pour revoir son fils. Ce qui est une très mauvaise idée.
Ce n’est pas un grand film d’horreur, mais c’en est un très efficace. On ne s’y endort pas!
Merveilleux (2017)
Un autre rôle, pour Jacob Tremblay, à arracher les larmes de quiconque n’est pas mort en-dedans. Le film est inspiré de Wonder, un grand roman jeunesse (mais pas que…) de R.J. Palacio – de préférence à lire avant de voir le film afin de découvrir August à travers les mots d’une autrice qui sait bâtir des effets et une structure.
Pour incarner Auggie, le jeune acteur a passé quotidiennement des heures sur la chaise de maquillage afin de transformer son adorable minois en celui d’un garçon qui vit avec le syndrome de Treacher Collins, donc avec une malformation du visage. Il y a, dans ce drame réalisé par Stephen Chbosky (un as des adaptations de romans à l’écran, il l’a prouvé avec Le monde de Charlie), la force d’une famille, l’humour d’un gamin pas comme les autres et un message beau et puissant sur l’importance d’apprendre à voir au-delà des apparences.
Avez-vous vu tous ces films qui ont reçu l’un des Oscars du meilleur film depuis sa création?
Ma vie avec John F. Donovan (2019)
Jouer dans un film de Xavier Dolan? Jacob Tremblay a pu cocher cette case dans son curriculum vitae en obtenant un rôle dans le premier film que le cinéaste a tourné en anglais. Il y incarne le jeune Rupert Turner qui, mal dans sa vie, décide d’écrire à son idole, l’acteur John F. Donovan (incarné par Jon Snow lui-même, Kit Harington) – un peu comme, enfant, Xavier Dolan avait envoyé une lettre à Leonardo DiCaprio.
À partir de là, le célèbre «What if?» a pris la relève: et si Leo avait répondu à Xavier? Ici, John écrit à Rupert, une relation épistolaire s’amorce et, bientôt, tout déraille. On comprend pourquoi 10 ans plus tard… alors que Rupert est maintenant incarné par un Ben Schnetzer pas particulièrement charismatique. C’est un des problèmes de ce film reçu de façon mitigée mais qui compte toutefois de beaux moments.
Bons garçons (2019)
Le verdict est tombé sur ce long métrage de façon indiscutable: un navet. C’est le film que Jacob Tremblay rayera peut-être un jour de son c.v. et il aura entièrement raison de le faire. C’est un total faux pas. Il y incarne un élève de 6e année qui est «amoureux» d’une fille qui ne le voit même pas. Il va tout faire pour se rapprocher d’elle, avec l’aide (hum…) de ses deux meilleurs amis, des «rejets» pour qui chaque mot ayant un rapport avec la sexualité est source de grands plaisirs. C’est tellement pas rapport, facile, ancien et «malaisant» que c’en est triste. À vite oublier – ou, mieux, à ne pas regarder même si on est fan de Jacob (en fait, surtout si on est fan de lui!).
Dans un autre registre: amateur de frisson, le célèbre québécois Patrick Senécal veut vous faire peur!